L’Actualité LE PROCUREUR A REQUIS 10 ANS DE PRISON FERME CONTRE L’ANCIEN GARDE DES SCEAUX

Louh dans le filet de “sa” justice

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Arab CHIH Publié 11 Octobre 2021 à 23:51

© D. R.
© D. R.

L’ancien  garde  des  Sceaux  Tayeb Louh  s’est  retrouvé  face  à  sa propre justice lors d’un procès qu’il a voulu politique. Découvrant la froideur du tribunal, il demande  au  magistrat  d’être indépendant, lui  qui  n’a cessé  d’affirmer  durant  son  règne  que  la  justice  était  indépendante. Cruel destin.

L’argumentaire fort solide développé par l’ancien ministre de la Justice et garde des Sceaux Tayeb Louh et l’assurance affichée par l’ancien conseiller de l’ex et défunt président de la République Saïd Bouteflika, dimanche 10 octobre, à l’occasion de leurs procès, n’ont finalement pas suffi pour les extirper de l’affaire pour laquelle ils sont poursuivis, ni fait grand effet auprès du procureur général près le tribunal correctionnel de Dar El-Beïda (Alger).

Au deuxième jour du procès, qualifié d’“historique” par la défense, une peine de 10 ans de prison a été requise à l’encontre de Tayeb Louh assortie d’une interdiction juridique (privation de ses droits civiques et politiques), alors qu’une peine de 7 ans de prison a été requise à l’encontre, successivement, de Saïd Bouteflika et de l’ancien patron de l’ETRHB Ali Haddad, de l’ex-inspecteur général auprès du ministère de la Justice Taïeb El-Hachemi et du secrétaire général du même département ministériel, Laâdjine Zouaoui. 

En outre, le représentant du parquet a réclamé aussi une peine de 3 ans de prison pour tous les autres accusés dans cette affaire. Pour le procureur, les faits qui leur sont reprochés sont établis.

C’est ainsi que sur l’affaire de la dame de Ghardaïa qui, aux législatives de 2017, s’était présentée au lendemain de l’expiration des délais du dépôt des parrainages de candidature (le 4 mars 2017), le procureur a estimé, en se référant aux articles 41 et 46 du code pénal, qu’“il y a incitation à falsifier un document officiel même s’il n’y a pas eu de falsification directe”. Et selon lui, l’ancien ministre avait instruit l’ancien inspecteur général du ministère à l’effet de prendre en charge le dossier en demandant au président du tribunal de Ghardaïa et à la présidente de la commission électorale de wilaya de signer un PV antidaté. 

Pis encore, il y a eu, selon lui, des menaces indirectes proférées contre des magistrats, notamment la présidente de la commission électorale de wilaya. Aux yeux du représentant du parquet, il n’y a pas l’ombre d’un doute : l’ancien ministre de la Justice “a fait un mauvais usage de sa fonction”.

S’agissant du dossier du renouvellement de la moitié de la composante de Sénat dans la wilaya de Tlemcen, le procureur a reproché à l’ex-ministre de la Justice de n’avoir pas donné instruction pour ouvrir une enquête, malgré la gravité de l’affaire, à savoir l’agression dont avait été victime un magistrat de la part du gendre du même Tayeb Louh. 

Pour le dossier de l’annulation des mandats d’arrêt internationaux visant l’ancien ministre de l’Énergie Chakib Khellil et sa famille, le représentant du parquet a reproché à l’ancien ministre de la Justice d’avoir usé du pouvoir que lui confère sa fonction, sur demande de Saïd Bouteflika, pour instruire l’ex-inspecteur général du ministère pour régler cette affaire. 

Le réquisitoire du procureur a été reçu comme un coup de massue par la défense qui, visiblement, ne s’attendait pas à une telle “sévérité”. Me Saï, avocat de Tayeb Louh, a qualifié l’incarcération de son client de “scandale” et d’“humiliation de la justice algérienne”. “C’est le procès de la justice algérienne, et c’est très grave. Cela ne s’est jamais produit dans les annales de la justice algérienne”, a-t-il pesté. “Avec le Hirak, des personnes ont conseillé Gaïd Salah de jeter en prison les proches de l’ancien président déchu pour calmer la rue. Mais on ne peut pas mettre tout le monde dans le même sac”, a poursuivi Me Saï. 

Pour lui, toutes les accusations portées contre son client sont nulles et non avenues. Il a, en outre, loué la bonne image laissée par l’ancien inspecteur général auprès de ses confrères de l’Ouest, mais aussi des magistrats, en le présentant comme l’exemple “de la bonté, de la probité et de l’équité”. 

Pour Me Abdelaziz Medjdoub, “avec la période de transition, on devait avoir une justice de transition, mais on a eu affaire à une justice vengeresque et une justice du ‘mendjel’ (faucille, ndlr)”. “La justice est l’objectif et non un instrument. La justice devait être un fondement du pouvoir, mais malheureusement, l’ancien ministre a soutenu que son incarcération est éminemment politique”, a-t-il ajouté, avant de s’écrier : “On est dans le règlement de comptes. L’homme et sa famille ont été détruits. C’est une honte.”  

Les avocats de Louh et ceux de l’ancien inspecteur général au ministère de la Justice ont demandé la présentation du document prouvant la falsification de PV dans l’affaire de la candidate aux législatives dans la wilaya Ghardaïa.

À l’heure où nous mettons sous presse, les plaidoiries se poursuivaient toujours.  Il y a lieu de rappeler que l’ex-ministre de la Justice, garde des Sceaux, a été poursuivi pour les chefs d’inculpation d’“abus de fonction”, “entrave au bon déroulement de la justice”, “faux en écriture officielle” et “incitation des juges à la partialité”. 
 

Arab CHIH

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