Contribution

Les droits et obligations du voyageur

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IDIR KSOURI Publié 05 Février 2022 à 15:36

Par : IDIR KSOURI
FONCTIONNAIRE DES DOUANES À LA RETRAITE, BÉJAÏA

Tout voyageur en provenance ou à destination de l’étranger est tenu – en vertu des articles 75, 197, 198, 198 bis, 198 ter et 198 quater du code des douanes, des articles 367 et 378 du code des impôts indirects et du règlement de la Banque d’Algérie n°16-02 du 21 avril 2016 – de faire sa déclaration en douane de devises et des objets de valeur.
Pour sensibiliser toutes les parties intéressées sur l’importance de cette déclaration, il importe de la définir (I), de préciser son champ d’application (II) de définir l’infraction de change (III), d’indiquer ses bases légales (IV), ses faces (V), sa nature (VI), ses éléments constitutifs (VII), ses auteurs et complices (VIII), les agents habilités à la constater (IX) et la procédure en matière d’infraction de change et de transaction (X). 

I. Définition de la déclaration de devises et des objets de valeur
La déclaration de devises et des objets de valeur est une déclaration en douane. Elle est remise au voyageur à l’entrée et exigée pour la vérification à sa sortie du territoire national.

II. Champ d’application de la déclaration de devises et des objets de valeur
La déclaration de devises et des objets de valeur doit être remplie soigneusement par le voyageur qui doit y indiquer, pour les besoins du contrôle douanier : la monnaie, c’est-à-dire la monnaie fiduciaire et la monnaie scripturale (pièces de monnaie et billets ayant cours légal, les chèques, traveller(s) chèques, lettres de crédit, traites, effets de commerce, etc.), les métaux précieux (or, argent et platine) et les pierres précieuses (diamant, rubis, saphir…).
La question qui se pose est de savoir quelles sont les sanctions qu’un voyageur peut encourir en cas d’absence ou de fausse déclaration de devises et des objets de valeur ?
Avant de répondre à cette question pertinente, il importe tout d’abord de passer en revue certaines questions pertinentes relatives à l’infraction de change.

III. Définition de l’infraction de change 
Aux termes des articles 1, 2 et 4 de l’ordonnance n° 96-22 du 9 juillet 1996, modifiée et complétée, relative à la répression de l’infraction à la législation et la réglementation des changes et des mouvements de capitaux de et vers l’étranger, et des articles 27, 197 et 198 du code pénal, l’infraction de change peut-être définie comme consistant en la fausse déclaration, l’inobservation des obligations de déclaration, le défaut de rapatriement des capitaux, l’inobservation des procédures prescrites ou des formalités exigées, le défaut des autorisations requises, le non-respect des conditions dont elles (autorisations) sont assorties, l’achat, la vente, l’exportation ou l’importation de tout moyen de paiement, valeurs mobilières ou titres de créance libellés en monnaie étrangère, l’exportation et l’importation de tout moyen de paiement, valeurs mobilières ou titres de créance libellés en monnaie nationale, l’exportation ou l’importation de lingots d’or, de pièces de monnaies en or ou de pierres précieuses et métaux, la contrefaçon, la falsification ou l’altération des monnaies métalliques ou papier-monnaie ayant cours légal sur le territoire national ou à l’étranger et l’émission, la distribution, la vente ou l’introduction sur le territoire national des monnaies visées à l’alinéa précédent.

IV. Faces de l’infraction de change
L’infraction de change a deux faces. Elle relève du contentieux administratif en ce concerne les différents recours contre les décisions de la Banque d’Algérie et des intermédiaires agréés et du droit pénal, en ce qui a trait aux transferts illicites de capitaux à l’étranger. 

