L’Actualité Prétendants invisibles et campagne transparente

À Tizi Ouzou, les candidats se cachent pour se faire élire

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Samir LESLOUS Publié 06 Juin 2021 à 08:56

“Oser affronter les citoyens dans un meeting est un risque sérieux dans le contexte actuel. Nous avons choisi un travail de proximité auprès des gens que l’on connaît”, a confié un postulant. Une confession qui renseigne sur l’immense difficulté des concurrents face au scrutin législatif du 12 juin prochain à Tizi Ouzou.    

“Oser affronter les citoyens dans un meeting est un risque sérieux dans le contexte actuel. Nous avons choisi un travail de proximité auprès des gens que l’on connaît”, a confié un postulant. Une confession qui renseigne sur l’immense difficulté des concurrents face au scrutin législatif du 12 juin prochain à Tizi Ouzou. 

Ils sont, pour leur majorité, d’une extrême discrétion, quand certains ne sont pas tout bonnement “confinés”. Difficile pour eux de faire campagne et de convaincre dans une circonscription majoritairement acquise au boycott du scrutin. Les candidats de Kabylie se cachent pour se faire élire. Pas de place pour les grands meetings aux salles pleines à craquer. 

N’étaient les affiches qui circulent sur les réseaux sociaux, l’on ne saurait même pas qui sont les candidats. Jusqu’à la veille du début de la campagne électorale, les citoyens se demandaient encore qui étaient les prétendants à la députation. Pas de traces visibles pour les 220 candidats répartis sur vingt listes dont quatre indépendantes. La wilaya risque d’envoyer onze députés peu connus du grand public. “Dès l’opération de collecte des parrainages, nous avons senti déjà la difficulté de la tâche”, a assuré un autre candidat.

Dix-sept jours après le début de l’épreuve du terrain, même les habituelles affiches qui défigurent les murs de la ville à chaque rendez-vous électoral sont invisibles. Seuls quelques tableaux placés à la hâte, probablement de nuit, par l’Autorité nationale indépendante des élections, Anie, sont là, par endroits, pour rappeler qu’une élection se profile à l’horizon. 

Des tableaux sur lesquels aucun des candidats en lice ne s’est encore aventuré à placarder le moindre portrait ou la moindre liste. Sur certains de ces espaces dédiés à l’affichage, ce sont, quelquefois, des portraits de détenus d’opinion ou encore des graffiti que l’on peut apercevoir.    

Côté meetings et rencontres, un nombre insignifiant a été organisé, et très souvent dans des salles quasiment vides où les candidats viennent discourir laconiquement tout en évitant d’ouvrir un quelconque débat. Hantés à l’idée d’être “chassés” ou même de voir la salle où doit se dérouler leur activité envahie, les candidats ne s’aventurent même pas à rendre public à l’avance le lieu de la tenue de leurs meetings, lorsqu’ils ne procèdent pas tout simplement à leur annulation.

À ce titre d’ailleurs, il y a lieu de souligner que les rares activités tenues jusque-là sont celles prévues dans les salles sécurisées du chef-lieu de wilaya à l’exemple de la maison de la culture Mouloud-Mammeri, le théâtre Kateb-Yacine ou la cinémathèque le Mondial. Les candidats de la liste “Hisn El Matin” qui ont tenté d’animer une rencontre mercredi dernier à la maison de jeunes des Ouacifs ont eu à le vérifier à leurs dépens. 

Les quelques citoyens présents sur les lieux, les ont priés de quitter les lieux, comme le montre une vidéo qui a fait le buzz sur la Toile. Même les chefs des partis politiques représentés par des listes localement ont pratiquement boudé la wilaya de Tizi Ouzou. Seul le président du parti El-Islah s’est rendu dans la capitale du Djurdjura où il a animé une rencontre, à la Maison de la culture, devant ses candidats et quelques journalistes. Le meeting prévu par Soufiane Djilali, de Jil Jadid, le 27 mai dernier dans la ville des Genêts, a été annulé à la dernière minute. Certains candidats ont carrément choisi de s’éclipser pour ne pas avoir à subir les foudres des partisans du rejet de l’élection. 

Les plus audacieux optent plutôt pour quelques furtives sorties de proximité où ils sont accueillis généralement par des amis ou des membres de leurs familles. Même sur les réseaux sociaux, très peu de candidats osent l’aventure au risque de se prendre un torrent de critiques virant parfois à l’insulte. C’est la double épreuve pour les candidats qui ont choisi de braver l’hostilité quasi générale qui règne dans cette région de Kabylie où les élections en général, et les législatives en particulier suscitent le rejet depuis déjà belle lurette, et a fortiori lorsque les partis à fort ancrage n’y participent pas. 

Ainsi, les créneaux horaires officiels accordés sur les médias lourds sont devenus les rares espaces d’expression dont disposent les candidats pour au moins se faire connaître. Une tâche visiblement ardue, car faute de présence sur le terrain, le citoyen a toutes les peines à distinguer entre les noms des partis en lice et tous ces candidats qui s’en remettent beaucoup plus au destin pour être choisis parmi les 11 qui obtiendront leur place au soleil.

Il faut dire que même l’Autorité nationale indépendante des élections est restée quasi muette et ne communique même pas, sinon très rarement, même avec la presse. De sa composante, à l’exception de son président, le très peu prolixe, Youcef Gabi, le reste de ses membres demeure inconnu du grand public. 

 


Samir LESLOUS

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