Culture “Le Nouvel Obs” consacre un dossier spécial à l’Algérie suite au rapport Stora

Des écrivains, intellectuels et artistes algériens témoignent

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Ali BEDRICI Publié 06 Février 2021 à 22:33

© D. R.
© D. R.

Au lendemain de la remise du Rapport de Benjamin Stora sur “les mémoires de la colonisation et de la guerre d’Algérie”, Le Nouvel Observateur a consacré à l’Algérie un dossier spécial dans lequel la parole est donnée à 27 personnalités en Algérie et en France.

“Environ sept millions de personnes auraient, en France, un lien avec l’Algérie… Le cessez-le-feu du 19 mars 1962 qui a mis fin à presque huit ans de guerre devait tourner la page de 132 ans de colonisation”, écrit le magazine, qui ajoute : “Mais dans les têtes, dans les corps, la guerre ne s’est pas tue…” Le rapport étant comme “un pas vers la réconciliation”, le journal  est allé “ausculter les mémoires sur les deux rives. Écrivains, artistes, intellectuels, ils racontent leur histoire algérienne”.

Dans Mon Algérie, l’écrivain Boualem Sansal dénonce “l’instrumentalisation par les politiques de la mémoire de la période coloniale”. De son côté, la chanteuse et actrice Camélia Jordana, d’origine algérienne, petite-fille de moudjahidine, se dit fière d’être la petite-fille de résistants : “J’ai ça dans mon ADN. Il y a, malgré moi, un sentiment d’injustice, de révolte, qui a besoin de s’exprimer.”

Alice Zeniter, romancière d’origine algérienne, raconte “le silence de son père concernant son arrivée en France et le rôle que la fiction a joué plus tard dans sa réappropriation du pays” auquel elle était restée “indifférente” pendant longtemps, suivant le repli de son père. “On a perdu les liens avec la famille là-bas”, lui répondait-on quand elle demandait pourquoi la famille n’allait pas en Algérie. L’article de Maïssa Bey est chargé d’émotions. 

Elle rapporte qu’“une nuit, lors de la grève décrétée par le FLN en février 1957, suite à une dénonciation, des militaires français ont fait irruption chez nous. Après avoir tout saccagé, ils ont emmené mon père ainsi que sept de ses compagnons, dont son frère et son cousin”.

Ces hommes “furent torturés pendant 48 heures, puis exécutés et jetés dans une fosse commune. C’est ainsi que la mort, la guerre, et la peur sont entrées dans ma vie”. “Ce sont la guerre d’Algérie et la prise de conscience de la brutalité de la colonisation qui ont déterminé ce que je suis aujourd’hui”, précise-t-elle.

“L’Algérie est le pays de ma mère Leïla, née à Oran en 1939, et de mon grand-père maternel qui a vu le jour en 1907 à Dombasle, non loin de Mascara. Il s’appelait Khermiche Ould Cadi. Il s’est éteint en 1994 à l’âge de 87 ans”.

C’est Arnaud Montebourg qui nous apprend ainsi ses origines algériennes. Ce grand-père maternel a participé à la Seconde Guerre mondiale. L’ancien ministre raconte aussi “l’arrivée de parachutistes dans la ferme de son grand-père, où des armes avaient été cachées par le Front de libération nationale”.

Nina Bouraoui, romancière française dont le père est originaire de Jijel, écrit : “La mémoire de la guerre d’Algérie m’a été transmise par ma mère française qui raconte dès mon enfance l’OAS (Organisation armée secrète), la torture, la résistance, son engagement intellectuel depuis la France, la libération, l’indépendance de l’Algérie, ses espoirs quand elle arrive dans un pays qui va se reconstruire et aussi une certaine désillusion je crois, mais jamais de regrets.

Plutôt la transmission de l’idée de liberté, de dignité d’un peuple qui a gagné son indépendance.” Dans sa contribution, la mathématicienne Michèle Audin, fille de Maurice Audin, née à Alger en 1954, rappelle les conditions de vie des Algériens : “… Dans la rue, les uns tutoient les autres ; au marché, les unes font porter leur couffin par les autres ; sur les trottoirs, ces autres - des gamins - cirent les chaussures des uns. Je me souviens de la révolte de ma mère devant ce scandale.”

Benjamin Stora résume ainsi son rapport : “Il faut, modestement, ouvrir des passerelles, des ponts, sur des sujets encore terriblement sensibles, pour avancer ensemble.” Cependant, ajoute-t-il, “il faut reconnaître les exactions de la guerre d’Algérie pour apaiser les mémoires”.
 

Ali BEDRICI

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