L’Actualité Toufik, Louisa Hanoune, Saïd Bouteflika et Tartag innocentés dans l’affaire du “complot contre l’état”

L’acquittement

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Ali BOUKHLEF Publié 03 Janvier 2021 à 09:45

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Les accusations de “complot contre l’État et l’armée”, portées contre les quatre accusés dans ce dossier, sont tombées. Toutefois, seuls Louisa Hanoune et le général Toufik ont été relaxés. Saïd Bouteflika et le général Tartag, poursuivis dans d’autres affaires, resteront en prison jusqu’à leurs procès respectifs.

Rejugés, hier, par le tribunal militaire de Blida, dans le cadre de ce qu’il convient d’appeler l’affaire dite du “complot” contre l’État et l’armée, les deux anciens responsables des renseignements algériens, les généraux Toufik et Tartag, ainsi que le frère de l’ex-président Bouteflika, Saïd, et la secrétaire générale du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, ont tous été acquittés. Ainsi, les accusations de “complot contre l’État” et “complot contre l’armée” sont tombées. Toutefois, seuls Louisa Hanoune et le général Toufik sont libres puisque les deux autres accusés, poursuivis dans d’autres affaires, doivent rester en prison jusqu’à leurs procès respectifs.

Hier, contrairement aux deux premiers procès, l’acte 3 de ce dossier a été, pour le moins, expéditif. L’audience a été pliée en à peine trois heures. Un temps nécessaire pour la lecture de l’acte d’accusation, le réquisitoire du procureur qui n’a demandé que “l’application de la loi” et les plaidoiries des avocats et les déclarations des prévenus. Les quatre accusés ont plaidé non coupables et finalement acquittés. 

De la peine de prison de 15 ans prononcée contre Mediène, Tartag et Bouteflika à deux reprises, la justice a révisé sa sentence et annoncé un acquittement pur et simple avec “abandon des charges” retenues, dans un premier temps, contre eux. “C'est une victoire contre la criminalisation de l'action politique”, s’est félicité le Parti des travailleurs dans une première réaction juste après le prononcé du verdict peu après 11h du matin.

Cependant, comme précisé plus haut, l’acquittement ne signifie pas la relaxe pour tous les accusés. Si le général Toufik a retrouvé son domicile hier en fin de journée, deux de ses anciens codétenus restent en prison. Le général Athmane Tartag sera “maintenu à la prison militaire à Blida, faisant l'objet de poursuites judiciaires devant la justice militaire”, a précisé, hier, un communiqué du ministère de la Défense nationale, tandis que Saïd Bouteflika “sera transféré dans une prison civile, étant poursuivi dans d'autres affaires devant le pôle pénal économique et financier relevant de la cour d'Alger”.

Les deux hommes sont sous des mandats de dépôt dans d’autres affaires. Lors des plaidoiries, la ligne de défense n’a pas varié. Selon des sources recoupées, les quatre accusés ont maintenu les mêmes arguments : tout le monde a confirmé la tenue, le 27 mars 2019, d’une rencontre qui visait notamment à trouver une solution à la crise politique que vivait le pays durant cette période, mais tous ont nié les accusations de “complot”. Louisa Hanoune a, par exemple, maintenu ses anciennes déclarations portant sur ses activités politiques. “Je suis militante, je ne peux pas comploter contre mon pays”, a-t-elle dit, tout en affirmant que la fameuse rencontre “d’une heure au maximum” visait à se concerter “sur la solution” à la crise que vivait le pays. “Je n’ai commis aucun délit”, a insisté Louisa Hanoune, rapporte Mokrane Aït Larbi, son avocat. “J’ai servi mon pays durant de longues années. Jamais l’idée de comploter contre mon pays n’a traversé mon esprit”, s’est défendu, de son côté, le général Toufik, selon son avocat Miloud Brahimi. Il s’agit d’un “dossier vide”, ajoutera l’ancien chef du Département de renseignement et de sécurité (DRS).  

