Des Gens et des Faits 27e partie

“LE SERMENT”

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Taos M’HAND Publié 19 Avril 2021 à 21:13

Résumé : Djamel était redevenu plus calme. Elle retrouvait enfin son fils. Ils passèrent une agréable soirée. Le lendemain, il partit très tôt, suivi de Mounir. Pendant plusieurs jours, elle n’eut aucune nouvelle. Un jour, Zaher vint l’informer qu’au dernier ratissage, ils avaient trouvé des cadavres non identifiés. Mais dès qu’il fut mis au courant, il rentra à la maison. Son visage défait par la peur, parlait pour lui.

Djamel s’était rendu à la gendarmerie et alla voir le chef, une ancienne connaissance à son père.  
-Ce sont des femmes ou des hommes ?
-Les corps sont décomposés. Il y a un bout de temps qu’ils ont été enterrés, lui confia-t-il. Ils ont été envoyés à l’hôpital militaire. Ils vont tenter de les identifier. Pourquoi ? Tu recherches quelqu’un ? 
-J’ai une amie, elle a été enlevée. Sa famille a quitté la région, personne ne sait où ils sont allés. Peut-être même qu’ils ont été tués et enterrés quelque part ? Ce n’est pas possible de disparaître comme ça, sans laisser de trace. 
-L’exode rural a commencé lorsque les groupes armés se sont mis à massacrer des familles. Ils frappent où ils peuvent, à l’aveugle, pour terroriser. Il y a des familles qui ont fui et se sont installées à l’autre bout du pays. Ton amie doit être avec sa famille à dormir tranquille alors que tu te ronges les sangs pour elle.
Djamel secoua la tête. 
-Non, je ne crois pas. Si elle était libre, elle serait venue me trouver. Elle appellerait chez moi, elle m’écrirait. Soit elle est prisonnière, soit elle est morte et enterrée quelque part. 
-Je ne l’espère pas. Rares sont celles qui reviennent des maquis, dit le chef de la gendarmerie. 
-Quand est-ce qu’ils enverront les rapports ? 
-Personne ne peut savoir, mais…
Le chef baissa la voix alors qu’ils étaient seuls. 
-Repasse plus tard. Je vais demander les rapports établis ici. Une équipe a pris des photos. Tu penses pouvoir la reconnaître ? 
-Oui…
-Les photos sont horribles à voir, le prévint-il. Elles risquent de te gâcher tes nuits. 
-Ils leur ont fait quoi ?
-Tout… Ce ne sont pas des tendres. Il y avait des cadavres démembrés, précisa le chef. Certains ont été brûlés, d’autres décapités… Tu veux vraiment les voir ? 
Djamel déglutit péniblement, puis hocha la tête. Il était décidé à en avoir le cœur net. 
-Je repasse quand ?
-Dans deux heures.
Djamel le remercia avant de quitter son bureau. Il resta à proximité de la gendarmerie, dans un café où les clients se faisaient rares. Le serveur s’approcha pour prendre sa commande. 
-Ah ! Mais c’est toi ! Quel bon vent t’amène ? 
-Je suis juste de passage, répondit Djamel. Je prendrais bien un café.
-Tout de suite.
Le serveur revint rapidement. 
-Tu es au courant pour les cadavres… Plus de vingt. Il se dit que ce sont plusieurs familles. Il y avait même des enfants. 
Djamel ne supporta pas l’idée que Djamila et sa famille aient pu connaître une fin aussi tragique qu’horrible. Il ne chercha pas à en savoir plus. Même si le temps lui parut interminable, il finit par passer. Le jeune homme alla à son rendez-vous, un nœud au ventre. 
Le chef de la gendarmerie le reçut rapidement, la main sur plusieurs dossiers. Le visage fermé, il semblait hésiter.
-Tu veux vraiment les voir ?
-Oui, dit Djamel avec assurance, même s’il ne sentait plus son cœur battre alors que le chef ouvrait le premier dossier pour en sortir des photos qui le firent écarquiller les yeux. Oh mon Dieu ! 
 

(À SUIVRE)
T. M.

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