L’Actualité Élections législatives anticipées

Discours burlesques d’une inénarrable campagne

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Ali BOUKHLEF Publié 27 Mai 2021 à 09:31

© Archives Liberté
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Lancée il y a une semaine, la campagne électorale pour les législatives prévues pour le 12 juin peine à décoller. Les partis politiques et les candidats indépendants engagés dans la bataille donnent l’impression de se livrer à un laborieux exercice dans l’espoir de convaincre les électeurs de se rendre aux urnes, comme en témoignent ces images relayées par les chaînes de télévision montrant des salles quasiment vides. Et à moins de deux semaines du scrutin législatif que les autorités veulent présenter comme historique, voire déterminant, aucun fait saillant n’émerge de cette campagne électorale surprenante, dans un contexte singulier. 

Ni épaisseur dans les discours politiques, ni cohérence, ni mobilisation citoyenne ne sont, pour l’heure, au rendez-vous. Pis encore, un examen des discours de certains candidats ou leaders de partis fait ressortir l’indigence culturelle de leurs auteurs. C’est le cas, par exemple, d’Aïssa Belhadi, président du parti dénommé Bonne gouvernance qui s’est distingué par une sortie pour le moins insolite. 

En tentant de vendre l’image d’un parti qui a misé sur la liste des femmes, le professeur de droit a cru bon de comparer les “blondes” qui figurent sur les affiches de son parti à “de la fraise sélectionnée”, des propos qui n’ont pas manqué d’enflammer la Toile. Si certains internautes y ont trouvé matière à dérision et aux sarcasmes, d’autres, en revanche, y ont vu un “discours misogyne” qu’ils n’ont pas hésité à dénoncer. 

Mais ce responsable qui a présenté sur ses listes une ancienne ministre de Liamine Zeroual et ancienne présentatrice vedette de la télévision gouvernementale, à savoir Zahia Benarous, n’a pas encore expliqué son propos. Dans ce chapitre de déclarations à l’emporte-pièce, le chef du FLN, Baâdji Abou El-Fadhl s’est, lui aussi, distingué par une sortie qui tranche avec le bagout connu d’anciens responsables du parti unique. Il a ainsi tenté de donner une explication mystique au chiffre 7, attribué à son parti par l’Autorité nationale indépendante des élections (Anie).

L’homme, qui n’a pas réussi à présenter des listes de son parti dans toutes les circonscriptions électorales, chose inédite pour un parti qui a régné sans partage depuis plus d’un demi-siècle, a lié ce chiffre au Coran, à la tradition prophétique et même à la guerre de Libération nationale. Il faut dire qu’il n’est pas le seul dans ce domaine. D’autres chefs de partis et des candidats ont tous tenté des explications plus au moins fantaisistes aux chiffres qui leur sont attribués par l’Anie. Une manière probablement pour eux de combler une absence manifeste de programme. 

C’est ce que fait, par exemple, Abdelkader Bengrina. Le président du parti islamiste El-Bina, qui a intégré sur ses listes des candidates non voilées, histoire de se donner l’image d’un parti politique ouvert sur la modernité, a choisi de verser dans le populisme en guise de programme électoral. Il a ainsi proposé “de fermer les écoles privées qui dispensent des cours en français”. 

L’ancien candidat malheureux, arrivé deuxième lors de la dernière élection présidentielle du 12 décembre 2019, fait désormais de la suppression de la langue française son credo. Et il n’est pas le seul à pousser le populisme jusqu’à l’excès. Le président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), dont le parti dispose pourtant d’un programme très détaillé, propose de tenir une “conférence de dialogue national” si son parti arrivait en tête à l’issue des élections législatives. Abderrezak Makri sait pourtant que cette prérogative est réservée au seul chef de l’État qui, pour l’instant, n’en a jamais parlé publiquement.

Sur le terrain, les candidats et les partis politiques peinent presque à entamer la campagne. Même la télévision officielle, qui tente de montrer les plus belles images de cette laborieuse campagne, a du mal à dissimuler la réalité en montrant des salles parfois désespérément vides. Seuls deux ou trois leaders arrivent à remplir les salles mises à leur dispositions par l’administration. D’autres ont été carrément obligés de surseoir à certains meetings. 

C’est le cas de Baâdji Abou El-Fadhl, le secrétaire général du FLN, qui a dû renoncer à un meeting prévu la semaine dernière à Blida, faute de public. Pour éviter cette épreuve, certains candidats préfèrent descendre dans l’arène pour des rencontres de proximité. Un exercice difficile face à une population plus préoccupée par la gestion de ses problèmes du quotidien. Autre image éloquente de cette campagne inédite : les panneaux réservés aux affiches électorales sont globalement vides. 

Pour contourner ces obstacles, certains candidats n’ont pas trouvé mieux que d’investir les réseaux sociaux. C’est le moyen le moins coûteux pour tenter de défendre sa candidature. Mais là aussi, certains postulants sont parodiés et tournés en dérision par les internautes qui comparent cette campagne à un “cirque”.

 


Ali Boukhlef

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