L’Actualité Élue maire DE Ouled Sidi Brahim (BBA)

Nihad Laazizi, le nouveau visage de la commune

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Chabane BOUARISSA Publié 15 Décembre 2021 à 09:44

© D.R
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Elle est la seule femme élue maire des 34 communes que compte la wilaya de Bordj Bou-Arréridj. Une petite révolution qui ouvre un nouveau chapitre dans l’exercice du pouvoir local. Mais surtout l’expression d’une évolution sociétale en douce.  

Juste à l’annonce des résultats, lundi en fin de journée, des youyous déchirent le silence qui règne d’ordinaire, en pareille période, à Ouled Sidi Brahim, cette commune nichée dans les “Portes de fer”, à cheval entre Bordj Bou-Arréridj et de Bouira. Réputée pour son conservatisme, cette commune - qui tiendrait son nom d’un marabout et qui jadis tenait tête aux Turcs - fait sa petite révolution et écrit une nouvelle page de son histoire : l’élection d’une femme à la tête de la mairie. Avocate de profession, âgée de seulement 31 ans, élue sur la liste du FFS par 7 voix contre 6  pour son concurrent du RND, Nihad Laazizi devient ainsi la première femme à occuper la fonction de “Cheikh el-baladiya”, titre masculin traditionnel donné au maire des communes en Algérie. Une surprise et fait inédit pour cette commune rurale qui, comme d’autres, attend sa part de développement.

Elle réussit même à détrôner le P/APC sortant. “Il y a un début à tout”, philosophe un ancien habitant de la commune. “Certes, la région est conservatrice, mais la femme est toujours respectée et honorée”, dit-il se réjouissant de l’arrivée de cette jeune femme comme première magistrate. Un exploit inimaginable il y a encore quelque temps. De quoi bousculer l’ordre établi et donner plus de visibilité, particulièrement à la femme rurale. “Ce jour, un nouvel exécutif a été installé à Ouled Sidi Brahim. Je tiens à féliciter Mlle Nihad Laazizi pour son élection en tant que maire. Cette élection est conforme aux choix d’une majorité d’électeurs le 27 novembre dernier pour le changement. Il faut qu’elle résiste et affronte tous les problèmes. C’est une mission difficile mais je lui souhaite beaucoup de courage et de sagesse”, s’enthousiasme une jeune femme. “Son élection restera dans l’histoire de notre commune et doit être le symbole d’une région responsable, digne et rayonnante”, dit-elle fièrement. 

Initiation à la politique  
Originaire de la région, Nihad Laazizi a exercé pendant quatre ans à Tizi Ouzou en tant qu’avocate avant de se lancer en politique, un domaine qui était jusqu’ici l’apanage des hommes dans son village. Si elle est néophyte, la mission qu’elle entend mener avec “conviction et volonté” ne lui fait pas peur. Grâce à l’exercice de son métier, elle a pu acquérir des connaissances sur les rouages de l’administration, la gestion, la bureaucratie, mais surtout connaître les attentes de ses concitoyens. “J'offre cette victoire à toutes les femmes de mon pays, à toute la jeunesse et à l’Algérie”, dit-elle. Même si elle est élue sous la casquette du FFS, cette femme se présente comme la mairesse de tous ses concitoyens qu’elle entend servir loyalement. “J’ai accepté la proposition du FFS parce que j’ai rencontré avec ce groupe de jeunes (ceux qui la soutiennent) la volonté de bien faire et surtout de mieux faire.” Pour elle qui a appris le sens de l’altruisme pour avoir été membre du club féminin de Tizi Ouzou, seule activité qu’elle exerçait en dehors de sa fonction d’avocate, la politique c’est avant tout de servir autrui sans préjugés. “Nous voulons accomplir et changer beaucoup de choses.” 

Défis et appréhensions 
Mais entre la volonté et la réalité, les défis à relever sont nombreux. Surtout pour une jeune femme dont l’arrivée à la tête d’une APC est déjà un événement dans cette région rurale, peut-être même au-delà. À commencer par le développement local, l’entretien des infrastructures existantes et répondre aux besoins dont la commune a plus besoin. “J’espère pouvoir surmonter toutes les difficultés et honorer la population qui a voté pour moi”, espère-t-elle. “Nous souhaitons des projets structurants pour notre région et non des petits projets habituels, qui se résument à des opérations limitées d’assainissement ou à l’éclairage public. 

Ouled Sidi Brahim a plutôt besoin de projets importants, tels qu’un lycée pour nos enfants qui parcourent 15 km chaque jour pour rejoindre leur établissement et un hôpital, ce qui nous épargnerait les déplacements à Bouira ou à Mansoura pour nous soigner”, précise-t-elle. Elle veut aussi améliorer l’environnement, donner de la visibilité à la femme rurale et s’occuper d’autres volets comme la jeunesse et l’agriculture. Avant même d’entamer sa fonction, elle fait déjà des heureux parmi sa famille politique. “Aujourd’hui, nous faisons l’histoire”, se réjouit Dahmane Menasria, un élu FFS. “À compter d’aujourd’hui, elle est maire de notre commune. C’est la première femme à occuper cette fonction dans la région. Elle est jeune, dynamique et pleine de bonne volonté. Elle concentre les compétences, le savoir-faire et tout ce qu’il faut pour booster le développement de notre commune”, dit-il. 

L’élection de cette jeune femme est déjà une avancée. “Pourquoi a-t-on des femmes directrices, chefs de daïra, walis et ministres, et pas maires ? Elles sont aussi capables et compétentes”. En dépit de quelques réticences, elle a pu se faire adouber grâce au soutien des ses colistiers, tous favorables à son élection. “Les habitants ont accordé leur confiance à toute une équipe afin d’agir collectivement à la valorisation de notre commune. Je lui souhaite du courage et de la patience. Tout le groupe FFS lui apporte soutien, aide et encouragement”, assure M. Menasria. L’ancien P/APC, d’obédience RND, lui apporte aussi son soutien. “C’est la démocratie qui a gagné. Pourquoi la priver de cette victoire. La population lui a fait confiance, pourquoi pas nous ? Nous avons 6 sièges, un siège d’écart, nous sommes aussi concernés par la gestion de l’APC et nous devons honorer nos engagements vis-à-vis des habitants qui nous ont donné leurs voix”, ajoute-t-il en promettant de mettre toute son expérience au service de la nouvelle assemblée et de sa présidente. “Elle ne réside pas dans la commune, c’est une novice en politique et en gestion, nous allons tous lui apporter aide et soutien. Elle pourra toujours compter sur mon aide et mon appui pour faire avancer les nombreux dossiers de notre région”, assure-t-il.

Si son arrivée fait beaucoup d’heureux, certains n’hésitent pas toutefois à rappeler certaines pesanteurs susceptibles d’entraver sa mission, tandis que d’autres focalisent sur les circonstances ayant entouré les élections et le climat général qui règne dans le pays. “Pourra-t-elle se déplacer la nuit, veiller sur les intérêts de la population ?”, se demande Allaoua, 56 ans, partisan du FLN rappelant, non sans ironiser, que même les hommes trouvent des difficultés à gérer une commune qui manque quasiment de tout. “Pourquoi ne parle-t-on pas de la population qui n’a pas voté et qui rejette ces élus qui ne représentent que leurs familles et non pas toute la population ?” s’interroge, pour sa part, Nabil, jeune activiste. “Un maire ne résidant pas dans la commune peut-il la gérer ?”, se demande-t-il. Comme quoi, une femme qui préside désormais aux destinées de la commune ne laisse pas indifférent. 

 


Chabane BOUARISSA

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