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Plaidoyer pour un contrat gagnant-gagnant

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Mourad KEZZAR Publié 19 Octobre 2021 à 09:53

Par : Mourad KEZZAR
Consultant – Formateur PME/PMI
Cadre dirigeant secteur hôtelier public

Le moment est venu pour que les services du ministère du Tourisme et de l’ONT se penchent sur la confection d’un contrat hôtelier cadre régissant les hôteliers et les agents de voyages activant sur le marché interne algérien. Ce contrat hôtelier se matérialisera par une procédure qui fait actuellement défaut chez les hôteliers algériens.

Pour survivre à la crise de Covid-19, hôteliers et agents de voyages algériens n’avaient aucune autre solution, cet été, que de travailler ensemble sur le marché interne. Ce fut une véritable lune de miel qui rompt avec quatre décennies d’incompréhension et de rupture offrant une chance à saisir pour transformer ce rapprochement conjoncturel en une relation commerciale pérenne. Ici, une plaidoirie pour un contrat hôtelier-agent de voyages gagnant-gagnant.

Un win to win hôtelier – agents de voyages
Pour des raisons politiques et économiques, l’hôtelier algérien a pris l’habitude de s’occuper lui-même de la commercialisation directe et exclusive de ses chambres. Même après l’ouverture économique du début des années 1980, il a gardé cette pratique. Pourtant, d’un tel délestage, l’hôtelier peut tirer au moins quatre avantages : bénéficier d’un réseau de distribution peu coûteux, d’un référencement gratuit, avoir des commandes à terme et augmenter le taux de captage restauration. 
En effet, en cédant aux agences de voyages des chambres à commercialiser, l’hôtelier bénéficie et à faible coût d’un réseau de distribution à longueur d’année. Figurer dans le catalogue d’une agence de voyages est une chance pour l’hôtelier. Dès que l’hôtel est référencé par les agences, il est visible sur les supports publicitaires de ces dernières. Une partie des agences de voyages algériennes programme les voyages 15, voire 30 jours à l’avance. Disposer d’une demande quasi ferme sur une dizaine de chambres et 20 jours à l’avance est une aubaine pour l’hôtelier. Cette clientèle des agences de voyages réserve au minimum en demi-pension, ce qui est une aubaine pour les hôteliers qui souffrent, souvent, du faible taux de captage restauration. Pour sa part, l’agent de voyages tire, d’un partenariat avec l’hôtelier, au moins trois avantages : étoffer son catalogue, maîtriser la production et profiter d’importantes remises ; pour l’agent de voyages, avoir des contrats avec des hôteliers, c’est enrichir son catalogue des offres hébergements secs. Pour les agences de voyages lancées dans le montage des voyages, un contrat avec un hôtelier leur permet d’acheter le moment venu le plus grand nombre d’hébergements dans les meilleures conditions de prix et de paiement. Ces hébergements seront un des éléments de leurs packages (hébergement, transport, restauration, visites…). Ces agences de voyages se voient accorder des remises à même de rendre leurs offres compétitives.

Un contrat pour le meilleur et pour le pire
Après avoir cohabité ensemble durant l’été 2021, l’hôtelier et l’agent de voyages algériens sont à l’heure des bilans, et quelles que soient les pertes à l’échelle microéconomique, macroéconomiquement, le tourisme algérien interne est gagnant et l’urgence est de sceller cette rencontre estivale par un contrat pour le meilleur et pour le pire, qui définira les droits, ainsi que les devoirs de chaque partie, et traitera les aspects commercial, financier et litigieux. Le moment est venu pour que les services du ministère du Tourisme et de l’ONT se penchent sur la confection d’un contrat hôtelier cadre régissant les hôteliers et les agents de voyages activant sur le marché interne algérien. Ce contrat hôtelier se matérialisera par une procédure qui fait actuellement défaut chez les hôteliers algériens. Elle doit s’articuler autour des 4 éléments que sont l’hôtelier, l’agent de voyages, l’allotement et la rétrocession : 
- L’hôtelier, en sa qualité de fournisseur d’hébergement à but lucratif et, éventuellement, d’autres prestations touristiques qui vont avec, telles que les transferts, les repas, les loisirs… 
- L’agent de voyages, en sa qualité de prescripteur qui a une influence sur la sélection dudit hôtel. 
- L’allotement : contingent qui consiste en la mise par l’hôtelier, via le prescripteur, à la disposition d’un client d’une quantité de chambres sur une période définie. 
- La rétrocession, en tant que principe selon lequel l’hôtelier et le prescripteur définissent une date et une heure au-delà de laquelle les hébergements non confirmés par un bon de commande ferme seront remis à la vente par l’hôtelier. 

