L’Actualité IL AURAIT EU 65 ANS HIER

MATOUB, L’INOXYDABLE REBELLE !

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Samir LESLOUS Publié 24 Janvier 2021 à 22:07

© D. R.
© D. R.

Il  aurait  eu 65 ans hier, n’étaient  les chasseurs de  lumières qui  en  ont décidé autrement. Il a été lâchement assassiné par un groupe armé alors qu’il n’avait que 42 ans et qu’il avait, sûrement, encore beaucoup à donner.

Mais ce qu’il a donné jusqu’alors a déjà fait de lui une espèce de force qui, 23 ans après sa mort, continue à mobiliser et à éveiller les consciences. Lui, c’est évidemment Matoub Lounès, l’homme dont l’aura, le combat et l’engagement ont fait de lui un guide vivant pour son  peuple  en quête perpétuelle de liberté confisquée.

L’enfant qui naquit le 24 janvier 1956 à Taourirt Moussa, dans la région d’Ath Douala, se révéla très tôt au grand public qui distingua vite en lui un nouvel astre brillant dans l’univers artistique kabyle. Dans ses premières chansons, l’auditeur lambda décèle non seulement  un  nouveau style, mais aussi une voix propre à exciter l’intérêt et à soulever l’enthousiasme.

Il rend hommage aux ténors qui l’ont précédé, il décomplexe l’amour, il glorifie l’amitié et la fraternité, il sèche les larmes des veuves encore meurtries par le souvenir de la guerre... Il chante la mort, mais aussi l’espoir.

L’enfant terrible de Taourirt, dont  les  anecdotes  se  sont  transformées,  au fil  du  temps, en contes du terroir, ne tarde pas à révéler d’autres facettes, d’autres dimensions et d’autres forces de sa personnalité.

Outre son  talent  artistique, il révèle  un  sens  inouï  de  l’engagement  et du courage. Il fait de son identité amazighe une cause, du pouvoir un adversaire et de l’islamisme un ennemi.

Ce qui  n’était  pas  pour  déplaire  aux  siens  qui  reconnaissent  vite  en lui l’homme qui dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas, et  aussi celui qui agit pendant que certains se contentent de théoriser.

Engagé jusqu’à se déplacer dans les  villages  pour distribuer des tracts en 1988, Matoub Lounès, criblé de balles par des gendarmes, est laissé pour mort. Mais Lounès renaît de ses cendres et revient auprès de son peuple. Un épisode qui achève de démontrer le contraire à ceux qui ne voyaient en lui qu’un “petit agitateur”. 

Depuis, Matoub prend  une  autre  dimension  et  c’est  en  même  temps son combat qui prend de l’ampleur.  Sans répit, sans jeu de mots et sans aucune retenue, mais avec beaucoup de vérité et d’authenticité, il ne cesse de tailler des croupières à tous ceux qui ramaient à contresens de la démocratie, de la liberté, de la vérité et de l’identité millénaire.

Il a fait de son mandole une arme et de sa langue une épée qu’il plante dans chaque plaie de l’histoire non guérie du pays. Il n’épargnait même plus les siens lorsqu’ils versaient dans les chamailleries qui ne faisaient pas avancer la cause.

Bref, Matoub se dressait en Rebelle contre tout ce qui n’était pas dans l’intérêt du peuple. Monsieur le président, Kenza, Ironie du sort, Regard sur un pays damné, Hymne à Boudiaf, Lettre ouverte aux… autant d’albums où il dissèque le mal du pays et porte un regard critique sur le pouvoir et les islamistes tout en déterrant à chaque fois les vérités qui font mal à ses adversaires et, en même temps, mettent du baume au cœur d’un peuple assoiffé de justice et de réparation. Ce peuple qui a fait de lui, une fois mort, un homme encore plus vivant que jamais.  

Matoub Lounès qui faisait ainsi partie  du  quotidien  des  citoyens, notamment en Kabylie, où l’on ne peut toujours pas circuler dans la rue sans entendre ses chansons et où l’on continue à chaque anniversaire  de sa  naissance et de sa mort de se recueillir à sa mémoire.

Plus encore, c’est durant le mouvement populaire du 22 Février que le peuple a démontré son attachement à  l’esprit de Matoub  Lounès tant il n’y avait pas une  seule  manifestation   où  ses  chansons,  ses  portraits,  ses  mythiques expressions n’étaient pas présents dans la foule  qui en  a fait ainsi son guide. Pas plus tard  qu’hier, nombreux  sont  ceux  qui  se  sont  rendus  à  Taourirt Moussa pour se recueillir à sa mémoire. 
 

Samir LESLOUS

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