Des Gens et des Faits 15e partie

MERIEM

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Yasmina HANANE Publié 02 Juillet 2021 à 20:06

Résumé : Après la mort de Kaci, Aïssa et Tassadit gardèrent définitivement les enfants. Pour effacer le passé, Aïssa rentre dans son village. Désormais personne ne pourra l’accuser d’être stérile. Mais ne voilà-t-il pas qu’un jeune du village s’intéresse à Aïcha, et le père de ce dernier connaît tout du passé de Kaci et Hemama.

Amar fronce les sourcils. 
-Je ne te suis plus. Si je l’ai bien compris, hormis toi et Na Tassadit, et maintenant moi, personne d’’autre n’est au courant de ce secret. 
-C’est le cas. Je parlais des gens de notre village. 
Le vieil homme se tut puis poursuivit en soupirant : 
-Il se trouve que Mohand, le père de Hamid, qui a trimé toute sa vie en France, a connu Kaci et Hemama. C’est quelqu’un qui connaît tout leur passé. Il est rentré définitivement au bled depuis une dizaine d’années. Jusqu'à ce jour, il m’a toujours respecté et n’a jamais fait référence au passé. Mais depuis que son fils s’intéresse à ma fille, il a insinué à maintes reprises que je devrais m’estimer heureux qu’une famille telle que la sienne accepte d’unir le destin de son fils à celui d’une fille sans racines. J’ai alors compris qu’il était au courant de toute l’histoire et risque de me ridiculiser devant tout le village et de détruire mon foyer et l’avenir de mes enfants. Voilà pourquoi je suis venu te trouver, Amar.
-Et que veux-tu que je fasse ?
-Je ne sais pas au juste, mais j’aimerais que... Je vais t’avouer quelque chose. C’est de toi que ma fille Aïcha est amoureuse, et je sais qu’elle ne t’es pas indifférente. 
Amar rougit. Son cœur se mit à palpiter. Il prend une lente inspiration avant de répondre : 
- Aïcha est une fille bien comme il le faut. Heureux celui qui la prendra pour épouse. Mais comment pouvais-tu savoir qu’elle était amoureuse de moi ?
Le vieil homme sourit de toutes ses gencives. 
-On n’apprend pas à un vieux renard comme moi à reconnaître les symptômes de l’amour. Aïcha est autant folle de toi que tu l’es d’elle. J’ai à maintes reprises surpris vos regards langoureux, et j’ai attendu que tu fasses le grand pas, mais tu ne l’as pas fait. Tant pis pour les convenances. Moi, c’est le bonheur de ma fille qui m’importe. Le reste ne m’intéresse pas.
Amar se leva et se mit à arpenter la courette. Il regarda le vieux Aïssa qui, visiblement, attendait une réponse immédiate. 
-Je ne laisserai aucun homme s’approcher de Aïcha. C’est elle que je j’aimerais avoir à mes côtés pour le restant de mes jours. Je ne voulais pas précipiter les choses en demandant sa main, avant d’avoir préparé le terrain. J’ai mis du temps pour récupérer mes biens et retaper la maison de mes ancêtres. Comprends-moi donc Ammi Aïssa. Ta fille Aïcha a toujours vécu dans l’opulence, je ne voulais pas l’épouser avant d’avoir assuré son confort. 
-Et maintenant que tes terres te donnent de belles récoltes et que ta maison est devenue l’une des plus belles du village, qu’attends-tu ?
-Une simple occasion. Une occasion propice pour faire ma demande dans les normes de nos mœurs et coutumes. 
-Et voilà que je viens vers toi en piétinant mœurs et coutumes. 
-Ma foi, j’aurais fait la même chose à ta place. Le temps urge. Je suis certain que Hamid attend une réponse dans les jours à venir.
-Nous y voilà ! Et comme je ne veux que votre bonheur à toi et à ma fille, j’ai préféré venir t’en parler.
-Tu as bien fait, Ammi Aïssa. 
Il se rassit devant le vieil homme et lança d’une voix nouée par l’émotion. 
-Ammi Aïssa, veux-tu m’accorder la main de ton honorable fille Aïcha ? 
Ému, le vieil homme demeura silencieux quelques secondes, avant d’essuyer les larmes qui ruisselaient sur son visage buriné. Il prit les deux mains de Amar et les serra dans les siennes. 
-Je ne trouverai jamais un gendre qui méritera Aïcha autant que toi. Dommage que je ne sache pas pousser de youyous, car ce soir, tout le village m’aurait entendu. 
-Et si jamais le père de Hamid vendait la mèche ?
-Je ne pense pas qu’il le fera. Car au fond, il ne voulait pas de cette union avec sa famille. Il est trop snob. Je pense qu’il sera plutôt heureux d’en finir avec cette affaire. 
Le mariage eut lieu quelques semaines plus tard, en grande pompe. Amar et Aïcha s’unirent pour le meilleur et pour le pire. Une année plus tard, ils seront comblés par la venue d’une jolie fille, qu’ils prénommèrent Meriem. Le bonheur régna durant quelques années sur la famille.

 


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