Des Gens et des Faits 106e partie

“LE SERMENT”

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Taos M’HAND Publié 25 Juillet 2021 à 18:18

Résumé : Djamila perdit la notion du temps à force d’attendre qu’on vienne lui donner des nouvelles. Elle ne voulait pas le perdre. Elle n’avait que lui. Un infirmier lui conseilla d’aller voir la police. Le chauffeur du taxi l’avait fait à sa place et avait dû répondre aux questions. Il ne comprenait pas pourquoi on lui était tombé dessus. Il ne leur restait plus qu’à prier pour qu’il s’en sorte. Djamila se culpabilisait, ils n’auraient jamais dû revenir au village pour obtenir le certificat de scolarité. Tout ça pour qu’elle ait un avenir meilleur. Mais que sera sa vie sans lui ? 

-Comment va-t-il docteur ? Pourquoi avez-vous pris autant de temps ? 
Est-il revenu à lui ?
Djamila suit le médecin qui lui fait signe d’entrer dans un bureau. 
-J’ai des questions à vous poser, dit-il, en l’invitant à s’asseoir, mais elle refusa. Il a plusieurs plaies… De quoi a-t-il été opéré ?
-Il… Des terroristes ont tiré sur lui, il a failli mourir.
-Aujourd’hui aussi…
-Il ne va pas mourir, n’est-ce pas ? Il n’est plus en danger, n’est-ce pas ? Est-ce que je peux le voir ?
Le médecin lui demanda de se calmer.
-Premièrement, les visiteurs sont interdits en réanimation. Sachez que les prochaines heures sont décisives. Sa famille n’est pas là ? 
-Ils vivent à l’étranger et j’attendais d’avoir de bonnes nouvelles pour les appeler. Je n’ai pas le cœur à leur dire que leur fils est à l’hôpital. 
-Vous devez les mettre au courant. Vous ne pouvez pas garder l’info pour vous. Même vous, vous avez besoin de soutien. Courage, inchallah khir.
Djamila le remercia. 
-Tout ce qui compte est qu’il s’en sorte.
-On fait tout notre possible, promit le médecin. Je reviens vers vous dès qu’il y a du nouveau.
Djamila resta sans réaction pendant un moment. Une infirmière entra et la pria de sortir du bureau. Telle une automate, elle sortit dans le hall, vite rejointe par le chauffeur. 
-Wash guel ? Qu’a-t-il dit ? Yakh, il n’est pas mort ?
-Non, il est entre les mains d’Allah ! Je n’ai pas le cœur à dire à sa famille qu’il est mal. Je vais attendre… Dès qu’il ira mieux, je les appellerais, pas avant.
-Il faut garder la foi, il va s’en remettre. Il est jeune et robuste.
Djamila l’espérait aussi. 
-Ma fille, j’avais promis à ma famille de rentrer tôt. Je te laisse mon numéro, si tu as besoin de quoi que ce soit appelle-moi. 
-Oui, allez-y. Vous ne pouvez rien faire pour lui.
Elle ne chercha pas à le retenir. Elle alla s’asseoir en face des portes des urgences. Des familles accouraient venant aux nouvelles des accidentés. Elle pensa à sa belle-famille. À défaut d’être présente, ils pourront tous prier pour Djamel. 
Elle quitta l’hôpital et chercha un taxiphone. Tout en composant le numéro, elle se demandait par quoi elle allait commencer, mais sa belle-mère lui ôta les mots de la bouche. 
-Comment va mon fils ? Est-ce grave ? Comment est-ce arrivé ? Dis-moi la vérité.
-Mais… Personne ne sait... Comment ?
-Je viens de le rêver. Il lui est arrivé malheur, n’est-ce pas ? Dis moi toute la vérité, lui ordonna Meriem. 
-Il est entre les mains d’Allah. Nous étions partis chercher mon certificat de scolarité pour que je reprenne les études. Ils lui sont tombés dessus.
Djamila se tut en l’entendant gémir et pleurer à l’autre bout du téléphone. Des voix surprises lui parvinrent. Quelqu’un prit le téléphone. Même si elle ne le connaissait pas, elle sut que c’était Norredine. 
-Allô ! Qui est-ce ? Que se passe-t-il ? 
Djamila s’éclaircit la voix et se présenta. Elle lui expliqua ce qui était arrivé à Djamel. Norredine  s’emporta et s’en prit à elle. 
-Il n’aurait jamais dû reprendre avec toi et encore moins se marier. Imbécile qu’il est ! Il n’avait rien appris de ces erreurs. Il a vu la mort de près plusieurs fois. Il faut être taré pour retourner au village. Moi-même, je n’avais pas échappé à leurs remarques et jugements. Tous le prenaient pour coupable. Tu te rends compte qu’il pourrait mourir par ta faute. Tu vois dans quel état tu as mis ma mère et mes sœurs. Sors de sa vie, sors de notre vie. 
-Je… Je n’y suis pour rien. C’est lui… Il voulait que j’étudie…
-Bravo ! J’espère qu’il va s’en sortir. Comme ça j’aurais le plaisir de lui botter l’arrière-train. Je prends le premier vol. Ne bouge pas de l’hôpital.
Il raccrocha sans lui laisser le temps de dire quoi que ce soit. Djamila retourna à l’hôpital et reprit place en face des portes. Elle pria pour que Djamel s’en sorte. Elle ne pourra jamais affronter son frère, même si elle pensait tout comme lui qu’elle lui portait malheur.

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