Magazine Figure majeure de la société civile turque

Osman Kavala, le trublion mécène

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AFP Publié 09 Octobre 2021 à 19:46

© D. R.
© D. R.

L’homme d’affaires et philanthrope Osman Kavala, une figure majeure de la société civile turque que le président Recep Tayyip Erdogan accuse de chercher à déstabiliser la Turquie, est un éditeur ambitieux, prompt à s’emparer des sujets les plus clivants. 

Ce mécène turc, qui s’apprête à entamer sa cinquième année de détention sans jamais avoir été condamné, est incarcéré depuis octobre 2017, en dépit de nombreux appels en faveur de sa libération. 

Il était initialement poursuivi pour avoir soutenu en 2013 des manifestations antigouvernementales connues sous le nom de mouvement de Gezi, ayant visé M. Erdogan, alors Premier ministre. Mais depuis, les charges – “fantaisistes”, selon lui – se sont accumulées, dont celles de tentative de coup d’État et d’espionnage. 

Son incarcération a fait de lui un des symboles de la répression contre la société civile en Turquie, en particulier depuis le putsch manqué de 2016, suivi de purges massives. 

Au fil des ans, la presse turque loyale au gouvernement l’a surnommé “le milliardaire rouge”, le comparant au richissime homme d’affaires américain d’origine hongroise George Soros, la bête noire de plusieurs dirigeants de régimes autoritaires dans le monde. 

Le président Erdogan lui-même l’a plusieurs fois accusé d’être “le représentant en Turquie” de Soros et de “financer les terroristes”. 
Son avocat, Ilkan Koyuncu, assurait quant à lui en 2020 qu’“aucune preuve” n’existait contre son client, connu pour son soutien aux projets culturels portant notamment sur les droits des minorités, la question kurde et la réconciliation arméno-turque. 

Né en 1957 à Paris, Osman Kavala a fait des études d’économie à l’Université de Manchester, au Royaume-Uni, avant de prendre la tête de l’entreprise familiale à la mort de son père en 1982. 
 
Débattre des sujets difficiles 
Mais il s’est progressivement consacré à l’édition, à l’art et à la culture, inaugurant en 1982 la maison d’édition Iletisim, devenue l’une des plus prestigieuses de Turquie, consacrée aux ouvrages sur la démocratisation de ce pays. 

Permettre à la société turque de débattre des sujets difficiles, dont le génocide arménien, par le biais des projets culturels, sera encore une des missions d’Anadolu Kültür, une fondation qu’il a créée en 2002. 

Humble, mais têtu ; courtois, mais direct ; directif, mais jamais condescendant : ainsi le décrit son entourage. Pour accueillir les expositions, Osman Kavala a transformé un ancien dépôt de tabac dont il avait hérité en centre culturel, aujourd’hui appelé Depo. 

“Je ne l’ai jamais vu rejeter quiconque qui venait avec une idée intéressante, qu’il s’agisse d’un projet littéraire ou cinématographique”, raconte Asena Günal, la directrice d’Anadolu Kültür. 

Malgré son acquittement en février 2020 pour les manifestations de Gezi, il avait immédiatement – le lendemain – été placé en garde à vue dans le cadre d’une autre enquête liée à la tentative de coup d’État de juillet 2016. 
La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a réclamé sa 
libération. En vain. 

“Prolonger ma détention sur des bases aussi fragiles équivaut à une exécution extrajudiciaire”, a-t-il estimé vendredi dans un communiqué, dénonçant des “déclarations qui défient la raison et la logique”. M. Kavala doit comparaître de nouveau le 26 novembre. 

“Osman a toujours su apprécier la valeur des initiatives civiles pour 
le bien commun”, affirme Emma Sinclair-Webb, de l’ONG Human Rights Watch. “Il est la dernière personne qui pourrait soutenir un coup d’État. C’est révoltant de le voir pris pour cible dans un jeu politique incompréhensible.” 

Les États-Unis ont par le passé appelé Ankara à “respecter ses propres engagements en faveur de la justice et de l’État de droit et à remettre Osman Kavala en liberté, tout en assurant un règlement rapide, transparent et juste de ce dossier”.
 

AFP

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