Des Gens et des Faits 7e partie

MERIEM

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Yasmina HANANE Publié 23 Juin 2021 à 09:03

Résumé : La djemaâ tranche en faveur de Amar qui a pu récupérer ses biens et la maison ancestrale. Grâce au rendement de ses terres, il pourra effectuer les travaux requis pour emménager chez lui. Un jour, alors qu’il sirotait un café, le vieux Aïssa lui rend visite. Il avait visiblement quelque chose d’important à lui annoncer.

La vieil homme reprend son souffle avant de répondre.
-Comme tu le dis, c’est un bon vent qui m’amène. 
Amar se lève pour aller chercher une natte qu’il étale à même le sol dans la courette.
-Prends d’abord le temps de te reposer, Ammi Aïssa, je vais te préparer un bon café.
Le vieux Aïssa hoche la tête.
-Je le veux bien fort et sans sucre.
-Ainsi soit-il. 
Amar revint au bout de quelques minutes, une tasse de café fumante dans sa main. Il tendit le breuvage au vieil homme et vint s’asseoir à ses côtés.
-Comment vas-tu, Ammi Aïssa ? Tu me sembles fatigué . 
-Je le suis, mon fils. Je suis fatigué par le poids de mon âge. N’oublie pas que je n’ai plus ni ma jeunesse ni ma santé.
-Que Dieu te préserve de tous les maux et t’accorde une longue vie.
-Dieu est clément avec ses êtres, c’est plutôt ces derniers qui ne le sont pas entre eux.
Amar fronce les sourcils. Son ami avait-il des ennuis ?
-Que se passe t-il ? Quelqu’un te veut du mal ?
Le vieil homme hoche la tête.
-Oui. Et je dirais même qu’il s’agit de plusieurs personnes.
-Comment se fait-il ? Tu n’avais aucun ennemi au village, et les gens te respectent pour ta sagacité et ta célérité à régler leurs difficultés.
-Oui. Mais parfois, c’est justement la réussite qui suscite des jalousies. Tu sais, mon fils, quand tu es jeune et fort, tu n’as besoin de personne. Tu comptes sur toi-même pour faire ce qui te plaît et te convient. Cela peut durer une vie entière si ta santé ne te lâche pas. Les gens n’oseront pas t’approcher ni te provoquer, car tu sauras les châtier et les repousser. Tu susciteras la crainte et le respect et tu mettras une barrière entre toi et les indésirables. Mais une fois que la jeunesse est partie, les loups sortiront de leur tanière pour rôder autour de toi et régler leurs comptes. D’anciennes affaires oubliées et enterrées remonteront. D’aucuns chercheront à t’intimider par des menaces ou des chantages. Si tu gardes ta santé, tu arriveras à défier leurs vices et leurs mauvaises intentions. Cela pourra les éloigner pour quelque temps. Mais ce n’est que partie remise. Avec le temps, d’autres “affaires scabreuses” ressurgiront. Les uns attendent le moment propice pour t’attaquer, les autres te provoqueront pour te saper le moral. Vois-tu, mon fils, la jeunesse n’est pas éternelle, la santé non plus. C’est lorsque nous ne possédons plus ces deux amies que nous devenons fragiles et exposés à tous les dangers. 
Amar, qui avait écouté le vieux Aïssa jusqu’au bout sans l’interrompre, est surpris par ces paroles qui en somme cachaient quelque chose de bien grave. Aïssa était le responsable de la djemaâ et personne ne pouvait lui tenir tête. D’ailleurs, il n’avait été élu à une telle position que parce qu’il était quelqu’un de juste, de brave et d’honnête. Personne au village ne trouvait à redire sur son comportement, sa générosité et son savoir-faire. 
Le vieil homme termine son breuvage et dépose sa tasse avant de s’essuyer les lèvres du revers de son burnous.
-Amar, mon fils. Toi seul pourra m’aider. 
-Je suis à ton entière disposition, Ammi Aïssa. Où voulais-tu donc en venir avec ton exposé sur les humains et leurs élans dévastateurs ?
-Je vais te raconter quelque chose. Un secret que j’ai gardé au fond de mon cœur depuis mon jeune âge. 
-Un secret ?
-Oui. Un grand secret. 
Il se tut, prit un mouchoir et essuya la sueur qui perlait sur son front.
Il poussa un long soupire, avant de poursuivre.
- Je suis stérile.  

 


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