Culture Rues baptisées aux noms de Kateb Yacine et de Mohammed Dib

Deux géants de la littérature algérienne à Saint-Denis

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Ali BEDRICI Publié 25 Juillet 2021 à 18:54

© D.R
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À quelques encablures de l’université Paris 8 (Saint-Denis - 93), se trouve la rue Henri-Barbusse, une artère aussi longue qu’animée. À hauteur du petit square de Clovis-Hugues prend naissance la rue Métairie, aux immeubles anciens. Quelques pas, et le promeneur découvre, sur sa gauche, un ensemble d’habitations récemment construites sur un à deux étages. 

L’aspect de résidence s’impose, l’atmosphère de calme aussi. Parmi les rues créées dans ce nouveau quartier, deux se rejoignent en un angle droit : la rue Mohammed-Dib et la rue Kateb-Yacine. Les élus de Saint-Denis qui administrent une population d’origines diverses, dont une forte communauté issue de l’émigration algérienne, ont tenu à rendre hommage à ces deux géants de la littérature algérienne francophone. Pour l’anecdote, voyant qu’un sticker couvre le nom de Dib, et comme la plaque est assez haute, nous avons sollicité l’aide d’un jeune habitant du quartier qui a détaché l’adhésif à l’aide d’un canif. 

À notre question sur ses origines, il répondit prestement : Algérie, avant de préciser : Maghnia. Quelle coïncidence ! Un jeune originaire de Tlemcen pour découvrir, au propre comme au figuré, la plaque de rue de l’autre enfant de Tlemcen, le grand auteur Mohammed Dib. Connaissait-il l’écrivain ? Hélas, non. Nous lui rappelons que Dib est un écrivain né à Tlemcen en 1920 et qu’il a écrit près d’une quarantaine d’œuvres dont certaines sont majeures, comme les romans qui composent sa célèbre trilogie “Algérie” : La Grande Maison (1952), L’Incendie (1954) et Le Métier à tisser (1957), tous trois parus aux éditions du Seuil. Mohammed Dib a également à son actif plusieurs recueils de nouvelles, de poésie et des pièces de théâtre. Il a reçu de nombreuses distinctions pour son œuvre devenue universelle. Deux romans de la trilogie “Algérie”, L’Incendie et La Grande Maison, ont été portés à l’écran pour la télévision algérienne par Mustapha Badie dans les années 1972 sous le titre El Harik. La série de douze épisodes a eu un immense succès et a marqué toute une génération d’Algériens. Mohammed Dib s’est éteint le 2 mai 2003 à l’âge de 82 ans et repose au cimetière de La Celle-Saint-Cloud. 

Le jeune homme demeure un moment pensif devant ce qu’il vient d’apprendre sur Mohammed Dib, puis, regardant vers le bout de la rue, demande : et le monsieur de l’autre rue ? Kateb Yacine est un grand écrivain qui a marqué la littérature algérienne. Il est né en 1929 à Constantine, dans une famille originaire de la région de Guelma. Poète, dramaturge et romancier, il a écrit des œuvres majeures. On peut citer Soliloques (poésie, 1946), Le Cercle des représailles (théâtre, 1959), L’Homme aux sandales de caoutchouc (théâtre, 1970), Le Polygone étoilé (roman, 1966) et Mohamed prends ta valise (théâtre, 1971). 

De tous ses livres, dont la plupart ont paru aux éditions du Seuil, “c’est le roman Nedjma, par la complexité de sa quête et la superbe échevelée de son écriture, qui fonde une vraie maturité littéraire”. “Durant la guerre de Libération, Kateb, harcelé par la police française, connaît une longue errance, invité comme écrivain ou subsistant à l’aide d’éventuels petits métiers en France” et ailleurs en Europe. Après l’indépendance, il se distingue surtout par un riche parcours dans le théâtre engagé. Kateb Yacine s’est éteint le 28 octobre 1989 à Grenoble, à l’âge de 60 ans, et est enterré au cimetière d’El-Alia, à Alger. 

Alors que la discussion avec le jeune homme bat son plein, un de ses amis s’approche. Il reprend à son endroit ce qu’il avait retenu sur les deux écrivains algériens, avant d’ajouter : “Nous ignorions que notre quartier était encadré par deux illustres personnalités de chez nous. Désormais, à chaque fois que leurs noms seront évoqués, l’émotion, la fierté et un sentiment de reconnaissance envahiront nos cœurs et nos esprits.” 

ALI BEDRICI

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