Culture “Souvenirs d’enfance de la Guerre d’Algérie” de Mohammed Matmati

De la guerre d’indépendance au Hirak, l’Algérie à travers les décennies

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Yasmine AZZOUZ Publié 31 Mai 2021 à 22:12

© D. R.
© D. R.

L’auteur, qui  vient  de  publier  cet  ouvrage  aux  éditions  Campus ouvert, passe  en  revue  l’avant, pendant  et l’après-guerre, jusqu’à  l’Algérie d’aujourd’hui.

Ce sont les souvenirs d’une guerre douloureuse, faite de privations, de survie et d’espoir, qui sont relatés dans l’ouvrage que vient de publier Mohammed Matmati, professeur émérite de management, aux éditions Campus ouvert, en France. Dans Souvenirs d’enfance de la Guerre d’Algérie, c’est à partir de son enfance, vécue en Petite-Kabylie, que l’auteur passe en revue l’avant, pendant et l’après-guerre, jusqu’à l’Algérie d’aujourd’hui et le Hirak. Marqué par la période des années 1950-60, qui changera à jamais l’avenir du pays, tout comme le sien, Matmati replonge dans cette partie de l’histoire collective et ses répercussions sur chaque individu. 
Pour ce faire, les discussions familiales, où revenaient régulièrement les souvenirs de guerre, ont été d’un grand apport. “La brutalité de la guerre et son injustice m’ont ouvert les yeux sur les conditions de vie de ma communauté, à la veille de la guerre d’Algérie, dans le douar de la Petite-Kabylie où je suis né, conditions dignes du Moyen-Âge”, dit-il. Outre le déchirement de la guerre, le déracinement vers Constantine puis Annaba, le jeune Mohammed vit le changement rapide de son environnement social bouleverser tout ce qu’il avait connu jusque-là. 
Dès la fin de l’année 1955, “l’intensification de la guerre a eu pour effet le départ des populations de cette région, soit vers les villes, soit un peu plus tard, sur ordre de l’autorité militaire coloniale, vers les camps de regroupement”. Au fil des mois, “les incidents allaient se multiplier et leur gravité s’accroître”. C’est le début de l’insurrection. 
Non loin de son village, au lieudit Taboukar, un accrochage survient entre des combattants de l’ALN et un véhicule militaire de l’armée française. Peu après, c’est Oubrène qui est le spectacle d’un autre incident entre forces coloniales et combattants de l’ALN, puis les événements déterminants au niveau national : le détournement de l’avion des dirigeants du FLN, la grève générale de février 1957, le putsch des généraux en 1961… Au milieu de ces récits, Matmati restitue, tel un anthropologue, l’organisation sociale du village, le rôle assigné à chaque individu, les fêtes, les coutumes et les traditions célébrées. Les femmes sont le noyau de toute la hiérarchie sociale, certes patriarchale, mais dont le plus gros des tâches, travaux manuels, ne pourrait être accompli sans elles. 
À l’auteur ensuite de revenir sur le décret Crémieux et la machine coloniale qui bouleversera à jamais l’Algérie, notamment la cohabitation entre musulmans et juifs. En citant l’historien Benjamin Stora, il souligne les répercussions sur les deux communautés : “Par le décret Crémieux de 1870, leur donnant automatiquement la nationalité française, les juifs d’Algérie ont connu un premier exil, celui qui les a séparés des autres indigènes, les musulmans.” Pour Matmati, “il a introduit un facteur de discrimination et de division dans la population algérienne qui, depuis des siècles, vivait une diversité religieuse de façon harmonieuse”. Après l’indépendance, il reste comme un goût d’amertume chez l’auteur. Tous les sacrifices consentis ont débouché sur trois événements marquants pour l’auteur, que sont la crise politique de l’été 1962, la guerre des frontières entre l’Algérie et le Maroc et le coup d’État militaire de juin 1965. 
D’ailleurs, il estime que le Hirak serait la conséquence de ce “ratage” dans l’histoire. “Il est indéniable que des avancées majeures ont été réalisées (…) Il est indéniable aussi, comme le constatent les Algériens, qu’il est possible de faire beaucoup plus et beaucoup mieux.” 
 

Yasmine AZZOUZ
 
Souvenirs d’enfance de la Guerre d’Algérie,
une entrée douloureuse dans la modernité,
de Mohammed Matmati, éditions Campus ouvert. 183 pages. 2021.

 

 

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