Économie Khaled Boukhelifa, expert en énergie

“Il existe encore des incertitudes sur les marchés”

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Youcef SALAMI Publié 09 Février 2021 à 09:06

© D.R
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Liberté : Les marchés pétroliers ont repris des couleurs, le baril ayant franchi la barre symbolique des 60 dollars. S’agit-il d’une tendance durable à la hausse ?

Khaled Boukhelifa : Un baril à 60 dollars, et les pays Opep et non-Opep s’en accommodent dans le contexte actuel. Ce résultat, inespéré, n’aurait sans doute pas été possible, si l’Opep et ses partenaires n’avaient pas observé une discipline stricte en matière de respect de l’accord de limitation de la production qu’ils ont signé. Maintenant, est-ce que cette reprise des prix va continuer ? Compte tenu des incertitudes entourant les marchés et les perspectives économiques mondiales, je pense qu’il faut être prudent quand il s’agit de parler de prix du pétrole. On ne peut pas savoir si cette tendance à la hausse se poursuivra ou pas. Les cours du pétrole dépendent d’un ensemble de facteurs complexes liés aux contextes économique, sanitaire, géopolitique, ainsi qu’à d’autres facteurs qui influencent les marchés. 

Beaucoup de pays de l’OCDE ont privilégié l’économie sur le sanitaire, en établissant une série de mesures devant permettre de faire redémarrer la machine économique. Cela est de nature à améliorer la demande de pétrole dans le monde et, partant, à tirer vers le haut les cours du brut. Qu’en pensez-vous ?

Ce ne sont pas tous les pays qui ont adopté cette approche. Il est vrai que plusieurs pays ont mis au point des plans de relance économique tout en ayant l’œil sur l’évolution de la pandémie de coronavirus. Cela devrait permettre à l’économie de se rétablir de la plus grave récession mondiale, une conséquence de la crise sanitaire. Il faut, toutefois, attendre un certain temps avant que l’effet escompté se manifeste, c’est-à-dire avant que les mesures de relance prises fassent sentir leurs effets et que des résultats soient obtenus. Mais dans l’immédiat, les perspectives économiques à court terme sont difficiles à prédire. À mon sens, il faut du temps pour remettre en marche l’économie mondiale, stimuler la demande de pétrole et restaurer la confiance des marchés pétroliers.    

Du côté de l’offre, l’Opep et ses alliés semblent avoir fait le nécessaire pour contenir la crise, en fermant les vannes, dans un contexte où la demande était au plus bas… 

Il n’y a d’autre choix que d’agir sur l’offre. L’Opep et ses partenaires ont réussi à maintenir une certaine cohésion au sein de l’alliance, en faisant respecter les termes de l’accord de baisse de production. Il existe, certes, des pays qui n’ont pas respecté leurs engagements. Mais ils se sont engagés à compenser les volumes surproduits. Cela ne signifie pas nécessairement que tout baigne dans l’huile. Et on observe de temps en temps des dissonances dans le groupe. En décembre 2020, l’alliance s’était accordée sur le fait de tenir chaque mois une réunion à partir de janvier 2021 dans l’objectif d’évaluer les conditions de marché et de décider des futurs ajustements de production pour le mois suivant — les ajustements mensuels de la production ne devant pas dépasser 0,5 Mb/j. Or, l’Opep et ses alliés ont décidé de ne pas se réunir en févier. Ils se sont donné rendez-vous pour mars prochain. Par ailleurs, lors d’une réunion tenue début janvier, les partenaires s’étaient entendus pour autoriser la Russie et le Kazakhstan à légèrement augmenter leur production de brut au cours du premier trimestre, une surproduction destinée au marché intérieur. Enfin, l’Arabie saoudite qui décide de réduire, de manière volontaire, sa production d’un million de barils par jour. Il s’agit là de décisions prises en dehors de l’accord de limitation de la production.   

La Libye et l’Iran, deux pays exemptés des quotas de production (au même titre que le Venezuela), aspirent à augmenter leurs productions respectives, ce qui est légitime.  S’ils arrivent à le faire, cela ne risque-t-il pas de perturber les marchés ? 

Au terme d’une semaine de discussions organisée sous l’égide des Nations unies en Suisse, Abdul Hamid Dbeibah a été désigné Premier ministre transitoire. Aux côtés de trois membres formant un Conseil présidentiel, il devra reconstruire politiquement la Libye. Si la stabilité est rétablie dans le pays, cela devrait permettre à la production pétrolière de se développer davantage. Mais il faut du temps pour que la Libye puisse faire fonctionner à plein régime son industrie pétrolière. Quant à l’Iran, il pourrait revenir aux engagements inscrits dans l’accord nucléaire, si l’Administration américaine levait les sanctions qui frappent son pétrole. Si un rapprochement entre les deux pays est effectué, Téhéran reprendra ses exportations pétrolières en les augmentant autant que possible. Dans le très court terme, le pays ne pourra, cependant, pas revenir au niveau de production antérieur à l’instauration des sanctions.

 

Propos recueillis par : Youcef Salami 

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