Des Gens et des Faits 31e partie

Les flammes de la passion

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Yasmina HANANE Publié 08 Février 2021 à 21:27

Résumé : Une jolie femme était assise à proximité de la mare et s’amusait à taquiner les petits poissons. À sa vue, Nazim perdit toute contenance et s’approcha d’elle. Elle fut si surprise qu’elle laissa tomber son chapeau.  Le jeune homme découvrit alors qu’une longue cicatrice lui barrait la joue gauche. 

Nazim regarde autour de lui et remarque que le jardin était pratiquement vide. 
- Vous résidez dans cette clinique ?
- J’y ai passé plusieurs mois. Mais maintenant je ne viens que deux fois par semaine. On m’a suturé la dernière cicatrice.
Elle porte encore la main à sa joue.
- Je pense qu’à l’instar du reste, dans quelques mois il n’y aura plus de séquelles. Ou presque, poursuit-elle.
Sans réfléchir, Nazim propose. 
- Je ne vous fais pas trop peur pour partager mon déjeuner ?
Elle rit. 
- Pourquoi dites-vous cela ? Je viens de vous confier que je suis déjà passée par les mêmes étapes que vous. Moi aussi j’ai porté des pansements durant de longs mois. 
- Alors je conclurais que vous acceptez de déjeuner avec moi.
Elle sourit. 
- Volontiers, jeune homme. Je ne connais pas vote nom.
- Nazim. Et vous ? 
- Nedjma. 
- Nedjma ? Joli prénom. Vous êtes une star alors. 
Elle rit. 
- Pas du tout. J’ai l’air de tout sauf d’une star.
Nazim n’avait pas remarqué que la femme boitait et s’aidait d’une canne pour marcher. Elle fait quelques pas devant lui, puis se retourne. 
- Vous allez déjeuner avec une boiteuse. Une handicapée. 
Nazim ne trouva pas tout de suite les mots qui convenaient dans de telles circonstances. Mais il sentit une grande émotion gronder en lui. Un mélange de pitié et de révolte. La jeune femme avait un air angélique. Un visage d’enfant. Un sourire à damner un saint. Même avec sa cicatrice sur la joue gauche, elle pouvait passer pour une belle femme. Mais maintenant il découvrait une calamité. Le pied droit de Nedjma était visiblement plus court que le pied gauche. 
Il prit une longue inspiration. L’image paraissait si irréelle. On dirait de la fumée sur un écran. Quelque chose comme un grain dans une machine. 
- Alors ?, reprend Nedjma. On est déçu ?
Cette fois-ci Nazim s’empresse de répondre : 
- Déçu ? Mais non, pas du tout ! Je suis tout simplement un peu remué. Je ne pouvais pas savoir. J’aurais dû deviner qu’une chute de plusieurs étages n’est pas sans laisser de profondes séquelles physiques.
- Et morales. On l’a déjà souligné.
- Dans votre cas, je trouve que le moral est plutôt au beau fixe. Vous avez l’air d’une femme qui a beaucoup de caractère.
Elle s’arrête à l’entrée de l’établissement et se retourne vers lui. 
- On m’a toujours dit que j’avais de la personnalité. Du caractère. Et que je pouvais faire face à des situations sans broncher. Hélas. Il y a des choses dans la vie qui vous mettent dans tous vos états avant de vous réduire à néant.
Nazim acquiesce. 
- Je suis passé par là. Et je n’en suis pas encore sorti.
Elle agite la main. 
- Grâce à Dieu, j’ai encore mes deux mains pour frapper, et une langue pour répondre et me défendre en cas de besoin.
Ils rirent. 
- Nous gardons tous un côté agressif. Enfin, je veux dire que malgré la rude épreuve que la vie nous a imposé, nous sommes redevenus tout de même nous-mêmes. Quelque peu. 
- Pas quelque peu. Nous sommes redevenus nous-mêmes, car nous n’avons plus rien à cacher. Nos tares physiques parlent pour nous.
- Vous parlez bien, Nedjma. Vous êtes intelligente. 
- Pas plus que vous. Vous avez l’air d’un homme qui sait ce qu’il fait.
Nazim se racle la gorge. 
- Je crois que je vous ai brusquée. Mon invitation à déjeuner tient toujours en tous les cas.
- Eh bien, si tu veux le savoir, je n’avais pas non plus l’intention de crever de faim. Je craignais de manger seule. Je n’aime pas trop la solitude. Mais parfois, je suis contrainte de la subir.
 

(À SUIVRE)
Y. H.

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