L’Actualité Abderrahmane Hadef, économiste

“L’allocation des ressources doit se faire sur la base d’un business plan”

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Ali TITOUCHE Publié 11 Janvier 2022 à 09:39

© D.R
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Liberté : Le Trésor a mis en place, en 2021, un programme massif de rachat des créances des entreprises publiques économiques (EPE). La valeur des dettes rachetées par le Trésor public dépasse les 15,3 milliards de dollars. N'est-ce pas là un montant qui rappelle l'urgence d'une réforme du secteur public marchand afin de l'affranchir définitivement du soutien permanent du Trésor public ?

Abderrahmane Hadef : Par rapport à l’ambitieux programme de renouveau économique, force est de constater que la question du secteur public marchand prend une dimension stratégique, aussi bien par rapport à son avenir qu’au regard du rôle que cette catégorie d’entreprises doit jouer pour l’amorce d’une vraie relance économique, performante et durable. Néanmoins, la prise en charge effective de cette question est tributaire d’un assainissement effectif de ce secteur, non par l’injection de nouvelles enveloppes financières, mais par un vrai projet de business development, à travers un audit fiable et exact de la situation de chaque entité, permettant par la suite une restructuration autour de nouveaux objectifs réalistes et réalisables. L’allocation des ressources doit dorénavant se faire sur la base d’un business plan conçu selon les principes de viabilité économique et ayant les pratiques de bonne gouvernance comme réel garant. Les EPE peuvent jouer le rôle de locomotive dans leurs secteurs respectifs. 
Un vrai changement d’approche dans le traitement du secteur public marchand s’impose aujourd’hui. Il est temps que ces entreprises retrouvent les notions de performance et de compétitivité et deviennent des sources de richesses pour le Trésor public et non pas l’inverse. Il faut reconnaître qu’aujourd’hui, les actifs de ces entreprises publiques sont sous-valorisés, voire pas du tout valorisés. L’aspect managérial est pour beaucoup dans la situation dans laquelle se trouvent les entreprises publiques, combiné au fait que les considérations sociales priment souvent sur les objectifs économiques.

Cette réforme du secteur public marchand a été inscrite dans le programme d'action du gouvernement, mais peu d'avancées ont été constatées. Quelle forme cette réforme peut-elle prendre, selon vous ?

Je pense qu’il est temps, aujourd’hui plus que jamais, de mettre en place, en premier lieu, un cadre de dialogue sur toutes les questions en relation avec les dossiers socioéconomiques de l’heure. À mon sens, il faut revoir le mécanisme de la tripartite pour le rendre plus adapté et plus efficace dans la résolution et le traitement des dossiers qui conditionnent la réussite du programme de relance économique. Il est question d’innover dans ce cadre de dialogue, à travers un format plus restreint et hautement opérationnel. Je pense que les tripartites sectorielles peuvent être un meilleur cadre d’examen et de prise en charge de ces dossiers, y compris ceux des EPE. 
L’urgence nous impose une approche technique, qui permettra de mettre sur la table les principaux sujets en relation avec l’avenir de ces EPE, dont les projets de réorganisation, les éventuels plans sociaux, le partenariat public-privé, etc. 
En résumé, cette réforme doit aboutir à une restructuration organisationnelle et managériale avec une clarification du statut de l’État entre propriétaire et actionnaire. Revoir les missions et les prérogatives des organes sociaux de ces sociétés (les conseils d’administration et les assemblée générales) serait aussi primordial. Il s’agit, ensuite, d’aller vers un recadrage et une réorientation des objectifs stratégiques autour des EPE, en tirant profit des avancées technologiques et en les adaptant aux évolutions que connaît chaque secteur. 
Dans un second temps, une fois la situation assainie selon les standards de la bonne gouvernance, il devient nécessaire de procéder à l’ouverture du capital de ces entreprises au moyen d’une introduction en Bourse ou bien à travers des partenariats. 
 
Lors du dernier Conseil des ministres, le président Tebboune a instruit le gouvernement d'accélérer l'opération de recensement définitif des différents biens confisqués, en vue de les transférer à l'État et les intégrer dans le processus de production nationale, avant la fin du premier trimestre 2022. Selon vous, des préalables comptables et organisationnels sont-ils nécessaires pour que cette reprise par l'État des entreprises "confisquées" ne soit pas un autre fardeau pour le Trésor public ?

Bien évidemment, il doit y avoir un grand travail d’audit et d’évaluation des actifs de chaque entreprise. 
Le traitement doit se faire au cas par cas, avec des projections et des études prospectives approfondies. Il n’est pas question de sauvegarder des entreprises dont la survie serait assurée par l’injection de fonds publics ou autres aides. La viabilité et l’utilité pour l’économie nationale de ces entreprises doivent être considérées en priorité. 
Les entreprises ayant des outils de production performants et pouvant créer de la valeur ajoutée seront, bien évidemment, préservées et même développées à travers un management adapté. 
Pour le reste, il doit y avoir des formules appropriées pour que l’État puisse tirer profit de ces entreprises et récupérer ainsi le préjudice causé au Trésor public.  

 

Propos recueillis : Ali Titouche

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