L’Actualité Algérie - union européenne

Désaccord d’association

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Hassane OUALI Publié 02 Novembre 2021 à 10:21

© D.R
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C’est la première fois qu’Alger réclame la révision “clause par clause” de l’Accord d’association qui la lie à l’Union européenne en vigueur depuis 2005. Un Accord jugé déséquilibré et défavorable à l’économie algérienne.

S’il a été un succès diplomatique certain, l’Accord d’association avec l’Union européenne n’a pas été une grande réussite économique pour l’Algérie. “L’essor des relations économiques et sociales équilibrées entre les parties”, fixé, entre autres, comme objectif stratégique du document ratifié en 2002 à Valence (Espagne), n’a pas eu lieu, du moins pour la partie algérienne. Plus de quinze ans après son entrée en vigueur, Alger constate à ses dépens que cet accord est tout sauf “gagnant-gagnant”. Il faut dire que depuis quelques années déjà, la partie algérienne se plaignait d’un “déséquilibre économique” et reprochait à Bruxelles de trop favoriser le marché sur l’investissement. Régulièrement et à l’occasion de chaque réunion du Conseil d’association, le gouvernement algérien essaie de défendre l’option de renégocier certaines clauses de l’Accord, non sans créer de crispation entre les deux parties.

Et depuis avant-hier, le président Tebboune demande abruptement de “revoir les dispositions de l’accord, clause par clause, en fonction d’une vision souveraine et d’une approche ‘gagnant-gagnant’”. Un chantier aussi immense que difficile à réaliser, d’autant que cela ne dépend pas seulement de la seule volonté de la partie algérienne. Une telle démarche entraînerait d’énormes enjeux dans un contexte régional et international radicalement modifié par rapport à il y a vingt ans. Les termes qui ont présidé à la contraction de l’Accord d’association dans les domaines de stabilité, de sécurité et des relations internationales sont profondément bouleversés. In fine, s’agit-il de renégocier intégralement l’actuel accord ou d’en négocier carrément un nouveau ? À cette interrogation se superpose une autre question majeure.

Quelle est la pertinence stratégique du document signé dans la précipitation en 2002 ? “Il est une réalité obsolète depuis déjà longtemps”, tranche un expert algérien très familier de l’Accord. Et les raisons ne manquent pas. “Dès lors que les réformes économiques indispensables n’ont pas été entamées, que l’environnement de l’entreprise nationale n’a pas été amélioré et que les conditions d’accueil de l’investissement étranger pendant la phase transitoire en accompagnement du processus d’ouverture n’ont pas été faites, l’Accord n’avait plus de sens”, explique l’expert. À cette critique s’ajoute ce que les acteurs économiques ne cessent de souligner en matière d’instabilité chronique du cadre juridique et à coups de lois de finances, alors que “l’Accord était censé garantir, un tant soit peu, le cadre macroéconomique”. 

Ce qui lui a fait perdre toute utilité. Plus grave encore, “il tournait à vide à partir du moment où aucune modernisation des méthodes de protection tarifaire n’a été faite pour, d’une part, protéger les produits sensibles, et, d’autre part, pour faciliter la vie des exportateurs algériens, ni au plan de la réglementation commerciale et des procédures douanières ni des règles bancaires”, objecte un spécialiste des échanges commerciaux. 

Négocier un nouvel accord ?
À la lumière du constat, pour le moins, peu réjouissant, établi par le président Tebboune et même avant lui, s’agit-il alors de renégocier intégralement l’actuel Accord d’association ou alors de préconiser une démarche encore plus radicale qui est celle de négocier un nouvel accord. Nécessaire aussi bien pour l’une que pour l’autre, les deux sont extrêmement coûteuses aux plans politique, économique et géostratégique. 

L’Exécutif de Tebboune a-t-il déjà un plan sur la table avec un agenda et la méthode à suivre et, surtout, dans quelle position négocier ? Si tel est le cas, il faut dès à présent anticiper sur ce que sera l’attitude de Bruxelles. Il faut s’attendre à ce que l’Union européenne mette sur la table plus d’exigences et de conditionnalités en matière politique, de droits de l’Homme et de l’État de droit dans le domaine économique. Il est évident que la partie s’annonce compliquée et complexe, et implique une redéfinition de la doctrine politique et économique. La bataille sera tellement rude qu’il faudra sérieusement s’y préparer. Pour éviter de retomber dans les mêmes erreurs, des experts préconisent d’inverser le calendrier. “Il faut, au préalable, impérativement commencer par les réformes structurelles internes, reprendre le processus d’accession à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) - ce qui est loin d’être acquis - pour ensuite envisager une négociation d’un nouvel accord avec l’Union européenne”. Si l’Algérie privilégie de réviser l’actuel Accord, clause par clause, c’est faire le choix de rester dans la logique du texte signé en 2002. “Cela prendra des années et, pendant ce temps, l’actuel Accord continuera de sévir, à moins que le gouvernement Tebboune ne décide de suspendre l’application de certains chapitres, ce qui est assez problématique”, prévient un des négociateurs algériens. 

“Au plan politique, il y aura à l’évidence des États membres qui voudront nous prendre à la gorge et pourraient faire obstacle à de nouveaux arrangements”, redoute-t-il encore. Une donne à prendre en ligne de compte. En somme, révision ou nouvel accord, Alger devra avoir a priori un plan en tête, surtout qu’elle saura évaluer toutes les implications et autres incidences internes et internationales. Il faudra qu’elle se donne particulièrement des perspectives claires pour mieux imaginer la place de l’Algérie dans une globalisation où les guerres économiques font plus de ravages que les guerres classiques.  

 


Hassane Ouali

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