Des Gens et des Faits 69e partie

L’ éternelle blessure

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Taos M’HAND Publié 05 Mars 2021 à 19:13

Résumé :   Anissa garde ses bébés près d’elle. Quand elle parle de travailler, sa belle-mère tente de la dissuader, l’établissement le plus proche est à 10 km. Dans leur famille, les femmes ne travaillent pas. Elle craint aussi pour sa vie. Fathma lui demande de penser à ses enfants. Anissa n’est pas prête de renoncer à ses projets. Quand ses bébés ne dorment pas, elle leur en parle. Un matin, elle rêve de Nedjmeddine.   

“Avance dans la vie ! N’aie pas peur, je serais toujours là pour vous protéger, promet Nedjmeddine, toujours aussi beau, le regard brillant, passant une main sur la tête de leurs enfants. Je suis fier de toi, bats-toi. Il est temps que les choses changent au village. Rappelle à Mahmoud, Zoubida et Naïm combien je les aime”.
Le grondement d’un tonnerre au loin la tire de son rêve. Les éclairs finissent par la réveiller. Le cœur serré, elle referme les yeux comme pour rattraper l’image de Nedjmeddine. Elle voudrait se rendormir et replonger dans son rêve. Mais l’orage éclate et la force à accepter qu’elle est bel et bien réveillée, Anissa frissonne, elle se redresse sur le lit et se couvre jusqu’au cou. Elle se demande de qui Nedjmeddine voulait parler. “Qui est Naïm ?”
Elle ne connaît personne qui porte ce prénom. 
“Ce n’était qu’un rêve”, se dit-elle, tentant de se convaincre qu’il n’y a aucune signification à en tirer, mais elle ne cesse d’y penser. Quand elle en parle à sa belle-mère et sa belle-sœur Lila, celles-ci fondent en larmes.
-Tu as eu la chance de le voir. Moi, je n’ai même pas pu le voir depuis des semaines. Comment était-il ? 
-Tu ne me croirais pas si je te disais qu’il avait l’air en forme et surtout heureux. Il m’a demandé de prendre soin des enfants et surtout de Naïm. Je ne connais pas de Naïm dans la famille, et vous ?
-Non, non, ma fille… Et si ? Est-ce que tu es enceinte ? 
La jeune femme secoue lentement la tête, tout en s’interrogeant. Elle a pris un contraceptif. 
-Ce n’est pas possible.
-Ce serait un miracle, dit Fathma. Khela lek amana, il t’a confié une nouvelle vie. Tu verras. Tu vas avoir un fils. Mon fils, Allah yerehmou, lui a déjà donné un prénom. Nous l’appellerons Naïm.
Anissa n’a pas le temps d’y penser. Ils ont de la visite. Une personne qu’elle n’attendait plus. Elle lui tombe dans les bras dès qu’il franchit la porte de la cour.
-Mon oncle ! Comme tu m’as manqué. C’est si bon de te voir. 
-À nous aussi, tu nous manques. Je suis venu pour t’informer que tu pourras bien travailler, dans quelques jours. J’ai confié ton dossier au niveau de la wilaya pour que vous bénéficiez  d’un logement social. Les familles de victimes du terrorisme peuvent en obtenir quand ils en font la demande.
-Oh ! C’est magnifique, nous partirons d’ici. Je te serais reconnaissante toute ma vie. Je savais que je pouvais compter sur toi.
-Prépare-toi, je veux t’accompagner à l’académie.
-Donne-moi quelques minutes. 
Anissa se presse d’aller à sa chambre. Sa belle-mère l’y suit. 
-Ma fille, profites-en pour aller voir un médecin, lui dit-elle. Je crois que ton rêve est annonciateur de plein de bonnes choses.
-Je le pensais. Dommage que Nedjmeddine ne soit pas là. Je compte sur toi pour prendre soin de Mahmoud et Zoubida. Nous ne tarderaons pas.
-Va en paix ! 
Anissa finit de se préparer et prend son sac à main. Quand elle sort de la chambre, elle tombe sur son beau-père en pleine discussion avec son oncle. 
-Si elle se met à travailler, comment elle fera pour se déplacer ? Je ne suis pas véhiculé et quand bien même je le serais, je ne vais pas passer mes journées à aller et venir.
-Il doit bien y avoir quelqu’un de confiance, avec qui elle peut se rendre au village. Elle ne peut pas devenir femme au foyer maintenant qu’elle est veuve. Je l’ai instruite et fait d’elle une femme responsable. Ses bébés vont vite grandir, ils auront d’autres besoins. Elle peut tout assumer.
-Nous serons là pour eux, affirme Brahem. 
-J’ai fait des centaines de kilomètres pour l’aider. La vie sera plus facile si vous y œuvrez aussi, conseille l’oncle Hamid, très remonté, en prenant le bras d’Anissa. Sinon je les emmène chez moi.

(À SUIVRE)
 T. M.
[email protected]
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