Des Gens et des Faits 17e partie

L’ éternelle blessure

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Taos M’HAND Publié 04 Janvier 2021 à 09:00

Résumé :  Pour la première fois de sa vie, elle entend des coups de feu, elle a peur. Nadia et ses colocataires sont habituées. Parfois, ce sont des cris qui les réveillent la nuit. Elles lui rappellent que Nedjmeddine s’expose au danger de jour comme de nuit. Anissa a l’estomac noué par l’angoisse, elle tente de le joindre, mais il n’est plus à son bureau. 

Anissa n’a pas dormi de la nuit. Le matin, elle est debout dès la première heure. Nadia se lève après elle et prépare du café. Les autres ne tardent pas à les rejoindre. Une fois le petit-déjeuner avalé, elles vont se préparer à sortir. 
-Vous allez me laisser seule ?, leur demande-t-elle. 
-Nous n’avons pas le choix. 
Nous donnons des cours à 8 h, dit Nadia. Mais moi, je rentrerais à midi. Un conseil, si Nedjmeddine ne vient pas te chercher, ne sors pas. Le frigo est plein, si tu veux te préparer à manger. Je ne voudrais pas que tu t’égares. Certaines rues sont de vrais coupe-gorge.
-Je ne pourrai pas mettre un pied dehors. Les tirs de la nuit dernière ont chassé toute envie de dormir et même celle de sortir, dit Anissa. Je voudrais appeler Nedjmeddine, savoir comment il va, ce qui s’est passé quoi, vous n’êtes pas curieuses de savoir ?
-Ma chère, nous n’avons pas besoin d’un communiqué de la radio ou de la télé pour savoir qu’il y a des blessés, des morts de part et d’autre. Espérons qu’il n’y ait personne que nousconnaissons parmi les victimes ! Qu’Allah accueille dans Son Vaste Paradis ces martyrs du devoir. Va appeler ton fiancé, inchallah tu n’auras que de bonnes nouvelles. 
-Inchallah.
Anissa retourne dans la chambre et appelle au bureau. Nedjmeddine décroche à la première sonnerie. Il soupire en reconnaissant sa voix. Elle le sent épuisé. 
-J’ai essayé de te joindre, mais tu n’étais pas là. Où étais-tu hier soir ? 
-Un poste police a été attaqué. Des jeunes recrues ont été blessées. J’ai passé la nuit à l’hôpital.
-Comment vont-ils ?
-L’un d’eux n’a pas passé la nuit, les deux autres sont blessés, mais en vie.
-Oh mon Dieu ! Quand est-ce que cela va s’arrêter ? J’ai l’impression que cela fait une éternité depuis que le pays perd ses enfants. Ceux qui ne trouvent pas la mort, en ressortent blessés, marqués à vie. Je n’ai pas fermé l’œil de la nuit, j’avais peur pour toi.
-Il ne faut pas… À chacun sa destinée, murmure-t-il. Je crois que si j’étais mort, hier soir, je serais parti le cœur heureux, car nous avons passé un bel après-midi. 
-Je ne veux pas qu’il t’arrive malheur.
-Ça n’arrivera pas, promet-il. Qu’est-ce que tu vas faire ce matin ?
-Rien, répond-elle. Alors, on ne se verra pas ?
-Je viendrai te chercher à midi, promet-il. Sois patiente.
-Je t’aime Nedjmeddine. Promets-moi d’être prudent. 
-Promis juré ! 
À peine a-t-elle raccroché que son oncle appelle pour prendre de ses nouvelles. Elle est émue en l’entendant, des larmes l’aveuglent. 
-Tu n’es pas encore sortie, dit-il soulagé. Je voulais te parler. Comment s’est passée la journée d’hier ?
-Bien, bien, le rassure-t-elle, mais elle ne lui raconte pas pour la nuit blanche qu’elle a passée à cause des tirs. Les filles sont adorables, nous avons passé une bonne soirée ensemble.
-Salue les de ma part, tu peux les inviter chez nous. Elles seront les bienvenues. Mais dis-moi, quand sauras-tu si tu le poste est pour toi ?
Anissa lui explique qu’en principe, l’ami de Nedjmeddine doit les appeler. Elle se surprend à espérer qu’il ne soit plus libre, car elle se sent incapable de vivre dans ce climat de terreur. Elle ne le dit pas à son oncle, mais elle est décidée à vite rentrer.

 


(À SUIVRE)
 T. M. 

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