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Joe Biden, entre saint Augustin de Souk Ahras et la poésie

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Amin ZAOUI Publié 28 Janvier 2021 à 00:09

© D. R.
© D. R.

En ce temps froid, humainement parlant, où le monde est envahi par cette pandémie, la poésie occupe le coin de la table, comme à l’accoutumée. Elle est oubliée ou presque, par les lecteurs comme par les éditeurs. La poésie, qui jadis faisait bouger les foules dans les rassemblements politiques, dans les marches, dans des soirées poétiques organisées dans des stades de foot, elle faisait aussi vibrer les amoureux dans leurs attentes ou dans leurs souffrances, aujourd’hui cette même poésie se trouve marginalisée, sans effet aucun ou presque. 
Mais avec l’investiture du 46e président des USA, Joe Biden, la poésie a fait parler d’elle. Dans le pays le plus fort du monde, la première puissance mondiale, on invite la poésie la plus faible pour insuffler l’espoir au citoyen américain et sauvegarder l’unité nationale menacée. Dans le pays qui possède un arsenal nucléaire inégalé, on invite la poésie, la créature la plus fragile, pour faire le dôme de fer contre toute attaque méchante qui menace le pays le plus puissant ! 
Dans cette investiture du 20 janvier, la poésie n’a pas occupé le coin de la table. Majestueusement, elle s’est exposée sur l’estrade la plus regardée, la plus suivie du monde. 
À l’heure où le monde de la culture et des arts, ainsi que celui de la politique, tourne le dos à la poésie, les USA, en crise politique et institutionnelle, se tournent vers la poésie. Font appel à la poésie pour sauver ce qui reste de ce grand pays, proie au chaos politique et organisationnel.
En invitant cette jeune poétesse à déclamer son poème, le jour de l’investiture de Joe Biden, loin de tout jugement esthétique et littéraire du texte, les Américains ont renoué avec le respect du mot, le respect au verbe littéraire. L’éthique du mot poétique. Cette présence de la poésie nous confirme que le discours politique ne suffit pas pour dire ce qu’il fallait dire ou tout ce qu’il devrait être dit. Nous les gens de la poésie, les arrière-petits-enfants et les enfants des poètes Si Mohand u Mhand, Kateb Yacine, Aït Menguellet, Moufdi Zakariya, Jean Amrouche, Jean Sénac, Bachir Hadj Ali… sommes appelés à revoir notre relation avec la poésie. Inviter la poésie dans notre vie.  
Les Arabes se voyaient la nation de la poésie par excellence. Pour eux, la poésie représente leur livre majeur. Ils se détachent de plus en plus de la poésie. Ils ne lisent plus, avec la même force et le même amour, leurs poètes. Ils ont oublié ou presque Imrou’l Qays, Jarir, Bachar Ibn Burd, Al-Niffari, el Halladj, el Mutanabbi... 
La présence de la poésie à l’investiture du 46e président américain va-t-elle changer la place de la poésie dans le monde ? 
Espérons-le !  
Et à cette même occasion, c’est-à-dire l’investiture du 46e président des USA, Joe Biden, le nouveau locataire de la Maison-Blanche, dans son premier discours à la nation et bien sûr à toute la planète, a cité le nom de l’un de nos ancêtres, oublié par nous, ses arrière-arrière-petits-fils : saint Augustin, l’auteur des Confessions et de La Cité de Dieu.
Si le président du pays le plus puissant du monde a trouvé dans les idées philosophiques du fils de Thagaste (Souk Ahras) saint Augustin un havre de paix et de réconciliation, de l’autre côté, les arrière-arrière-petits-fils de saint Augustin ont banni sa présence et ses écrits de nos manuels scolaires, de nos programmes télévisuels, de nos débats philosophiques ou religieux. En se référant aux réflexions humanistes de saint Augustin qui sont toujours d’actualité philosophique et politique, le président des USA nous invite, indirectement nous Algériens d’abord, à une réconciliation organique avec notre histoire, avec notre mémoire. L’Algérie est fière, est grande par ses enfants, à l’image de saint Augustin, d’Apulée, de Juba II, de Kahina (Dyhia), de Jugurtha et des autres, ceux qui ont marqué la pensée universelle philosophique, littéraire et religieuse. 
Certes, Souk Ahras est fière aujourd’hui, en se rendant compte que les idées de l’un de ses enfants, saint Augustin, continuent à voyager dans le monde des puissants, à fasciner les décideurs universels. 
Nous sommes les victimes d’une mémoire sélective. Nous avons amputé notre Histoire. Et sans une réconciliation totale et courageuse avec notre passé, nous demeurons la proie éternelle de ce trouble d’identité chronique.  
 

A. Z.
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