V. Nature de l’infraction de change 
Il ressort de la lecture de l’article 6 de l’ordonnance n°96-22 du 9 juillet 1996, modifiée et complétée, relative à la répression de l’infraction à la législation et à la réglementation des changes et des mouvements de capitaux de et vers l’étranger, que l’infraction de change est une infraction de droit commun autonome visant un certain nombre d’agissements (Cf. art. 1, 2 et 4 de ladite ordonnance). Cet article précise par ailleurs que “nonobstant toutes dispositions contraires, les peines prévues par la présente ordonnance pour la répression de l’infraction à la législation et à la réglementation des changes et des mouvements de capitaux de et vers l’étranger, sont applicables à l’exclusion de toute autre peine”, ce qui signifie que l’infraction de change n’est plus une infraction mixte.

VI. Éléments constitutifs de l’infraction de change
L’infraction de change, à l’instar de l’infraction pénale ou de l’infraction douanière, comporte trois éléments, un élément légal, un élément matériel et un élément moral. Concernant ce dernier élément, l’élément moral, il ne joue pas en vertu de l’article 1er de l’ordonnance susvisée un rôle important, au motif que le contrevenant ne saurait être excusé sur sa bonne foi.

VII. Auteurs et complices de l’infraction de change
Les auteurs et les complices de l’infraction de change sont ceux définis par les articles 5 et 41 et 42, respectivement de l’ordonnance n° 96-22 du 9 juillet 1996 et du code pénal. 

Ces articles disposent :
◗ Art. 5. - Sans préjudice de la responsabilité pénale de ses représentants légaux, la personne morale de droit privé est responsable des infractions prévues aux articles 1 et 2 de la présente ordonnance, commises pour son compte, par ses organes ou représentants légaux.
Elle est passible d’une amende qui ne saurait être inférieure à quatre fois la somme sur laquelle a porté l’infraction ou la tentative d’infraction, de la confiscation du corps du délit et de la confiscation des moyens utilisés pour la fraude.
La juridiction peut, en outre, prononcer pour une durée n’excédant pas cinq ans l’une ou l’ensemble des peines suivantes : l’interdiction de faire des opérations de change et de commerce extérieur, l’exclusion des marchés publics, l’interdiction de faire appel public à l’épargne et l’interdiction d’exercer l’activité d’intermédiaire en bourse.
Lorsque, pour un motif quelconque, les objets passibles de confiscation n’ont pu être saisis, ou ne sont pas représentés par la personne morale susmentionnée, la juridiction compétente doit, pour tenir lieu de confiscation, prononcer une condamnation pécuniaire égale à la valeur de ces objets.

◗ Art. 41. – Sont considérés comme auteurs tous ceux qui, personnellement, ont pris une part directe à l’exécution de l’infraction, et tous ceux qui ont provoqué à l’action par dons, promesses, menaces, abus d’autorité et de pouvoir, machinations ou artifices coupables.

◗ Art. 42. - Sont considérés comme complices d’une infraction ceux qui, sans participation directe à cette infraction, ont, avec connaissance, aidé par tous moyens ou assisté l’auteur ou les auteurs de l’action dans les faits qui l’ont préparée ou facilitée, ou qui l’ont consommée. 

VIII. Agents habilités à constater l’infraction de change
Aux termes de l’article 7 de l’ordonnance n°96-22 du 9 juillet 1996 susvisée, les agents ci-après désignés sont habilités à constater les infractions à la législation et à la réglementation des changes et des mouvements de capitaux de et vers l’étranger : les officiers de police judiciaire, les agents de douanes, les fonctionnaires de l’inspection générale des finances, nommés par arrêté conjoint du ministre de la Justice et du ministre chargé des Finances, selon des conditions et modalités définies par voie réglementaire, les agents assermentés de la Banque centrale exerçant au moins les fonctions d’inspecteur ou de contrôleur nommés selon des conditions et modalités fixés par voie réglementaire, les agents chargés des enquêtes économiques et de la répression de la fraude, nommés par arrêté conjoint du ministre de la Justice et du ministre du Commerce suivant des conditions et modalités définies par voie réglementaire.
Les procès-verbaux rédigés par ces agents sont transmis, immédiatement, au procureur de la République territorialement compétent ; une copie est transmise au comité de transactions, au ministre chargé des Finances et au gouverneur de la Banque d’Algérie.

