L’Actualité Pr Kamel Sanhadji, directeur général de l'Agence nationale de la sécurité sanitaire

“La vaccination est notre salut”

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Karim BENAMAR Publié 23 Janvier 2022 à 10:27

© D.R
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Il est l’un des premiers professeurs à avoir prédit la neutralisation du coronavirus par le variant Omicron. Depuis, des scientifiques à travers le monde confirment cette tendance : Omicron peut être la solution contre le variant Delta. Le professeur Kamel Sanhadji, immunologue et président de l'Agence nationale de la sécurité sanitaire, explique dans cet entretien comment ce variant sud-africain peut permettre d’atteindre une immunité collective, à condition, insiste-t-il, d’accélérer la vaccination. 

Liberté : Comment évaluez-vous la situation épidémiologique actuelle ? Prête-t-elle à inquiétude ? 

Pr Kamel Sanhadji : Nous sommes en train de vivre une situation inédite. Deux virus sont en circulation. Ils prolifèrent à grande vitesse. Le variant Omicron est en train de s’imposer comme prédominant, alors que le variant Delta frappe déjà le pays de plein fouet. Est-ce que cette situation prête à l’inquiétude ? Oui. La double présence du virus est source d’inquiétude. Les cas d’infection sont en nette progression, alors que nous n’avons pas encore atteint le pic épidémiologique de cette quatrième vague (Delta), combinée à l’apparition d’Omicron dont la circulation, comme tout le monde le sait, est extrêmement rapide. 
Cela étant dit, permettez-moi de le redire, ici, encore une fois : il ne faut pas se tromper d’ennemi. Le variant Delta doit rester notre première préoccupation en raison de sa gravité et des effets néfastes qu’il génère autant sur les personnes atteintes que sur notre système de santé publique. Actuellement, les structures de santé sont extrêmement sollicitées. C’est un indicateur clair de la situation épidémiologique prévalant actuellement dans notre pays.  

Faut-il s’attendre à des débordements au niveau des structures hospitalières ? 

Les hospitalisations augmentent, en soins critiques notamment et en réanimation. Nos praticiens le disent. Les structures hospitalières sont plus ou moins pleines. Et la situation ira en s’aggravant. C’est le problème majeur à travers le monde. Depuis l’apparition du coronavirus, ce sont les systèmes de santé qui sont mis à rude épreuve. Des systèmes de santé parmi les plus modernes à travers le monde, ont été mis à genoux. 
Débordement ? Nous n’en sommes pas encore à ce point. Ce que je peux dire, c’est qu’il faut se préparer à toute éventualité. Nous avons encore des capacités de redéploiement et de mobilisation de lits de réanimation au niveau des hôpitaux. Le président de la République a donné des instructions claires pour augmenter le niveau de prise en charge dans les établissements de santé. Il y a également une préparation qui s’est faite et continue d’être menée pour la mise en place d’un dispositif d’urgence consistant en la mobilisation de médicaments anti-Covid dans les hôpitaux et dans les pharmacies.  Mais cela ne doit pas nous faire oublier qu’il s’agit d’un virus extrêmement grave. Vu la situation actuelle, nos hôpitaux seront de plus en plus sollicités. Encore une fois, la vaccination est notre salut. Nous ne cesserons jamais de le répéter : la vaccination demeure le moyen le plus efficace de lutte contre la Covid-19. 

