Culture Orchestre chaâbi de Montréal

Qaâdat et sonorités chaâbi au pays du froid

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Yahia ARKAT Publié 16 Avril 2021 à 18:52

© D.R
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Composé de 21 membres dont une femme, l’Orchestre chaâbi de Montréal (OCM) a pour objectif de perpétuer et de promouvoir ce patrimoine culturel et musical d’expression arabo-berbère.

À l’origine, l’idée est née d’une rencontre informelle entre deux mélomanes amoureux du melhoun : l’un a évolué sous les ailes de maîtres du chaâbi algérois, l’autre est un érudit qui sait lire la musicalité des mots bien agencés du patrimoine immatériel, encore d’une vitalité extraordinaire. Mourad Taleb et Lamine Djenki ont associé efforts et génie pour donner sens à leur violon d’Ingres. Le premier a accompagné des noms illustres du chaâbi, à l’image de Amar Ezzahi, un artiste flamboyant, comme il était souvent violoniste lors des spectacles de Mohamed Fellag, alors que le second, profond mélomane, a eu à assister des chouyoukh dans l’exégète des textes poétiques. C’est, par exemple, lui qui a participé aux travaux qui ont retracé le parcours de Sidi Kaddour El-Alami dans sa célèbre pièce El-Meknassia, un texte connu pour sa force de persuasion, soutiennent les membres fondateurs. C’est au cours de soirées improvisées que l’ambition s’est concrétisée en se transformant en projet.

Au départ, il était juste question de noyer la nostalgie du pays natal dans le cœur et loin des yeux. Peu à peu, l’envie d’aller plus loin a donné de la suite dans les idées, sans doute inspirées des notes d’une musique qui donne du baume au cœur dans ce pays froid. L’Orchestre chaâbi de Montréal (OCM) est né, se donnant comme objectif de perpétuer et de promouvoir ce patrimoine culturel et musical d’expression arabo-berbère. Composé de 21 membres dont une seule femme, l’orchestre utilise une noria d’instruments de musique. Comment travaille ce groupe de musique dans cette contrée pas habituée à ce genre de sonorités ? La méthode est simple, réglée comme du papier à musique : le chef d’orchestre procède à la sélection de textes qui passeront en suite sous le “bistouri” du spécialiste Djenki, qui traque les erreurs de transcription et ajuste les différents types de rimes. “Une fois les textes validés, je leur appose une mélodie dans le mode qui convient le plus à l’émotion suscitée par les mots pour déterminer le rythme approprié”, explique le chef d’orchestre Mourad Taleb. 
Et le résultat ne se fait pas attendre. Les productions de l’OCM rappellent à bien des égards les qaâdat de La Casbah. Comme le chaâbi est de tradition orale, les musiciens du groupe apprennent les textes et les mélodies par cœur. Pour ce faire, il fallait répétition sur répétition. 

Chaâbi sous la neige
L’OCM constitue un groupe musical prisonnier en Amérique du Nord. “Nous sommes le seul groupe chaâbi. Par contre, il y a un orchestre de musique andalouse”, indique M. Taleb. Comme c’est un genre de musique porteur de chaleur humaine, le chaâbi incite ainsi à la célébration, y compris quand le mercure atteint les abysses des températures négatives par un temps d’hiver polaire. Malgré le jeune âge du groupe, il a fait quand même des sorties honorables à l’occasion d’événements musicaux qui pullulent dans la métropole québécoise, une place dans des festivals à la renommée internationale. Ainsi, l’OCM a fait notamment l’ouverture du festival Orientalys en 2019, avant de participer à un spectacle au collège Vanier de Montréal. 

D’autres spectacles avec un auditoire restreint ont également été organisés. Ces sorties ont connu un “franc succès” pour l’orchestre, très vite adopté par le public maghrébin de Montréal. Mais l’élan pris par le groupe de musique chaâbi a été contrarié par la pandémie de Covid-19, qui a mis à l’arrêt le monde entier, le secteur de la culture et des spectacles compris. “La pandémie a mis sur pause nos projets”, déplorent les fondateurs de l’OCM. Mais ces derniers ont les yeux rivés sur l’avenir. Car le châabi a bel et bien un avenir, y compris à mille lieues de la Casbah algéroise. “Le chaâbi qui a voyagé à travers le monde s’agence bien à une multitude de styles musicaux”, analyse M. Taleb. L’OCM est devenu aussi, un peu malgré lui, une adresse incontournable pour les artistes algériens de passage à Montréal. Cheikh Sidi Bémol, Abdelkader Chaou, Hamidou, Naïma Dziria, Nadia Baroud, Adlen Gergani, Mourad Djaâfri, Saâdane Benbabaali et Cheb Anouar, entre autres, ont participé aux répétitions de l’OCM, dont les fondateurs promettent de faire un retour en force post-pandémie de Covid-19. Une manière de dire que le monde de la culture, des arts et de la musique, bref le monde tout court, survivra au virus… 

Yahia Arkat

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