IX. Procédure en matière d’infraction de change et de transaction
 
A) Procédure en matière d’infraction de change
Elle ressemble à celle utilisée en matière d’infraction douanière. Elle se déroule en trois phases : la recherche de la preuve, la constatation et la poursuite de l’infraction de change.
Concernant la recherche de la preuve, elle est effectuée par les agents habilités par l’article 7 de l’ordonnance n°96-22 susvisée, lesquels disposent de trois droits : le droit d’arrestation des personnes (Cf. art. 14, CPP), le droit de visite domiciliaire (Cf. art. 8 bis de l’ordonnance précitée) et le droit de se faire communiquer tous documents et de saisir tous objets passibles de confiscation (Cf. art. 8 bis de la même ordonnance).
S’agissant de la constatation de l’infraction de change, elle se réalise dans les conditions fixées par la loi de finances complémentaires pour 2010 et le décret exécutif n°97-257 du 14 juillet 1997, modifié par le décret exécutif n°11-34 du 29 janvier 2011, déterminant les formes et modalités d’élaboration des procès-verbaux de constatation de l’infraction des changes et des mouvements de capitaux de et vers l’étranger (rédaction de procès-verbaux, enquête, etc.).
Quant à la poursuite de l’infraction de change, c’est le procureur de la République sur saisine de l’administration des douanes, ou de la banque d’Algérie, qui met en œuvre et exerce l’action publique. 
En vertu de l’article 6 du code de procédure pénale, les événements suivants mettent fin aux poursuites : le décès du prévenu, la prescription, l’amnistie, l’abrogation de la loi pénale, la chose jugée et la transaction.

B) Procédure en matière transactionnelle
Beaucoup de litiges de change sont réglés par voie transactionnelle qui est la procédure de droit commun de règlement de tels litiges. Le règlement des litiges cambiaux par voie transactionnelle nous interpelle au sujet des textes régissant la transaction, la procédure à mettre en œuvre et les effets juridiques de la transaction. 

C) Procédure de la transaction
Selon Dr Ahcène Bouskia, “la transaction n’est qu’une possibilité de règlement du contentieux ; elle n’est ni un droit pour le contrevenant, ni une obligation pour l’administration, ni une procédure préalable à toute poursuite”.
Il est admis que la transaction se fait à la demande du justiciable et ce, conformément aux modalités et conditions fixées par les textes visés ci-dessus.
Cette demande implique le dépôt par l’infracteur d’une caution représentant 200% du corps du délit et la reconnaissance expresse de l’infraction par le contrevenant. De plus, la demande peut porter sur toute infraction de change et émaner de l’auteur de l’infraction ou de son représentant légal. Elle doit être introduite à compter du jour de la constatation de l’infraction auprès soit du président du Comité local des transactions lorsque la valeur du corps du délit est égale ou inférieure à 500 000 DA, soit du président du Comité national des transactions lorsque la valeur du corps du délit est supérieure à 500 000 DA et égale ou inférieure à 20 000 000 DA.
La transaction n’est pas possible lorsque la valeur du corps du délit est supérieure à 20 millions de dinars, quand le contrevenant a déjà bénéficié d’une transaction, quand il y a récidive et lorsque l’infraction est connexe à une infraction du blanchiment d’argent, de financement de terrorisme, de trafic illicite de stupéfiants, de corruption, de crime organisé ou de crime organisé international.

D) Effets de la transaction
La transaction éteint l’action publique lorsque les obligations en découlant sont totalement exécutées ; elle a l’autorité de la chose jugée.

Conclusion
Il y a trop de textes législatifs et réglementaires applicables à l’infraction de change, d’où la nécessité pour le législateur de leur faire un bon toilettage, ce qui facilitera la tâche aux voyageurs, aux avocats, aux magistrats, aux agents habilités à constater cette infraction, aux opérateurs économiques, aux enseignants, aux apprenants, etc. 
Par le biais de cette contribution, il est question de sensibiliser le voyageur sur la sévérité des sanctions qu’il risque de subir en cas d’absence ou de fausse déclaration en douane.
À travers cette contribution, il est question également de participer à la formation des professionnels concernés et à la lutte contre le transfert illicite de capitaux à l’étranger.

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