Des Gens et des Faits 71e partie

L’ éternelle blessure

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Taos M’HAND Publié 07 Mars 2021 à 22:50

Résumé :   Anissa réalise que son oncle est un ange envoyé du ciel. Grâce à lui, elle peut enseigner au village. Elle s’y rend avec des collègues, des parents éloignés du beau-père. Ce dernier n’apprécie pas, mais il ne peut pas lui interdire de travailler. Anissa propose à sa belle-mère d’inscrire les filles au centre culturel pour qu’elles apprennent un métier. Fathma apprécie l’attention. Elle demande à Anissa d’aller voir un médecin.

Quelques semaines plus tard, elle est sujette à un malaise. Elle est emmenée à l’infirmerie, puis à la polyclinique. Le médecin qui l’interroge et l’examine confirme qu’elle est enceinte. Elle lui prescrit des vitamines et du fer ainsi qu’un médicament pour les nausées. Je lui recommande de se reposer. 
-Je ne veux pas arrêter l’enseignement maintenant.
-Si vos malaises persistent, il le faudra bien. C’est pour votre bien et celui du bébé, insiste le médecin. D’après mes calculs, vous êtes à votre troisième mois de grossesse. On se revoie dans un mois ou si vous le pouvez, allez voir un gynécologue.
Elle lui remet l’ordonnance et une lettre d’orientation. 
-Incha Allah que tout se passera bien.
Anissa la remercie. Elle pleure de joie, de soulagement. La confirmation de sa grossesse ramène l’espoir en elle. Nedjmeddine, même mort, continue de veiller sur elle et leurs enfants.  
Sa belle-famille est heureuse en apprenant la nouvelle, mais l’instant d’après, tous se mettent à pleurer en réalisant que Nedjmeddine ne sera pas là à la naissance de son enfant. Anissa tente de réconforter sa belle-mère qui ne cesse de verser des larmes. Tout comme elle, elle a espéré et désiré qu’Anissa soit enceinte. Elle souffre de l’absence de son fils. 
-Il ne le connaîtra pas. Mahmoud sera circoncis sans lui, ses enfants vont grandir sans lui, sans son amour, sans sa protection.
-Mais vous êtes là, leur rappelle Anissa. Si nous sommes venus ici, c’est parce que vous êtes sa famille et personne d’autre que vous ne pourra mieux leur parler de lui. Moi, je leur parlerais de lui tous les jours. Ils l’aimeront autant que moi et chériront le moindre souvenir que je leur aurais raconté. Essuie tes larmes, dit-elle à sa belle-mère. Ce n’est pas bon pour toi, pour moi… pour nous. Je t’en prie, prions pour son repos. 
-Allah yerhem echouhada.
Warda vient les voir en fin de journée. Elle aussi pleure en apprenant la nouvelle. 
-C’est de ma faute. Jamais je ne me le pardonnerais. Nous insistions pour qu’il vienne, nous ne nous sommes pas contentés de ta présence. Nous savions que le danger le guettait, nous n’aurions pas dû. Je suis sûre que c’est à cause de moi qu’il est mort et que ses enfants sont orphelins.
-Combien de victimes on compte depuis que ces terroristes ont pris le maquis ? Nous, nous avons perdu Nedjmeddine. Avant lui, il y a eu Djalil et tant d’autres. Est-ce qu’eux aussi se rendaient à une fête ? Non, non, tu n’y es pour rien. Enlève ce poids de ton cœur. Chasse cette culpabilité, sinon tu en tomberas malade.
-Tu es trop gentille avec moi, dit Warda en la prenant dans ses bras. Ça me fait du bien de te parler.
-Essuie tes larmes et fais-moi un sourire. Je suis sûre que ton frère n’aimerait pas te voir pleurer. Quand tu souris, tu me rappelles Nadjmeddine, tu lui ressembles tant. Warda, moi aussi, il me manque. J’ignore d’où je puise la force pour avancer, mais j’ai besoin de votre soutien. Au début, je me demandais comment je vais vivre sans lui. J’ignorais que j’aurais de la force. Mais je sais que je la puise en voyant mes bébés grandir avec votre soutien. J’espère que ma grossesse sera moins pénible. Lorsque j’attendais Mahmoud et Zoubida, j’avais souffert, c’était horrible, mais le résultat en valait le coup.
-Ne t’inquiète pas, nous allons prendre soin de toi.
Heureusement pour elle, cette grossesse est différente de la première où elle passait son temps à vomir. Les nausées ne tardent pas à s’estomper. Elle continue d’enseigner. Quelques mois après, elle est convoquée pour libérer le logement de fonction. Ils partent un week-end à Blida. Ils mettent en vente ce qu’ils ne peuvent pas transporter dans le camion qu’ils ont loué pour le déménagement. Anissa, très émotive, pleure tout en emballant les affaires personnelles de Nedjmeddine. Elle ne laisse personne y toucher, ni même regarder. Ils prennent ce dont ils auront besoin au village. Le reste est vendu sur place aux voisins. Ils ne tardent pas à reprendre la route avant le couvre-feu. Anissa part, se demandant si un jour, elle pourra remémorer le passé, sans en souffrir.

(À SUIVRE)
 T. M. 

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