Culture Abdelmoaiz Farhi, auteur

“L’écriture pour moi est plus qu’une passion, c’est un besoin”

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Hana MENASRIA Publié 07 Juin 2021 à 08:45

© D.R
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Liberté : Après votre premier roman À 19 heures mon amour, vous changez de registre avec Fayla, une histoire d’épouvante qui se déroule à Constantine. De quelle manière êtes-vous passé de l’amour à l’horreur ? 

Abdelmoaiz Farhi :  Je suis une personne qui adore les sensations fortes, l’extase, l’euphorie, l’angoisse… Tout cela me passionne et je pense que, tout comme l’amour, la peur est une sensation forte. On peut dire aussi que c’est une sorte de défi personnel. Je voulais m’aventurer dans ce domaine-là ; il faut dire qu’il n’est pas fameux en Algérie. Notre belle littérature mérite une certaine diversité. Je peux vous citer encore plusieurs raisons pour ce changement de registre mais, honnêtement, À 19 heures mon amour et Fayla sont des histoires que j’aime lire, et je ne peux proposer à mes lecteurs un livre qui ne m’intéresse pas moi-même. 

Est-ce facile d’aborder ce genre de thématique en littérature : pouvoir provoquer une sensation de peur et d’angoisse à vos lecteurs ? 

Pas du tout, c’est beaucoup plus simple et facile de faire rêver que de faire peur, et récemment j’ai appris que faire rire est encore plus difficile. Je ne saurais l’expliquer, mais personnellement j’ai eu plus de difficulté avec le second qu’avec le premier. J’écrivais avec une certaine appréhension jusqu’à ce que moi-même ai eu des frissons dans quelques passages. J’ai su que le livre pourra faire peur à quelques âmes sensibles.

Stephen King est très présent dans votre livre. Avez-vous été en quelque sorte influencé ou inspiré par ses œuvres ? 

Stephen King est le maître absolu dans ce genre-là. J’ai lu plusieurs de ses œuvres avant l’écriture de Fayla et bizarrement je lisais en tant qu’auteur, pas en tant que lecteur. Je me disais si c’est faisable ou non. Je ne prétends en aucun cas que Fayla fait aussi peur que Shining ou Misery, mais c’est un roman d’épouvante, le premier en Algérie, c’est déjà ça. Cela dit, il n’y a pas que King qui m’a influencé, il y a aussi les textes de HP Lovecraft et de Maxime Chattam, ou encore ceux d’Edgar Poe. Cette littérature est riche et passionnante. Elle mérite que nos talentueux écrivains s’intéressent à elle. 

Fayla revient de l’au-delà pour se venger d’un groupe d’adolescents. Alors que ces jeunes n’ont aucun lien direct avec la revenante. Pensez-vous que le passé finit toujours par nous rattraper ? 

Je ne l’espère pas, mais je pense qu’ignorer le passé n’est pas une mince affaire ; il finit par revenir, tôt ou tard, et là un choix s’impose, faut-il se venger ou pardonner ? 
Pour Fayla, la revenante torture la progéniture de ceux qui lui ont rendu la vie pénible. Pourquoi Fayla se venge des enfants et non pas directement des parents ? Ça, c’est dans le roman ! 

Le désir de vengeance est au cœur de votre roman. Mais Fayla s’achève sur une belle leçon humaine…

Le pouvoir du pardon ! L’amour d’une mère, le sacrifice pour les autres ! 
C’est vrai, vu comme cela, il est plutôt un roman moraliste (rire). 

Avant que leur vie ne soit chamboulée par cet esprit vengeur, la seule préoccupation de vos personnages est de réussir au bac. D’une manière inconsciente ou intentionnelle, cela vous a-t-il permis d’extérioriser vos craintes ?

J’ai aujourd’hui 20 ans et l’année la plus angoissante de ma vie jusqu’à présent, c’est l’année du bac. J’ai commencé l’écriture de Fayla le dernier jour des épreuves du bac. Je l’ai écrit avec une certaine fièvre, vu que je n’avais pas droit à la littérature pendant plusieurs mois. Cela m’a permis d’en finir une bonne fois pour toutes avec ce satané bac.

Dans votre roman, nous retrouvons un langage plus “jeune”, celui notamment des réseaux sociaux, sms... 

Je ne pouvais pas ignorer ce langage, vu que mes personnages sont des adolescents, de cette époque. Il s’est imposé par lui-même. J’espère bien qu’il pourra attirer plus de jeunes à la lecture. Mon fantasme absolu consiste à rajeunir le lectorat algérien et à sauver le livre en Algérie.

Vous avez été publié pour la première fois à l’âge de 17 ans. Comment êtes-vous tombé dans l’écriture ? 

Après plusieurs lectures, dès l’enfance, ensuite j’ai commencé avec des petites histoires à 13 ans, que je publiais à l’époque dans les réseaux sociaux. J’ai été encouragé par ma famille et mes amis. À 16 ans je me suis lancé dans l’écriture d’un roman. Un roman que je voulais moi-même lire, un roman que je n’avais nullement l’intention de publier. Une fois l’histoire achevée, je me suis rappelé la chanson de Jacques Brel Ces gens-là, quand il chante : “Et si ce n’est pas sûr, c’est quand-même peut-être.” J’ai dit peut-être, Casbah Édition a dit “sûr”. Et nous voilà aujourd’hui ! Et nous nous retrouverons probablement prochainement car l’écriture pour moi est plus qu’une passion, c’est un besoin !

 

 

Entretien réalisé par : Hana Menasria

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