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Les falsificateurs de l’histoire de l’Algérie

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Mahieddine KHELIFA Publié 13 Juin 2021 à 23:28

Par :  Mahieddine KHELIFA 
AVOCAT

Les axes d’attaque de ces falsificateurs se résument en fait à dénigrer l’Algérie en profitant de l’inculture de la majorité des youtubeurs pour inoculer leur venin en soutenant que “l’Algérie n’a jamais existé et que même son nom est une création de la France”.

Dans leurs interventions sur l’histoire de l’Algérie, les propagandistes Bernard Lugan, raciste d’extrême droite, Alain Juillet, ex-agent du Sdece, tous deux nostalgiques de l’Algérie française, et Eric Moshe Zemmour, sayan au service du B’nai Brith et du Mossad, soutiennent que l’Algérie, par opposition au Maroc et à la Tunisie, est une création de la France et qu’elle n’a pas d’histoire. Cette falsification de l’histoire est tellement grossière qu’il faut se demander quels sont les mobiles réels qui poussent ces propagandistes à vomir leur haine sur l’Algérie. 

Le B’nai Brith à la manœuvre
Pour Bernard Lugan et Alain Juillet, les mobiles de cette campagne anti-algérienne s’expliquent aisément : ils sont motivés par un intérêt pécuniaire certain, ajouté à un esprit de revanche. Leur objectif caché est l’incitation à la division des peuples frères d’Algérie et du Maroc pour permettre à l’ancienne puissance coloniale de continuer à tirer les marrons du feu. 
Quant à Eric Moshe Zemmour, sa motivation est d’une autre nature. Moshe Zemmour remplit une mission idéologique pour le compte du B’nai Brith, qui est la plus influente et plus importante organisation juive mondiale (67 loges en France et plus de 700 000 membres dans le monde). Il est secondé dans cette mission par William Goldnadel, Elisabeth Levy et autres sayanim pour :
• Tisser et renforcer les liens entre la communauté juive de France et la droite ou l’extrême droite aux dépens des Français de confession musulmane.
• Ouvrir une autoroute à l’extrême droite pour les futures élections présidentielles ou législatives en faisant croire au danger d’une guerre civile en France.

Pour mener à bien cette mission, les sayanim Vincent Bolloré, propriétaire du média C-News, (dont la grand-mère, Nicole Goldschmit, fut agent du Sdece, chargée des relations avec le Mossad), et Serge Nedjar, directeur général du même média, sont mis à contribution pour concrétiser les objectifs qui leur ont été assignés par le B’nai Brith, dont ils sont membres.

Un très riche passé historique
Quoi qu’en disent ces propagandistes, l’Algérie a un très riche passé préhistorique qui remonte à l’aube de l’humanité. Les découvertes d’Aïn Bouchrit, 2,4 millions d’années, et de l’homme de Tighennif, 1 million d’années, comptent parmi les sites les plus anciens d’Afrique et du monde.
Pour ce qui est de l’Antiquité, l’Algérie a vu passer 11 rois berbères, de Gaïa, Massinissa, Micipsa à Juba 1er, en passant par Jugurtha, qui ont régné de - 206 à - 49 av. J.-C. Cette dynastie berbère est née plus de 6 siècles avant l’apparition de la France, qui a vu les Mérovingiens, venus de Germanie, s’installer en Gaule ou la dynastie des Carolingiens faire de même près de 10 siècles plus tard.

Ces mêmes propagandistes occultent l’apport considérable de l’un des plus importants pères de l’Église, l’Algérien saint Augustin (354 à 430) né à Thagaste, actuelle Souk Ahras, et mort à Hippone (actuelle Annaba). Saint Augustin fait partie non seulement de l’histoire de la chrétienté, mais aussi du patrimoine historique algérien.

En fait, les allégations mensongères de ces propagandistes que sont Bernard Lugan, Eric Moshe Zemmour ou Alain Juillet sont démenties par les écrits des historiens Tacite, Tite Live, Pline, Procope, Polybe, Ibn Khaldoun, C. A. Julien, Stéphane Gsell, Gabriel Camps… qui témoignent du riche passé historique de l’Algérie bien avant les dynasties mérovingienne, carolingienne ou même capétienne, qui ont régné plusieurs siècles plus tard sur ce qui devait devenir la France.

