L’Actualité La question de son organisation et de son projet politique se pose

L’autre épreuve du mouvement

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Mohamed MOULOUDJ Publié 27 Février 2021 à 22:26

© Sofiane Zitari Liberte
© Sofiane Zitari Liberte

Le mouvement populaire est de retour. Il a montré, avant-hier, sa résilience à travers des manifestations publiques imposantes.

Avec son ampleur, sa témérité et sa détermination à vouloir changer l’ordre établi, le soulèvement citoyen, né en février 2019, est une réalité que nul ne peut désormais éluder dans une quelconque équation de quête de sortie de crise. Provoqué par la perspective d’un hypothétique cinquième mandat présidentiel pour Bouteflika, le mouvement populaire s’est imposé, dès lors, comme seul et unique porte-voix d’une société que d’aucuns pensaient soumise ad vitam æternam.

Mais la question que d’aucuns se posent est : ce mouvement de protestation, qui ne réclame pas moins que le départ du système politique, est-il assez outillé pour atteindre son premier objectif, à savoir un changement de mode de gouvernance ? Une revendication, somme toute légitime, déclinée à travers le slogan, confus aux entournures, “yetnahaw gaâ”. Toutefois et indépendamment des acquis arrachés depuis 2019 et qui se résument pour l’essentiel au départ précipité de Bouteflika et de ses proches, dont une majorité est actuellement en détention, le mouvement populaire pourra-t-il s’accommoder indéfiniment de vagues slogans parfois dépourvus de consistance et de projection politique pour assurer sa longévité et, partant, atteindre le but assigné ? La question du projet escompté et des alternatives se posent avec acuité au mouvement.

Devrait-on se satisfaire de battre le pavé chaque week-end dans l’espoir de voir le régime partir de son propre gré ? Rien n’est impossible, certes, mais rien n’est également sûr face à un pouvoir préoccupé principalement par sa propre survie. De ce fait, le mouvement populaire est appelé à repenser, non pas sa lutte pour se réapproprier l’espace public, mais sa “feuille de route”.

Après plus de deux ans de manifestations publiques qui ont subjugué le monde et ébranlé les certitudes du régime en place, le mouvement populaire se doit de remobiliser ses “troupes” autour d’un projet aux contours bien définis. En trois années d’existence, il s’est théoriquement et en toute logique accompli et a atteint l’âge de discernement.

Et compte tenu des expériences passées, il serait suicidaire, qu’il reste sans cap. Non seulement parce qu’il risque d’être gagné par la lassitude, mais également de voir surgir des schismes que certains ne manqueront pas d’alimenter. Mais le peut-il face à un pouvoir qui recourt à toutes sortes de manœuvres et de subterfuges pour empêcher toute organisation du mouvement ? 

Des slogans qui suscitent la polémique  
Lors du dernier vendredi qui a marqué le retour “tonitruant” du mouvement populaire, de nouveaux slogans ont été scandés, notamment à Alger. Un des slogans se référant au rôle des services dans la lutte antiterroriste, allusion peut-être à la diffusion du témoignage d’un présumé terroriste à la télévision la veille de la célébration du deuxième anniversaire du Hirak, n’a pas manqué de provoquer la polémique.

Sur les réseaux sociaux, plusieurs activistes du mouvement populaire ont dénoncé ce qu’ils ont qualifié de “dérive”, surtout que ce même slogan a été diffusé et relayé à travers des vidéos et par une chaîne de télévision qu’on dit proche de la mouvance islamiste. Il n’est un secret pour personne que chaque partie tente de tirer son épingle du jeu dès lors que le mouvement reste dans l’aspect actuel.

Maintenant que le mouvement a atteint sa maturité, il est indispensable de poser les termes du débat. Encore faut-il que le régime admette la réalité du changement. Un débat qui déterminera le projet politique à opposer à la feuille de route du régime. Il sera dès lors opportun de définir les objectifs du mouvement, mais aussi les voies et moyens à même de les atteindre.

Vu sous cet angle, sans une réelle décantation, le mouvement risque de perdre de sa clairvoyance, tant la ténacité avec laquelle il a su faire face aux tentatives de son dévoiement risque de se transformer fatalement en fragilité. Sa vulnérabilité dans son incapacité, pour l’heure, à produire une alternative ne peut être qu’un tremplin pour les extrémistes de tout acabit.

 


Mohamed Mouloudj

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