Contrat général et contrat spécifique 
Il est préférable pour les hôteliers algériens de mettre à la disposition des agents de voyages deux types de contrat hôtelier : le premier dit contrat général prescripteur à destination des agences de voyages de la place, le second dit contrat hôtelier spécifique à destination des agences de voyages candidates aux allotements. Le contrat général s’adresse à l’ensemble des agents de voyages de la place intéressés par la commercialisation de l’hébergement sec de l’établissement hôtelier. En plus des informations générales et commerciales relatives à l’établissement hôtelier, ce type de contrat décline les tarifs publics de base, soit par personne en ½ double, en single et en occupation triple, ainsi que par type d’hébergement (chambres standards, suites, appartements, bungalows, vue sur mer, vue sur jardin…). Il fixe aussi le mode de réservation, la valeur de la commission perçue par l’agent de voyages, le type de voucher, le circuit du voucher et les modalités de paiement. 
Le contrat spécifique, quant à lui, s’adresse aux agents de voyages prescripteurs demandeurs d’allotements, c’est-à-dire qui sollicitent la réservation d’une quantité donnée de chambres, pour un nombre donné de personnes, pour une période déterminée, avec une date d’arrivée et une date de départ. Quand ces réservations sont étalées sur plus d’une période, on parle de sessions de séjour. Ainsi, en plus des informations contenues dans le contrat général prescripteur, le contrat spécifique fixe la quantité des hébergements en allotement, le nombre de sessions, les dates d’arrivée et de départ, le nombre de jours et nuits de séjour, les modalités de rétrocession, la tarification et les conditions financières. 
Ce type de contrat sied aux agents de voyages dits tour-opérateurs (TO), c’est-à-dire organisateurs de voyages sous forme de package.

La rémunération et les avantages accordés à l’agent de voyages
L’agent de voyages sous contrat avec l’hôtelier rémunère ses prestations de deux manières, selon qu’il est agence distributrice ou agence productrice appelée tour-opérateur (TO). L’agence distributrice des hébergements secs ou même de packages montés par l’hôtelier est rémunérée par une commission définie selon la politique commerciale et tarifaire de ce dernier. Sur le marché algérien, souvent elle est de 10%, amputée du tarif public affiché. Dans la profession, le taux est de 8%. Le TO bénéficie, lui, d’une remise qui peut aller de 10 à 40% du tarif public, selon la politique commerciale et tarifaire de l’hôtelier, et est souvent dictée par la cadence des passages enregistrés l’exercice antérieur. Le TO rémunère ses prestations en appliquant une marge aux coûts de revient de ses packages. Le niveau de cette marge dépend de la politique commerciale du TO. Les TO bénéficient, usuellement, de la gratuité, selon la dimension des groupes composant chaque session, telle que la prise en charge des guides, chauffeurs et accompagnateurs. 

Des vouchers adaptés au contexte algérien
Des 4 types de voucher (bons d’échange entre hôteliers et agents de voyages) qui sont utilisés dans le monde, soit le voucher simple réservation, le voucher plein tarif, le voucher Déposit et le voucher forfait, seul ce dernier est utilisé en Algérie. Or, en moyenne et basse saison estivale, ainsi que pour la vente des hébergements secs, le voucher simple réservation et le voucher Déposit répondent au contexte algérien sans être contraignants pour les deux parties. Un contexte où l’agent de voyages ne présente aux tiers aucune garantie financière (voir ma contribution dans le quotidien Liberté édition du 20 janvier 2019). Le voucher simple réservation est un bon de réservation représentant un justificatif de réservation. Le client s’acquitte de l’ensemble de sa facture chez l’hôtelier qui, lui, rétrocède à l’agent de voyages sa commission. Le voucher Déposit est à la fois un bon de réservation et l’expression d’une valeur correspondant à des arrhes versées par le client auprès de l’agent. Il constitue une garantie complémentaire pour l’agent et l’hôtelier. Le client paiera à l’hôtelier l’ensemble des prestations qu’il aura consommées, moins la valeur des arrhes. L’agence reversera à l’hôtelier la valeur du Déposit minorée de sa commission. Souvent le montant du Déposit correspond à celui de la commission. Cette contribution est une plaidoirie pour un contrat hôtelier à même de rassurer et d’encourager hôteliers et agents de voyages algériens à faire plus de business ensemble.

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