L’Actualité RENTRÉE DES CLASSES AUJOURD’HUI POUR PLUS DE 10 MILLIONS D’ÉLÈVES

Une école à reclasser

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Karim BENAMAR Publié 21 Septembre 2021 à 00:29

© D. R.
© D. R.

Prisonnière d’une idéologie islamo-conservatrice, l’école algérienne peine à se mettre sur les rails du développement scientifique. Enjeu sociétal  majeur, cette  institution  doit  plus  que  jamais  opérer sa révolution copernicienne.

L’école algérienne  est  sinistrée  disait, en 1992, l’ancien président, Mohamed Boudiaf. Ce constat sans appel et lourd de sens demeure cruellement d’actualité, 30 ans après. Aujourd’hui, il est partagé par la quasi-totalité des acteurs intervenant dans le secteur de l’éducation. Tout le monde s’accorde à dire que l’école algérienne patauge dans la médiocrité et ne produit plus de sens, en tout cas pas à la hauteur des défis actuels et encore moins ceux de l’avenir. 

Cette institution, véritable baromètre de l’état de santé des sociétés, est confrontée à de multiples verrous qui empêchent sa libération et son accession à l’âge de la modernité. Aujourd’hui, plus de onze millions d’élèves, tous paliers confondus, retrouvent les bancs de l’école. Cette rentrée scolaire verra la réception de plusieurs nouvelles infrastructures dédiées au secteur.

De ce point de vue, si la bataille des infrastructures a été remportée - la scolarité étant assurée aux enfants des villages les plus reculés du pays -, au plan qualitatif, les résultats sont, en revanche, terriblement décevants. Prise en otage par les forces d’inertie et des idéologies rétrogrades, l’école algérienne est en totale décrépitude.

Elle a perdu ses repères, perdu ses ambitions et ignore scandaleusement la raison même de son existence : remporter la bataille des savoirs et rayonner sur la société. Mais voilà qu’elle peine à s’arracher aux mains des apprentis sorciers qui lui ont fait durement mal, en la déviant notamment de sa vocation historique, le plus souvent pour des considérations idéologiques. À chaque fois promise, pourtant, à un avenir meilleur par les dirigeants successifs à la tête du pays, elle est restée inerte, peu productive et loin des standards de compétitivité nécessaire pour l’émergence d’un système d’enseignement efficient. 

“L’école algérienne n’est pas tournée vers l’avenir, mais vers le passé. On ne cherche pas à former les citoyens équilibrés qui seront chargés de gérer et d’édifier l’Algérie de demain, interconnectée et interdépendante, mais on tient à continuer de former des cohortes de diplômés sans consistance réelle, sans compétences avérées et, surtout, sans ambitions”, assène le professeur en sciences du langage, Mohammed Fodil Sadek. (Lire entretien en page 2) Pour lui, le nœud gordien qu’il faut “trancher pour redonner de l’espoir à notre école est, à son avis, la nature idéologique de notre système éducatif”.

Inhibante, l’idéologie a pris le dessus sur l’école algérienne jusqu’à lui définir la marche à suivre sur les chemins contraires à l’épanouissement individuel, contraire à la construction du Moi et contraire à l’apprentissage de réfléchir par soi-même. Incapable de fournir un contenu en phase avec les besoins et les aspirations modernes, pauvre en matière de projection et inefficace en matière de formation des citoyens de demain, l’école semble ruminer donc ses échecs et est loin de parvenir à accomplir sa mission fondamentale, en l’occurrence l’édification d’une société moderne en phase avec l’âge de la raison.

“Il est important de rappeler que la bataille pour la qualité de l’enseignement n’est pas encore sérieusement posée, puisqu’elle est liée systémiquement à la problématique de la massification non contrôlée de l’école algérienne depuis les années 80 et la surpolitisation de cette dernière depuis les années 70”, analyse Karim Khaled, chercheur en sociologue de l’éducation.

Dans une contribution à Liberté (11 mai 2021), il rappelle, à juste titre, que “la vraie qualité de l’enseignement est liée au type de projet de société, issu d’un contrat ou d’un consensus sociétal autour du type d’école et de citoyens de demain. Le reste n’est que technique, facile à réaliser. Or, le consensus n’est pas encore établi pour des raisons historiques non élaborées, restées refoulées et transgénérationnelles”, écrit-il. Autant dire que tout reste encore à faire… 
 

Karim BENAMAR

 

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