L’Actualité MEZIANE MERIANE, COORDINATEUR DU SNAPEST

“Augmenter Les salaires, mais de combien ?”

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Arab CHIH Publié 28 Septembre 2021 à 00:20

© D. R.
© D. R.

Dans cet entretien, Meziane Meriane revient sur la dégradation du pouvoir d’achat susceptible à ses yeux de conduire à un embrasement social si des mesures urgentes ne sont pas prises par les pouvoirs publics pour soulager les classes défavorisées.

Liberté : La Confédération des syndicats algériens a tenu aujourd’hui (hier, ndlr) une réunion consacrée à la baisse du pouvoir d’achat des Algériens. Quelle analyse faites-vous de cette situation ?
Meziane Meriane : Le pouvoir d’achat en Algérie a toujours été un problème délicat vu que le marché n’est pas maîtrisé et que l’inflation toujours galopante est incontrôlée. Cela vient du fait que tout provient de l’étranger et tout s’achète avec l’euro ou le dollar. 
Une fois, dans une conférence, j’ai eu cette réflexion : on est payé en dinars et on dépense en euros ou en dollars. Donc avec la dévaluation du dinar, le pouvoir d’achat s’en trouve affecté. 

Le Premier ministre, Aïmene Benabderrahmane, a promis, il y a quelques jours, une revalorisation salariale pour juguler l’érosion du pouvoir d’achat. Cette annonce vous satisfait-elle ? Une augmentation salariale suffirait-elle, à elle seule, à venir à bout de ce problème ? 
Concernant les mesures prises par le Premier ministre, on voudrait bien connaître les mécanismes et le taux qui viendrait soulager un tant soit peu le pouvoir d’achat des fonctionnaires d’une façon générale. On veut connaître ces mécanismes. 
Si c’est pour les augmenter de quelques miettes alors que l’inflation a atteint un niveau insupportable, cela ne peut pas venir en aide aux familles défavorisées ou à un smicard ni à celui qui touche 40 000 ou 50 000 DA car on ne peut pas dire qu’il est dans la classe moyenne car celle-ci a été laminée, voire écrasée. 
Aujourd’hui, il y a deux classes sociales : la classe aisée et la classe défavorisée. On ne peut pas considérer un salaire de 70 000 DA comme décent avec lequel on peut nourrir sa famille. Si on regarde les besoins quotidiens, un repas équilibré dépasse les 1 500 DA. C’est dire quel salaire doit percevoir un père de famille pour faire face uniquement aux besoins alimentaires, sans parler des autres besoins (le transport, la rentrée scolaire, les habits, le loyer l’électricité, etc). 
Augmenter les salaires, c’est bien mais de combien ? Cette augmentation ne risque-t-elle pas d’entraîner une inflation et de revenir à la case départ ? Ainsi tout ce qui a été donné d’une main est repris par l’autre. 

N'y-a-t-il pas risque de voir le front social s'embraser à l'occasion de cette rentrée ?
S’il y a un silence, il ne faut pas le prendre pour un laisser-aller, voire de la faiblesse des syndicats ou bien des populations de façon générale. 
Ce silence risque effectivement de déboucher sur un embrasement. C’est pour cela qu’on doit parer au plus pressé pour trouver des mécanismes à même de venir en aide aux familles démunies et à tous les salariés et fonctionnaires qui touchent des salaires misérables. Il faut revoir la politique salariale en Algérie. C’est une aberration qu’un cadre touche en une journée ce qu’un smicard touche en un mois. Donc, il faut avoir une politique salariale claire et basée sur une justice sociale. Pour revenir au front social, s’il n’y a pas prise en charge des problèmes des travailleurs, je vous cite le cas de l’éducation, il risque d’y avoir un embrasement et qui peut court-circuiter les syndicats.  
On l’a vu l’année passée avec les bases qui s’étaient révoltées contre les directions des syndicats. Donc, il s’agit de parer au plus pressé si on veut éviter un tel scénario car les augmentations des prix touchent les produits de première nécessité consommés par les pauvres. Donc, on vient piocher directement dans la poche des pauvres pour équilibrer la balance commerciale alors qu’avec la maîtrise et l’empêchement de l’évasion fiscale, avec les taxes sur les richesses, on peut renflouer le Trésor public sans pour autant toucher aux poches des pauvres dont les smicards ou ceux dont les salaires sont de moins de 50 000 DA. Il faut trouver rapidement des mécanismes fiables et solides.

Que proposez-vous ?
On veut une stabilité du marché et aller vers une économie productive de richesses qui va assurer des salaires décents et la stabilité du marché. Voilà notre objectif. Ce que l’on peut faire actuellement pour améliorer un tant soit peu le pouvoir d’achat et venir en aide aux travailleurs, il faut diminuer l’IRG. 
L’enseignant et le fonctionnaire, de manière générale, paient plus d’IRG et d’impôts que le salarié des grandes surfaces ou même les riches. La raison est que la taxe est prise uniquement à la source. La solution, c’est donc de taxer les riches et de diminuer l’IRG pour les travailleurs pour équilibrer la balance et non pas venir piocher dans les poches des pauvres avec toutes ces augmentations. 

Cette rentrée a été marquée par une pénurie du livre scolaire. À quoi est due cette crise, selon vous, et que proposez-vous pour la juguler ?
C’est une mauvaise chose que de ne pas vendre les livres scolaires à l’intérieur des établissements. On a déjà tiré la sonnette d’alarme et des mécanismes doivent être trouvés pour vendre les livres aux élèves et non pas les retrouver sur les trottoirs. C’est une aberration. Il faut un mécanisme. J’ai entendu aujourd’hui que les points de vente vont être multipliés, mais il fallait penser à cette solution dès le départ pour éviter tous ces tracas aux parents. 
Trouver de l’argent pour les acheter est déjà un problème. Le second, c’est comment les trouver ? Le livre scolaire est un outil pédagogique très important, il doit être à la portée de l’enfant dès la rentrée scolaire. Une solution immédiate doit être trouvée pour ne pas laisser les parents d’élèves souffrir et laisser leur travail pour chercher le livre scolaire.
 

Propos recueillis par : ARAB CHIH

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