Vous avez déclaré que le variant Omicron peut être la solution contre le coronavirus…

Il s’agit d’une extrapolation scientifique basée sur des preuves scientifiques. Les observations sur le variant Omicron, en Afrique du Sud, permettent de conclure que ça peut en effet être la solution, à condition, et j’insiste sur cela, de lutter efficacement contre le variant Delta, au risque que ce dernier ne mute encore une fois. Il est établi maintenant, par plusieurs équipes scientifiques pluridisciplinaires, que la sévérité d’Omicron est très faible, sinon quasiment nulle. Sa circulation rapide peut nous permettre de développer une immunité collective. Des recherches poussées sont effectuées, tandis que d’autres sont en train d’être menées en Angleterre ou encore au Danemark, où ces données ont déjà été confirmées. Mieux, une publication scientifique très sérieuse, qui paraîtra dans quelques jours en Afrique du Sud, va encore confirmer cette tendance. C’est une publication qui va donner les résultats des premières expériences menées par une équipe de scientifiques qui a prélevé des anticorps sur des personnes contaminées par le variant Omicron. Lesquels anticorps ont été testés sur le variant Delta. Résultat : Omicron lutte efficacement contre le variant Delta. Plus que cela, les anticorps développés chez les personnes infectées au variant Omicron parviennent à neutraliser tous les coronavirus (Delta, Alpha, Beta, etc.) d’avant. Ce sont là des preuves scientifiques. Cela nous permet d’être très optimistes. C’est un mal pour un bien !  

Faudra-t-il alors songer à la fin de la vaccination ? 

Surtout pas ! J’essaie de vous faire un exposé scientifique simplifié sur les expériences scientifiques quant à l’efficacité des anticorps développés par les personnes contaminées par le variant Omicron. Il ne s’agit nullement de dire qu’il faut arrêter la vaccination. L’efficacité – si je puis dire — d’Omicron est dans le fait qu’il va freiner plus ou moins la propagation du virus Delta. Avec une vaccination soutenue et accélérée, nous pourrons par conséquent atteindre une immunité collective. Il ne faut pas baisser la garde face au variant Delta qui reste très dangereux, avec des effets néfastes. Il faut savoir que ce dernier (Delta), si on le laisse proliférer dans la nature, peut nous faire une mauvaise surprise en dérivant pour générer à son tour un autre variant. Il faut donc le freiner au maximum en accélérant la vaccination à toutes les échelles. Au risque de me répéter, la vaccination reste notre meilleur allié.

Il y a une prolifération d’autotests Covid dans les pharmacies. Quelle sont leur fiabilité ?  

Les autotests, par définition, ne peuvent pas être du même niveau de fiabilité que la PCR, par exemple, qui reste le standard-gold en termes de fiabilité. Les autotests sont appliqués par la personne elle-même. Or, il y a un certain nombre de biais qui peuvent fausser les résultats. À moins d’être un professionnel de la santé qui sait comment utiliser un autotest, les risques que les résultats soient biaisés ne sont pas exclus. Maintenant, si vous me parlez de la validité même de ces “produits”, en principe ces autotests sont contrôlés. On ne devrait pas avoir sur le marché des produits non validés par l’Agence des produits pharmaceutiques et la Commission d’homologation des médicaments.

Les autorités ont pris de nouvelles mesures de lutte et de prévention contre le coronavirus, avec le retour à la fermeture des écoles ou encore la fermeture des espaces de loisirs comme à Alger. S’agit-il d’un confinement et est-ce nécessaire ? 

Confinement, pas confinement, la sémantique importe peu pour le scientifique que je suis. Nous sommes en face d’une situation. Il existe des données et des faits. Delta se multiplie dangereusement. La courbe des contaminations est ascendante. 
Les hôpitaux, comme je l’ai rappelé, sont de plus en plus sollicités. Dans les écoles, il y a eu ces dernières semaines une inquiétante propagation du coronavirus. 
De plus en plus d’enfants sont contaminés, en attendant les analyses de séquençage de l’Institut Pasteur pour nous dire s’il s’agit du Delta ou de l’Omicron. C’est une question de santé publique. Je ne peux, par conséquent, que saluer ces mesures. La suspension des cours pour dix jours et la fermeture des espaces récréatifs et de loisirs, à Alger ou ailleurs, sont des décisions salutaires, sages et judicieuses. Rien ne doit mettre en péril la santé publique.  

 

Entretien réalisé par : Karim Benamar

 

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