Des Gens et des Faits 77e partie

L’ éternelle blessure

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Taos M’HAND Publié 15 Mars 2021 à 08:17

Résumé :  Les enfants font tout un tapage en découvrant leurs grands-parents. Mahmoud demande s’ils viennent pour toujours en voyant leurs affaires. Ils ont à peine le temps de s’asseoir que Zoubida veut montrer les photos de son père et d’elle. Elle et son frère se chamaillent. Malgré son jeune âge, elle est très réaliste, leur père est mort. Mahmoud partage le sentiment de leur mère. Tant qu’ils prient pour lui, tant qu’ils parlent de lui, il continuera à vivre dans leur cœur.

Anissa se demande si elle a bien fait de parler autant de Nedjmeddine à ses enfants ? Les a-t-elle perturbés avec ses souvenirs, ses photos et les rares vidéos qu’elle possède ? Lorsqu’ils se sont chamaillés, elle a réalisé qu’ils ont beau avoir le même âge et vécu les mêmes choses, le ressenti est différent. Zoubida est forte de caractère et s’impose de gré ou de force. Tous ceux qui osent la défier à l’école passent un sale quart d’heure, et ils ne s’y reprennent plus. La fillette a souvent été punie et Anissa souvent convoquée. En voyant Mahmoud en pleurs, elle réalise que Zoubida allait avoir des problèmes relationnels dans sa vie, si elle ne se calmait pas. Elle risque de ne pas avoir d’amis. Anissa sent que la situation commence à lui échapper. Elle lui parle, espérant qu’elle comprenne leur vision des choses.
-Ma chérie, tu n’as pas à t’en prendre à ton frère. Si pour toi, ton père est mort, moi, il continue de vivre en moi. Je suis convaincue qu’il est notre ange gardien, ton frère partage mon sentiment. Tu dois l’accepter et respecter les sentiments des autres.
-Un ange, ça ne peut rien faire, crie Zoubida alors que Mahmoud s’accroche à sa mère, en essuyant ses larmes. 
-Quand tu grandiras, tu comprendras. Maintenant, calme-toi. Tes grands-parents sont venus passer du bon temps avec nous. Je ne veux plus que tu nous fasses des scènes pareilles. C’est compris ? Présente tes excuses à ton frère et tes grands-parents.
-Mais je n’ai rien fait ! 
-N’en rajoute pas. Présente tes excuses, après, je ne veux plus t’entendre, sinon tu seras punie. 
-Oh non ! Maman ! Je n’ai rien fait et je vais être punie ? Ce n’est pas juste !
-J’attends toujours. 
La fillette finit par présenter ses excuses, puis va s’asseoir sur son lit et les boude. 
Anissa retourne au salon avec ses beaux-parents, elle est ébranlée en voyant leurs larmes. Ils sont passés de la joie aux larmes en un court instant. Brahem a pris un portrait de Nedjmeddine et le regarde en secouant la tête. 
-C’est vrai ! C’est dur... J’ai mal en le voyant si jeune, si beau… Il avait la vie devant lui. Je ne pourrais pas vivre ici. Tout ça, dit-il d’une voix douloureuse, en montrant les photos, me rappelle qu’il n’est plus là. Ceux qui l’ont tué…Qu’ils soient maudits, qu’ils brûlent ici bas et en enfer comme brûle mon cœur. Regarde tes enfants, eux aussi en souffrent. Tu…Tu devrais les retirer. C’est trop, bezzaf, ce n’est pas bon pour leur moral.
Anissa essuie ses larmes. Personne ne peut la comprendre. 
-Vous n’êtes pas les seuls à être inconsolables. Mon cœur le pleure comme au premier jour, même si je ne verse plus autant de larmes qu’avant. Moi, j’ai besoin de le voir, de lui parler.
Mais sa belle-mère Fathma trouve aussi qu’elle en fait trop.
-Je partage votre douleur. C’est mon fils…J’aime le voir… Mais c’est trop. Je comprends maintenant pourquoi à chaque fois que Warda venait ici, elle retournait chez elle malade de tristesse. Tout lui rappelle son mariage, la mort de Nedjmeddine. Les terroristes l’ont tué, mais elle, elle se croit toujours la cause de sa mort. Mektoub Rabbi. En fait, ce qu’il faut pour mon fils, ce sont des prières pour son repos éternel. Nous avons assez pleuré. Ne dit-on pas qu’on trouble son sommeil éternel à force de le pleurer et de se lamenter ?
-Tu as raison, je vais en retirer quelques un, promet-elle pour détendre l’atmosphère. J’ai du thé prêt, est-ce que vous en voulez ?
Ils ne refusent pas. Anissa va se passer de l’eau sur le visage. Elle sèche ses larmes, puis réchauffe le thé. Elle sort des gâteaux d’une boîte et sort un joli service. Le temps de tout poser sur un plateau, elle retourne au salon. Le téléphone sonne, elle laisse Lila servir ses parents. Elle va répondre, elle soupire en reconnaissant la voix de son amie Sarah qui appelle pour prendre de leurs nouvelles, et aussi pour lui rappeler d’avoir une pensée pour Djalil. Les années ont passé, mais elle ne l’a pas oublié.

 

 


(À SUIVRE)
 T. M. 

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