Résumé : Samir avait le cœur gros. Il craignait un échec de l’intervention et se sentait coupable d’avoir poussé Mordjana à la subir. Cette dernière le rassure. Des médecins lui avaient déjà conseillé de voir un chirurgien. Elle était responsable de ses actes et ne lui en voudra pas en cas d’échec. Le jeune homme est quelque peu rassuré et la quitte en promettant de revenir le lendemain.
Il y avait des libellules autour d’une source de lumière. Des rayons blancs et argentés émanaient d’un soleil qui n’en était pas réellement un, car il n’était pas rond, mais plutôt carré. Mordjana tend un bras et tente de le toucher. En vain. Elle se dit que son regard était trop embrouillé pour distinguer quoi que ce soit et se met à se frotter les yeux pour mieux voir. Mais on dirait que le brouillard persistait. Où se trouvait-elle donc pour affronter autant d’obstacles ?
Sa bouche était sèche et elle aurait volontiers demandé à boire. Un peu d’eau lui aurait fait du bien. Sa gorge aussi la picotait, et elle avait du mal à déglutir. Elle se sentait aussi légère qu’une colombe, mais ne put ni ouvrir totalement ses yeux ni se redresser. Une odeur forte titillait ses narines. Elle avait déjà éternué plusieurs fois, sans pour autant en saisir la raison.
Fatiguée et trop lasse pour résister, elle se laisse emporter par le sommeil. Un profond sommeil sans rêve, qui l’envoie dans les ténèbres d’une nuit sans fond. Un véritable labyrinthe de contradictions qui ajoutait du mystère à ses interrogations. Un bruit la réveille enfin. Quelqu’un la secouait.
-Réveillez-vous madame. Réveillez-vous.
Elle tenta encore d’ouvrir ses yeux, mais une force supérieure à la sienne l’en empêchait. Le tourbillon la reprit telle une feuille emportée par le vent. Était-elle morte ? Dans ce cas-là, pourquoi ressentait-elle ses membres et entendait-elle des voix ? Son corps flottait sur un nuage. La brouillard pourtant commençait à s’estomper. Elle se dit qu’elle va pouvoir enfin renouer avec ses sens et retrouver son chemin.
-Madame. Madame. Ouvrez donc vos...
Le brouillard n’est plus qu’un souvenir. La lumière devint plus intense. La soleil carré se rapprochait. Ses rayons lui faisaient mal aux yeux. Elle tenta de se protéger avec ses mains. La voix insistait.
-Allez, un peu de volonté madame. Vous êtes hors de danger maintenant !
Le danger ? Qui parle de danger ? Était-elle aussi loin de chez elle qu’elle ne le craignait ? Quelqu’un serrait son bras et elle tenta de reconnaître le sens des mots.
-Mordjana. C’est Samir. Réveille-toi ma chérie. C’est fini. L’intervention est terminée, et tu n’as plus rien à craindre.
Samir. L’intervention ?
Elle sentit son corps se détendre et ses sens reprendre leurs fonctions. Enfin, la lumière s’éloigna d’elle, et elle ouvrit tout grand ses yeux.
-Enfin tu es revenue !
L’exclamation ne lui avait pas échappé. Ses paupières pesaient une tonne, mais elle put les soulever. Samir lui tenait le bras, et ses larmes retombaient sur son propre visage. Elle les essuya d’une main encore molle et aspira un bon coup. L’effort aura pour effet de brûler ses poumons, et elle se mit à tousser.
Une infirmière lui fera boire quelques gorgées d’eau avec une paille.
-Comment te sens-tu ma chérie ?
Elle regarda autour d’elle et fixa le “soleil”. Ce n’était autre qu’un rai de lumière qui émanait d’une lampe au-dessus de son lit. Alors elle comprit tout. On venait de la sortir du bloc et elle se trouvait en salle de réanimation.
Samir lui caressa la joue.
-C’est fini Mordjana. Tu es sauvée.
Elle le regarda sans comprendre. Il s’essuya les yeux.
-On t’avait injecté une forte dose d’anesthésie afin de pouvoir opérer sans encombre. Chahine avait terminé plus tôt qu’il ne le pensait et avait demandé qu’on te ranime dans l’immédiat. Mais cela fait deux bonnes heures qu’on essaye sans résultat. Tu m’as provoqué une de ces trouilles !
Soudain, la mémoire lui revint comme par magie. Elle se trouvait à la clinique et venait de subir une première opération pour l’ablation de son angiome. Que s’est-il donc passé ? L’opération s’était-elle bien déroulée ?
Elle fixa son mari des yeux, et il sourit en hochant la tête.
-Tout s’est bien passé Mordjana. Finalement, le mal n’était pas aussi profond qu’on le craignait. Chahine est très content de son travail et pense pouvoir passer à l’esthétique dans quelques jours.
Ses lèvres refusaient de prononcer les mots qui se bloquaient dans sa gorge. Elle tendit alors la main à son mari qui la prit pour la serrer dans les siennes.
-Tu n’as plus rien à craindre ma chérie. Nous allons te transférer tout de suite dans ta chambre.
Deux infirmiers vinrent la soulever pour la déposer sur un chariot, qu’ils poussèrent ensuite dans un long couloir avant d’ouvrir la porte de sa chambre. On la déposera avec un soin infini sur son lit. Elle regarde autour d’elle, et constate que des bouquets de fleurs étaient déposés dans tous les coins. Leur odeur embaumait les lieux. Samir s’installe à son chevet et lui sourit.
-Comment te sens-tu ?
Elle hoche la tête d’un air serein et fait un mouvement de ses paupières pour lui faire comprendre qu’elle n’était pas mal en point.
-Tu te sentiras mieux dans quelques heures.
à suivre
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