Des Gens et des Faits 26e partie

MERIEM

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Yasmina HANANE Publié 14 Juillet 2021 à 20:20

Résumé : Houria voulait changer de look. Pour cela, elle s’est rendue dans un salon de coiffure et en est sortie totalement métamorphosée. Mais pas à son avantage. Son employeuse la licencie, et Amar est horrifié par son aspect. Attirée par leurs cris, une voisine accourt aux nouvelles.

Il allait refermer la porte lorsqu’elle le repousse pour s’introduire dans l’appartement. Elle demeure un instant interdite à la vue de Houria, puis éclate de rire;
- Dans mon bled, il y a un adage qui dit qu’un crapaud qui voulait ressembler à un bœuf avait tellement enflé qu’il avait fini par exploser. Qu’est-ce que c’est que ce barbouillage sur ton visage Houria ? Tu es une belle femme et tu n’as pas besoin de tous ces artifices. Et où sont donc passés tes beaux cheveux ? 
Amar repousse la voisine vers la porte.
- Tu es venue demander du sel, tiens, en voici  tout un paquet. Bonne 
soirée.
La voisine fait les yeux ronds.
- J’ai cru que vous n’en aviez pas.
- Finalement nous en avions. C’est tout ce que tu voulais, n’est-ce pas ?
- Heu... Oui. Qu’arrive-t-il à ton 
épouse ?
Amar ouvre toute grande la porte d’entrée.
- Bonne soirée, chère voisine, et ne t’avise pas de revenir chez moi de sitôt.
Il referme la porte derrière elle avec fracas et revient vers Houria qui n’avait pas desserré les dents. 
- Voilà où nous en sommes arrivés par ton comportement.
Elle lui lance un regard plein de haine.
- Mon comportement ! Reproche-toi plutôt le tien. 
- Je suis ton mari. Je ne veux pas te voir devenir la risée du quartier. Va vite te laver le visage et trouve le moyen de te débarrasser de cette affreuse couleur sur tes cheveux. Je ne le répèterai pas une troisième fois.
Meriem, toute tremblante, tente de mettre sa petite menotte dans la main de son père. Il se rend compte alors de la présence de ses enfants autour d’eux. Ghania suçait son doigt, et Melaaz criait dans son berceau.
- C’est-ce que tu voulais ? lance Houria en tendant son index vers les filles. Elle allait poursuivre, mais s’arrête nette. Une autre gifle venait de l’atteindre et de l’envoyer à l’autre bout du salon. Le cri qu’elle voulait pousser est vite refoulé. Amar est revenu de la cuisine avec un couteau et menace de l’égorger.
- Si jamais tu continues à n’en faire qu’à ta guise, je jure que je te tuerai et boirai ton sang jusqu’à la dernière goutte. Tu m’entends ?
Elle met une main devant son visage pour se protéger et demeure prostrée sur elle-même. Amar prend les filles dans la cuisine. Il réchauffe le dîner et sert Meriem, avant de préparer une soupe à base de farine de blé pour Ghania. On n’entendait plus les pleurs de Melaaz, qui devait dormir. Houria se relève enfin et se dirige vers la salle de bains. Elle en ressortira une heure plus tard, le visage lavée de tout artifice et sa tête cachée sous un foulard.
Amar, qui avait mis Meriem et Ghania au lit, est resté au salon. Il fume une cigarette et sirote un café. Sa tête menace d’exploser. Il se lève et va chercher un comprimé d’asprine dans la salle de bains. Une surprise l’attend : les cheveux décolorés de sa femme jonchent le sol. Elle venait de se raser le crâne !
Le spectacle est tellement inattendu qu’il ne sait plus s’il doit en rire ou en pleurer. Pauvre de moi, se dit-il, je n’ai pas fini de découvrir cette sorcière qui est ma propre épouse.
Depuis ce jour, Houria revient à de meilleurs sentiments envers son mari et la petite Meriem. Cette dernière, une enfant très douée à l’école et d’un tempérament très calme, tente de retrouver un semblant d’équilibre entre son père et sa marâtre. Cependant, Amar n’est pas dupe. Il sent que Houria ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Elle doit cacher d’autres desseins, et un jour d’autres surprises surgiront. 
En effet, Houria, qui sort quotidiennement avec la petite Melaaz, se met à la recherche d’un nouveau travail. Elle a pris goût à la liberté financière qu’elle ne connaissait pas et ne peut plus se contenter des quelques pièces qu’Amar lui remet pour faire les menues courses quotidiennes. Cette fois-ci, elle est embauchée dans un restaurant. Chaque après-midi, elle doit s’y rendre pour faire la vaisselle, laver le sol et dresser les tables dans les deux grandes salles à manger pour le dîner.
L’horaire et les honoraires l’arrangent. Melaaz faisant sa sieste dans son landau, elle est libre de disposer des heures qui lui restent avant le prochain biberon. 
À la fin de la journée, elle repart chez elle, parfois avec quelques restes du déjeuner, qu’elle emporte dans un panier, et aussi sa rémunération 
quotidienne.

 


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