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Comment réduire l’incivisme ?

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Ali CHÉRIF Publié 05 Juillet 2021 à 20:11

Par : Cherif Ali
Cadre supérieur à la retraite

Un débat sur la nécessité ou pas d’une police communale s’impose, dès lors qu’il est admis qu’il existe encore de larges portions du territoire national que les forces classiques de sécurité publique peinent à couvrir en permanence, nonobstant leurs incessantes rondes : grands ensembles d’habitats, écoles publiques, stades...”

Incivilités, déviances et violences urbaines contre les personnes et les biens sont au cœur de l’actualité de notre pays. Un phénomène qui va croissant avec l’urbanisation accélérée et le relogement d’habitants venus d’horizons divers, mais dont l’incompatibilité à vivre ensemble apparaît au grand jour.  Mais pas que ! 
Ce qui s’est passé à Bordj Badji-Mokhtar est révélateur d’une violence qui n’a pas de frontières et qui peut s’abattre sur n’importe qui et n’importe où.
Devenues monnaie courante, notamment depuis la propagation de la pandémie de Covid-19, les agressions et les violences contre le personnel médical et paramédical et les gestionnaires des établissements de santé sont désormais condamnables.
Le président de la République, M. Abdelmadjid  Tebboune, a fait état d’un durcissement des sanctions contre les agresseurs des staffs médicaux dans les hôpitaux, “et ce, en vertu d’une ordonnance présidentielle ayant force de loi”, qu’il aura à signer incessamment.
Dans les nouvelles cités, les batailles rangées, les saccages des commerces, les vols et les agressions sont devenus monnaie courante !
Ce type de violence en milieu urbain a fait l’objet d’un débat organisé par l’Association de protection des mineurs de la délinquance et d’insertion au sein de la société (APMDIS), à Alger. Les experts ayant animé cette conférence ont été unanimes sur le fait que l’apparition de nouvelles cités représente des foyers potentiels de prolifération de la violence, notamment parmi les mineurs. Les incidents enregistrés dans certains grands ensembles d’habitat ne sont pas des actes isolés, car ils peuvent être assimilés à un phénomène de violence, et le gouvernement doit leur accorder une importance cruciale.
Ces incidents ont tendance à se multiplier, au grand dam des habitants des cités populaires et des quartiers du même nom qui n’en peuvent plus. 
De grands ensembles d’habitat ont été livrés à des populations qui doivent s’habituer au “vivre-ensemble” ; cela ne se fait pas sans quelques frictions. 
Pour l’heure, on parle d’une nouvelle gouvernance locale !
On parle aussi de mieux organiser et de mieux répartir les missions des forces de l’ordre, ce qui suppose la mise en place de moyens additionnels, notamment en matière de sécurité publique.
On parle aussi d’une police communale ! D’anciens responsables avaient mis le sujet sur la table. 
Simple effet d’annonce, ou ira-t-on, vraiment, vers la mise en place d’une police communale ? L’idée n’est pas nouvelle, dès lors qu’un projet de mise en place d’une police communale dont la colonne vertébrale pourrait être formée par les éléments de la garde communale, particulièrement ceux stationnés dans les zones qui ne sont plus sous la menace du terrorisme, était dans l’air. Il s’agit, particulièrement et surtout, des grandes villes et des principaux centres urbains du pays. Seulement, faut-il le dire, beaucoup de responsables étaient contre l’idée de reconversion de la garde communale en police communale !
Les motifs avancés tiennent du faible niveau d’instruction de ses agents, et de leur formation, ignorant que ce corps regroupait en son sein quelque 5 000 agents, tous détenteurs de licence universitaire et, de surcroît, formés au maniement des armes et aux techniques de combat.
La police communale, sans être un organe répressif, pourrait, si le projet venait à être concrétisé, remplir le rôle d’une police de proximité appelée à veiller sur les citoyens pour :
• rassurer la population,
• gérer les litiges du quartier,
• permettre au président d’APC de faire exécuter les arrêtés qu’il prend en matière d’urbanisme ou de protection de l’environnement.
Elle pourrait, également, s’articuler, dans un premier temps, autour de quatre grandes missions :
• rassembler des informations susceptibles d’endiguer certains problèmes, détecter les nids criminogènes, ainsi que les personnes à risque ou celles en danger,