Saïd Bouteflika : “Mon frère est en résidence surveillée”
Très attendue, la déclaration de Saïd Bouteflika a tenu tout le monde en haleine. Contrairement aux autres accusés qui se sont exprimés spontanément, le frère et conseiller du président déchu a apporté avec lui un discours écrit. Il s’est lancé dans une longue plaidoirie pour défendre le règne de son frère “patriote” qui n’a “voulu que construire son pays”. Puis, il s’en prendra à “des proches” qui “se prosternaient” face au raïs avant de “se retourner contre lui” après le soulèvement populaire du 22 février 2019, indiquera Saïd Bouteflika. Aujourd’hui, “moi, je me trouve en prison” et “mon frère est en résidence surveillée”. Face aux accusations qui le donnent comme étant le principal responsable de la gestion du pays lors des dernières années du règne de son frère, Saïd Bouteflika se défend.

Non, “je n’ai jamais utilisé le sceau de la présidence de la République parce que je n’étais qu’un simple” conseiller du président de la République (Abdelaziz Bouteflika) qui “gérait le pays”, a-t-il encore insisté. Le juge a tenté de l’interrompre pour l’empêcher d’utiliser un document pour sa défense. “Je me suis levé pour rappeler au juge que même si M. Bouteflika n’est pas mon client, il a le droit de se défendre avec n’importe quel moyen, conformément à la loi”, révèle Mokrane Aït Larbi. Interrogé sur la fameuse réunion du 27 mars, Saïd Bouteflika maintient sa version. “Je n’ai jamais comploté contre mon pays”, a-t-il avancé.

Devant l’insistance du juge qui voulait en savoir plus, Saïd Bouteflika n’en dira pas plus. “S’il vous plaît, évitez de me poser d’autres questions sur le sujet, parce que je risque de blesser certains”, se contentera-t-il de dire. Chez les avocats, le soulagement a dominé. Pour Miloud Brahimi, ce verdict “fait honneur à la nouvelle Algérie” qui appelle à l’édification d’une “justice nouvelle”. “Nous sommes très satisfaits de cette décision que nous attendions depuis longtemps”, a-t-il encore ajouté. Cette décision s’ajoute à celle qui a concerné, il y a quelques jours, le général à la retraite Khaled Nezzar, condamné, lui, par contumace à 20 ans de réclusion. L’ancien ministre de la Défense a été lui aussi acquitté dans cette affaire de “complot”, après avoir vidé un mandat d’arrêt international émis contre lui depuis l’année dernière. Cette affaire, désormais close, a suscité des controverses durant de longs mois. Les quatre personnalités, arrêtées en mai 2019, avaient été accusée de “complot” à la suite d’une rencontre tenue le 27 mars 2017 dans la résidence Diar El-Afia à Alger. 

Il s’agissait surtout pour Saïd Bouteflika, les généraux Toufik et Tartag, auxquels s’est jointe Louisa Hannoune, de trouver une porte de sortie au clan des Bouteflika après le soulèvement populaire. L’idée d’une transition était alors évoquée avec, en perspective, le départ d’Abdelaziz Bouteflika et d’Ahmed Gaïd Salah. Ce dernier, se sentant visé, n’avait pas apprécié, et a rapidement organisé la contre-attaque. Durant les 18 mois de détention des trois personnalités — Louisa Hanoune a été libérée après neuf mois de prison —, des interrogations ont surgi sur, notamment, le statut de ces détenus particuliers. 

Cela s’est accentué avec les révélations faites récemment par Farouk Ksentini, qui a indiqué que son mandant, le général Toufik, ne se trouvait plus au pénitencier de Blida, mais dans un hôpital militaire de la banlieue d’Alger où il poursuit des séances de rééducation après de multiples fractures causées par une chute accidentelle en prison. 

Mis sous mandat de dépôt, Saïd Bouteflika sera donc jugé dans le cadre de l’affaire de la création de la chaîne de télévision “El-Istimrariya TV” pour faire de la propagande en faveur du 5e mandat, et dans l’affaire des SMS qu’il échangeait avec l’ancien ministre de la Justice Tayeb Louh pour influer les décisions des juges. Le général Bachir Tartag est également poursuivi dans plusieurs dossiers après que son nom a été cité dans des procès de grande corruption.

 


Ali Boukhlef

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