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Ce qui doit être fait

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M'hamed ABACI (*) Publié 18 Septembre 2021 à 20:23

Par : M'HAMED ABACI
ANCIEN CADRE FINANCIER À SONATRACH

Chercher à connaître les raisons d’un mode de gouvernance et de gestion qui a mis notre économie dans une impasse et qui demeure encore sous la contrainte en liaison directe avec l'évolution du prix du baril de pétrole sur les marchés mondiaux, c’est encore mieux pour “restaurer la fierté algérienne” et aussi vitale que le pain.

 

Dans le grand hémicycle du boulevard Zighoud-Youcef où siège l’Assemblée populaire nationale (APN), “les députés”, dans leurs interventions, se font à chaque fois l’écho des préoccupations des citoyens, c’est bien. Mais chercher à connaître les raisons d’un mode de gouvernance et de gestion qui a mis notre économie dans une impasse et qui demeure encore sous la contrainte en liaison directe avec l'évolution du prix du baril de pétrole sur les marchés mondiaux, c’est encore mieux pour “restaurer la fierté algérienne” et aussi vitale que le pain. Pourquoi ? Parce qu’on ne peut pas charmer avec un discours partisan ou populiste qui ne prend pas les réalités socioéconomiques du pays où l'Algérie est tristement dépendante de la rente pétro-gazière. Notre pays est affecté par une série de difficultés socioéconomiques fortement coûteuses pour la collectivité nationale, dont on retiendra une économie qui n'arrive pas à absorber ces jeunes qui arrivent sur le marché du travail, les importations et le commerce de l’informel qui contrôlent près de 60% du marché national, des déficits budgétaires structurels enregistrés ces deux dernières décennies soit entre 9 et 20% du PIB, dépassant largement les normes budgétaires internationales qui sont votées et gérées à 3% du PIB, la croissance du taux démographique par rapport au taux de croissance économique, la fuite des capitaux, fuite des cerveaux, l'inflation, le chômage, la destruction du marché, la croissance de la dépense publique qui a atteint près de 60% du PIB, le recours excessif à la planche à billets, la chute chaque année de près de 10% du pouvoir d’achat, le fort taux d'urbanisation. Ainsi, l’économie nationale souffre énormément en matière de progrès technologique et de croissance économique potentielle. Et qui affecte, parallèlement, la stabilité sociale où il y a ces maux qui nous rongent tels que crise morale, les maux sociaux, la bureaucratie lourde, les affaires inhérentes aux scandales de corruption qui viennent de secouer l'opinion publique qui constituent un sérieux problème de société et commencent à constituer une menace sérieuse et de plus en plus lourde dans le financement de l'économie nationale, car on n’est pas encore essentiellement un pays agricole ou industriel. Oui, il y a cette épineuse question qui reste à la traîne, celle du développement de notre industrie, le parent pauvre de la politique économique de l'Algérie et le grand corps malade de l'économie algérienne, qui après plus d'un demi-siècle, l'économie algérienne hors hydrocarbures reste quasi inexistante devant la gravité de la facture des importations qui a dépassé aujourd’hui nos recettes d’exportation d’hydrocarbures et siphonné notre épargne et réduit nos réserves de change. Ceci dit, une économie sans développement de l'entreprise est une économie nécessairement administrée et bureaucratique. Aujourd’hui, sans les subventions et les transferts sociaux, la pauvreté serait plus forte en Algérie qui pourrait atteindre, selon nos estimations, 30% de la population. Quant aux salaires, ils sont trop bas socialement et trop élevés économiquement tant pour l’État que pour les entreprises dans un pays qui dispose d’immenses richesses et le plus vaste d’Afrique. On peut dire que la bonne gouvernance ne peut se mesurer que par la réussite économique d’un pays. Ainsi, l’économie n’est pas un simple slogan qu’on scande, mais l'économie est la science de la rationalité des décisions, de régulation et d'une manière