• intervenir dans les conflits de voisinage, par exemple, pour les résoudre grâce au dialogue et à la médiation et éviter, ainsi, qu’ils ne dégénèrent,
• être le relais entre la population, le maire et les forces de sécurité,
• agir sur le préventif, le social et la tranquillité publique.
D’un point de vue sémantique, la notion de police communale a du sens, puisqu’elle recouvre la réalité du terrain, celui de la commune principalement.
D’un point de vue plus stratégique, sa mise en place soulève toutefois les questions cruciales de la doctrine d’emploi, de la spécificité des missions assurées dans la coproduction de la sécurité locale et, inévitablement, les problèmes de l’uniforme et de l’armement, sans compter les dotations budgétaires qu’il faudrait débloquer en ces temps de crise.
En d’autres termes, il ne s’agit pas de “créer” une police communale, mais de définir son “statut” :
• police du maire, son “bras armé”, s’empressent de dire ceux qui craignent une utilisation “abusive” de cette force de sécurité par les édiles locaux ;
• police placée sous la tutelle directe du ministre l’Intérieur.
Dans la première hypothèse, il faudrait, inévitablement, prévoir l’amendement de l’article 93 du code communal avec toutes les réactions en chaîne qui en découleraient. Et même si on venait, en haut lieu, à régler ce problème, il subsisterait, encore, les questions relatives à l’armement, à l’uniforme, au volet de la formation, ainsi qu’aux rapports de cette police avec les autres forces de sécurité. 
Et parmi les autres questions qu’il faudrait trancher, il y a la dotation en armes, dont certains experts en sécurité affirment que c’est un moyen de protection indispensable face aux risques du métier, dès lors qu’il ne diffère pas, fondamentalement, de celui de la police ou de celui de la Gendarmerie nationale. 
D’autres, en revanche, considèrent que ce n’est pas un gage de sécurité absolue et craignent que cela n’encourage une confusion des rôles avec les forces de sécurité classiques.
Il faut aussi s’assurer de l’accord de principe de la DGSN, dès lors que la police communale et la police nationale font partie d’un même “creuset”.
Mais pourquoi s’entêter, disent certains, à monter une police communale qui ne peut, en l’état des difficultés énumérées supra, trouver sa place dans le paysage sécuritaire, jusque-là occupé intra-muros par la police nationale et extra-muros par la gendarmerie ?
À moins de clarifier la doctrine d’emploi de cette police communale, en dehors des missions de “prévention et répression” qui sont la raison d’être des forces de sécurité classiques. 
Il reste bien entendu que le recours à la force doit rester du domaine de l’État, et en conséquence seules la police nationale et la gendarmerie doivent être armées.
Et il n’est surtout pas question d’abandonner des espaces et des ensembles d’habitat ou des territoires isolés aux gangs et aux voyous !
Qu’on se souvienne de ces jeunes habitant la région de Bouchaoui, à Alger, qui, munis de bâtons et parfois même de sabres comme le montrent des images diffusées sur les réseaux sociaux, ont dressé un barrage à l’entrée de la forêt où des familles ont l’habitude de passer des moments de détente ; ces nouveaux pasdarans se sont permis d’interdire l’accès à des couples. 
Des scènes qui rappellent la “police des mœurs” créée au début des années 1990 par l’ex-FIS dissous !
De ce qui précède, un débat sur la nécessité ou pas d’une police communale s’impose, dès lors qu’il est admis qu’il existe encore de larges portions du territoire national que les forces classiques de sécurité publique peinent à couvrir en permanence, nonobstant leurs incessantes rondes : grands ensembles d’habitats, écoles publiques et stades, par exemple.
Sans oublier les hôpitaux, les structures sanitaires et les établissements de l’éducation nationale de l’Algérie profonde, qui font l’actualité aujourd’hui !
En tant que personne, citoyen et président, cela me peine que des médecins et des infirmiers, qui n’ont pas vu leurs enfants depuis des mois, soient victimes d’agressions, avait déclaré le président de la République, qui est plus que jamais décidé à mettre en œuvre son 54e engagement électoral : garantir la sécurité du citoyen et des biens publics et privés ! Qualifiant ces personnels de “véritables moudjahidine”, Abdelmadjid Tebboune a commencé par durcir les peines de leurs agresseurs. C’est un début, en attendant la suite, et pourquoi pas la mise en place d’une police communale de proximité pour “se réapproprier les espaces perdus de la République”.

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