La baisse attendue de la consommation en Asie et l’extension des mesures de confinement mises en place pour lutter contre la propagation du Covid-19 dans plusieurs pays d’Europe ont tiré les cours du pétrole vers le bas. Ces derniers sont retombés à 61 dollars, mardi 23 mars, après avoir atteint la barre symbolique des 70 dollars, il y a quelques semaines. Le pétrole est ainsi en proie à des vents contraires. Et, l’optimisme affiché par les pays pétroliers semble être mis en doute.
L’Institut français du pétrole (IFP) le souligne d’ailleurs dans sa dernière note d’analyse. “L’optimisme, qui prévalait sur le marché pétrolier depuis le début de l’année, s’est fortement refroidi cette semaine face à la recrudescence des cas de Covid, avec ce qui ressemble à une troisième vague pandémique en Europe et à la suite de la publication d’un rapport de l’AIE sur l’évolution de la demande de pétrole à moyen terme.” L’IFP explique que les “indices de mobilité des véhicules sont en dessous des niveaux d’avant la crise en Europe, voire diminuent fortement dans certains pays comme l’Italie, contrairement aux États-Unis et au Japon où la mobilité augmente fortement”. Cela est lié à la crise sanitaire. En Asie, les experts s’attendent à une “baisse significative” des importations de pétrole à court terme en prévision d’une période d’entretien intense des raffineries au deuxième trimestre. Voilà une bien mauvaise nouvelle pour les producteurs d’énergie qui tablaient sur une reprise de la demande, notamment en Asie. Selon les trois principales organisations pétrolières mondiales, l’Opep, l’AIE et l’EIA, la croissance de la demande mondiale de pétrole en 2021 devrait se situer autour de “5,5 à 5,9 mb/j”.
La vision très prudente de l’AIE depuis près d’un an sur la reprise de la consommation mondiale semble “faire consensus”, relève l’IFP. Pour rappel, en juillet dernier, l’EIA et l’Opep estimaient la croissance de la demande mondiale en 2021 à +7 mb/j contre +5,3 mb/j pour l’AIE. Malgré le coup de fouet donné à la demande par le “vortex polaire” cet hiver et l’accélération de l’activité économique avec le début des campagnes de vaccination, les perspectives d’une forte croissance de la demande au premier trimestre de l’année se sont estompées. Côté offre, au total pour l’année 2021, l’EIA s’attend à ce que la production non-Opep augmente de “1,5 mb/j”, tandis que l’Opep prévoit un relèvement de “1 mb/j”. L’AIE reste beaucoup plus “prudente” sur ce point, avec une augmentation de la production non-Opep limitée à 0,8 mb/j, fait observer l’IFP. En janvier dernier, les stocks commerciaux de pétrole de l’OCDE ont diminué de 14,2 mb, soit 0,5 mb/j, selon l’AIE. Si l’Opep maintient sa production comme prévu, la baisse des stocks devrait s’accélérer au deuxième trimestre. Les stocks de pétrole de l’OCDE pourraient ainsi revenir dans la moyenne des cinq dernières années plus rapidement que prévu, d’ici à avril, avec un impact significatif sur le prix d’équilibre du pétrole brut qui, selon ces hypothèses, pourrait dépasser 70 dollars le baril.
Par ailleurs, si le secteur de l’énergie aux États-Unis se remet des pertes qu’il a subies du fait de la crise sanitaire, cela devrait exercer une pression à la baisse sur les prix de l’or noir. “Les Américains pompent à toute vapeur car le forage pétrolier est redevenu une activité lucrative”, a commenté Naeem Aslam d’Avatrade, cité par des médias internationaux. De quoi menacer le niveau des stocks si la consommation ne repart pas assez vite.
Youcef Salami