générale, l'ordre économique, commercial et financier. Il va sans dire que notre développement économique n’a pas de signification si on ne fait pas appel aux élites, symbole de richesse et possédant la notoriété, d’un palmarès intellectuel, académique et scientifique, de capacités d'anticiper, d’innover, de redresser et d’améliorer la situation. Ils sont les vrais concepteurs du développement national au service de la nation et du peuple à l’égard de l’opinion publique, notamment responsables de sa mise en œuvre qui contribuaient à améliorer l’environnement socio-économique au XXIe siècle, dominé par les hautes technologies, la compétitivité et l’intelligentsia. C’est un sujet-clé qui marquera le plus le nouveau visage économique de l’Algérie nouvelle.
La situation alarmante dans laquelle se trouve l’économie algérienne aujourd’hui n’est sûrement pas à cause de la crise énergétique mondiale. Mais parce que nos députés ont longtemps ignoré les réalités d’un modèle d’économie de marché consacré par la Constitution de 1989, en soutenant un modèle rentier basé exclusivement par l’exportation des hydrocarbures. Alors que l’économie du marché est au service des intérêts stratégiques d'un pays, dont elle préserve notamment les intérêts du trésor public pour permettre à l’État de dépenser l’argent public de façon judicieuse et de faire donc un bon usage des finances publiques au profit de la collectivité nationale. La raison essentielle qui permet d'expliciter les conditions de l'échec de notre développement socioéconomique, résultat de l'amalgame entretenu entre l'économie du marché et l'économie administrée. Ce qui a d'ailleurs impliqué la notion de ‘‘houkouma'' (beylik). En effet, les partis influents et majoritaires qui sont coalisés en alliances, comme le RND, le FLN, le MSP, le MPA, TAJ, etc., ont tous misé sur la rente pétro-gazière pour défendre des politiques économiques et sociales sans rapport avec les fondamentaux de l’économie. Ils se sont contentés de l’investissement public, voire certains, de par leur nature, qui relèvent du caractère commercial tels que l’autoroute, le métro, le tramway, les ports, les aéroports, etc. pour contenir la croissance via la dépense publique, nous qui sommes dans une économie de marché. En clair, si l'on fait carrière dans la politique, c'est bien dans l'économie réelle que l'on se fait un nom et une notoriété.
En effet, “nos députés qui se sont succédé depuis ces quatre dernières décennies n'ont pas été spectaculaires”, vivant encore à l'ère de l'idéologie du socialisme de l'État providence, qui pose toujours un problème d’idéologie socialiste de financement, c'est-à-dire cultivent toujours “l’attitude étatiste” en misant toujours sur le prix du baril de pétrole qui nous garantissait le fonctionnement du pays et l'on s'achemine encore à oublier que notre développement économique et notre progrès social résident dans les valeurs du travail, de la production, du savoir et des technologies. Il est temps que l’on définisse en toute transparence la place de la rente des hydrocarbures dans notre politique économique. Il faut savoir que la force productive doit reposer nécessairement sur les travailleurs, les élites, les compétences, les entreprises et surtout l’émergence d’une classe moyenne en général. C’est tout l’enjeu futur, afin de garantir à chaque Algérien un emploi et un revenu pérenne et par conséquent offrir des perspectives ouvertes à l’économie nationale, afin d’améliorer le quotidien et les conditions de vie des Algériens. Tous les pays développés ou émergents ont reconnu la nécessité et l’intérêt grandissant d’une économie de marché à l’instar de la Chine nouvelle. Dans cette perspective intégrant l’entreprise dans un projet de société de libéralisme économique nécessite, la mise en place d’une justice commerciale séparée avec des magistrats spécialisés (tribunaux de commerce), qui relève des réformes de fond pour proposer de statuts nouveaux des sociétés commerciales pour les besoins de l’amélioration de la gouvernance des entreprises algériennes et l’amélioration du climat des affaires et du droit des affaires surtout.