Les axes d’attaque de ces falsificateurs se résument en fait à dénigrer l’Algérie en profitant de l’inculture de la majorité des youtubeurs pour inoculer leur venin en soutenant que “l’Algérie n’a jamais existé et que même son nom est une création de la France”. À les croire, l’Algérie “était un pays miséreux dont la population était analphabète”, pour justifier, a posteriori, sa colonisation.

Or, il suffit de rappeler que les plus anciens documents cartographiques ont inscrit la ville d’Alger de différentes façons : Alguer (1275), Algezira (1300), Zizera (1318), Zizeria (1367), Zizara (1409), Aurger (1339) chez Angelino Dulcert. Dans ces mêmes documents se trouve le nom d’Alger (dès le XIVe siècle) qui était prononcé Aldjère, voire “Algir”, sur la mappemonde de Martin Béhaïm (à la fin du XVe siècle) et, enfin, Alger chez Sébastien Cabot (au milieu du XVIe siècle).

Les vérités cachées par les propagandistes
On aurait pu comprendre, à la limite, que cette haine téléguidée par le B’nai Brith et visant l’Algérie pour raviver le passé colonial vécu entre les deux pays émane d’un membre de la communauté ashkénaze, originaire d’Europe de l’Est et convertie au judaïsme au IXe siècle, qu’Arthur Koestler désignait comme étant la 13e tribu par opposition aux 12 tribus d’Israël. 
Mais c’est à un sépharade originaire d’Algérie que le B’nai Brith a confié la mission de cracher son venin sur le pays de ses ancêtres. Ce faussaire de l’histoire soutient que “les juifs d’Algérie ont abandonné la djellaba, qu’ils étaient misérables et mangeaient des nèfles… et (qu’)ils étaient contents de devenir français”. (Le voici le clin d’œil du B’nai Brith à la droite française.)

Or, l’histoire édulcorée de la communauté juive, contente de prendre le chemin de la France évoquée par Moshe Zemmour, est une contrevérité flagrante et un mensonge éhonté. Adolphe Crémieux, membre du B’nai Brith, plaidait déjà pour la naturalisation des juifs d’Algérie en 1860 lors de la défense de deux négociants israélites à Mostaganem, accusés de faux en écriture.

Dans sa remarquable thèse de doctorat sur Le Royaume arabe, Annie Rey Goldzeiguer, spécialiste de l’Algérie coloniale, et par ailleurs de confession juive, relève que suite à la promulgation du Sénatus-Consulte de 1865 qui déclarait français tout indigène, (musulman ou israélite), la grande masse des juifs algériens a refusé de se naturaliser malgré les campagnes ardentes menées dans certains consistoires à coups de circulaires. 

En novembre 1867, soit deux années après la promulgation du sénatus-consulte et 37 années après la colonisation de l’Algérie, seuls 278 israélites demandèrent à être naturalisés sur un total de 33 952. Il fallait compter en réalité seulement 115 juifs algériens. Le reste étant des juifs marocains ayant opté par intérêt pour la nationalité française… (p. 429). 

On est donc très loin de l’affirmation de Moshe Zemmour qui, voulant séduire la droite française, proclame que “les juifs d’Algérie étaient contents de prendre le chemin de la France”, puisque, selon Annie Rey Goldzeiguer, c’est 0,3% de la population juive qui a pris la nationalité française. Cela, sans parler du fait que ce pourcentage de 0,3% ne prend pas en compte les juifs algériens des territoires du Sud.

Quant à l’allusion aux “Algériens en guenilles qui mangeaient des nèfles pour qui la France est venue en mission civilisatrice”, il est également utile de rappeler à cet historien faussaire que la dépossession des Algériens de leurs terres, de leurs réserves céréalières et de leurs troupeaux a poussé la population algérienne dans le gouffre de la misère. 
En 1830, note Thomas Campbell, tous les Algériens savaient lire, écrire et compter, “et la plupart des vainqueurs, ajoute la commission de 1833, avaient moins d’instruction que les vaincus”.
En 1835, note le même Campbell, il y avait plus de cent écoles primaires à Alger, 86 à Constantine, 50 à Tlemcen. Alger et Constantine avaient chacune six à sept collèges secondaires, et l’Algérie était dotée de dix zaouïas (universités). 
Voici donc, très succinctement, les vérités amères que les propagandistes que sont les Moshe Zemmour, Bernard Lugan ou Alain Juillet cachent à leurs auditeurs dans leurs interventions sur l’histoire de l’Algérie pour tenter de camoufler, a posteriori, l’entreprise de destruction économique sociale et culturelle menée, canon tonnant, par la France dès les premières années de la colonisation…

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