Conséquence, après 32 ans d’ouverture au libéralisme économique, l’État ne profite que peu de l’économie des entreprises, et l’économie algérienne est demeurée fortement subventionnée, étatiste et structurellement importatrice avec près de 75% de ses besoins, près de 70% de la population vit de la rente et près de 90% des crédits destinés aux entreprises proviennent des banques publiques, via la rente. En effet, ces cinq décennies accomplies dans la construction et l'édification du pays nous interpellent effectivement d'ouvrir un vrai débat socioéconomique pour un premier bilan de l'économie algérienne et tracer les perspectives budgétaires de l'Algérie et par voie de conséquence formuler une stratégie globale visant à projeter l'entreprise algérienne dans une dynamique économique mixte, en sachant bien que jusqu'ici nos entreprises demeurent avec un faible taux de pénétration dans l'économie nationale. La morphologie de l’économie algérienne est dominée aujourd’hui par les personnes physiques qui représentent près de 90% (commerces et services) et seulement 10% en tant que personnes morales (sociétés), dont 85% représentent des TPE, PME et PMI, et un manque d’organisation, d’innovation, de compétitivité, de maîtrise des systèmes de production et de management. Il nous faudra une croissance annuelle de 7% et plus par an et la création de 2 millions d’entreprises de taille PME/PMI et de pas moins de 700 000 emplois nouveaux par an pour surmonter la crise énergétique mondiale et ouvrir des perspectives socioéconomiques pour notre jeunesse. 
Dans ce contexte, à notre humble avis, nos “députés” n’ont pas fait relation de leur pouvoir universel de législateur dans l’enceinte économique du pays pour réorienter la politique économique ou la redéfinition de la stratégie économique de l’Algérie en faveur d’une meilleure efficacité économique des finances publiques dans le souci de réaménager l’organisation de l’État, pour planifier l’étape de l’après-pétrole, ceci d’une part, et, d’autre part, donner la primauté à la fiscalité ordinaire sur la fiscalité pétrolière. En effet, contrairement à la politique économique et budgétaire suivie dans les années 1970 où l’épargne publique et la fiscalité pétrolière étaient utilisées seulement et uniquement pour l’équipement public et les investissements productifs et la fiscalité ordinaire qui couvrait la totalité des dépenses de fonctionnement avec notamment la contribution de la fiscalité des agents économiques (entreprises nationales, entreprises locales (EPL) et les ménages). La part de la production industrielle annuelle était autour de 18% contre actuellement 5% du PIB, la part générée en croissance économique annuelle était de 10% contre aujourd’hui 2 à 3%. Le tourisme qui rapportait environ 7% des revenus en devises, un taux d’intégration de 40%, voire 80% dans le secteur de la mécanique et la sidérurgie contre aujourd’hui un taux de 15%. Oui, l’Algérie, dans les années 1970, s’est classée après l’Espagne et l’un des premiers pays émergents du continent africain et du tiers-monde. Alors que l’Algérie était à l’époque très loin de connaître l’aisance financière pétro-gazière, dont allait bénéficier le pays en 1980, 1984 et 2000. 
Face à ce bilan, l'argent de la rente n'apparaît cependant pas comme le remède approprié et efficace. Dans une économie normale, quand on injecte 1% du PIB, ce dernier s’accroît de 2 à 3% ; or l’Algérie injecte entre 25 et 30% du PIB par an pour obtenir une croissance moyenne de 2 à 3% du PIB. En somme, une menace de plus en plus lourde dans le financement de l'économie nationale. C'est dire le long chemin à parcourir qui attend la politique du gouvernement, appelé à remettre les pendules à l'heure, c'est-à-dire mettre fin à privilégier le macro-économique aux dépens du micro-économique, car aujourd'hui il vaut mieux avoir entre les mains un savoir-faire (know how) et des technologies que de disposer davantage d'argent. 

 

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