Éditorial

Délitement

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Karim KEBIR Publié 29 Avril 2021 à 09:26

On l’affuble, à juste titre d’ailleurs, de fierté de l’université algérienne. Intellectuelle engagée et libre, elle fait figure de rescapée dans une université en perpétuelle régression, aliénée par les archaïsmes de la pensée unique. Observatrice avisée de la scène politique nationale, dont les éclairages font l’objet en permanence de sollicitude de la presse nationale et internationale, elle n’a cessé, dès l’irruption du mouvement populaire en février 2019, mais aussi bien avant, de livrer, avec lucidité, ses analyses, ses points de vue et son regard sur les questions qui agitent son pays.

Pourtant ce mardi, pour avoir été au mauvais moment et au mauvais endroit, Louisa Dris Aït Hamadouche, politologue et enseignante universitaire, a été arrêtée avant d’être relâchée en fin de journée. On ignore ce qui lui est reproché au juste. Mais bien avant elle, un autre enseignant en physique nucléaire à l’université de Bab Ezzouar a eu maille à partir avec les services de sécurité au moment où l’islamologue Saïd Djabelkhir, traîné devant les tribunaux à la suite d’une plainte, est sous la menace d’un emprisonnement pour avoir exprimé une opinion.

Loin d’être exhaustif, ce traitement infligé à notre élite dont le seul tort visiblement, selon une définition religieuse, est de faire partie de ce “petit bataillon d’âmes pour défendre une cause en entraînant la foule dans la voie du bien”, n’est ni un bon signe de notre santé démocratique, ni un bon signal à ces nombreuses compétences éparpillées un peu partout dans le monde et dont l’apport est souhaité pour le redressement du pays. Et si aujourd’hui le pays se retrouve à tutoyer les abysses, c’est précisément parce que cette élite a été marginalisée des décennies durant, lorsqu’elle n’est pas pourchassée. Mais pouvait-il en être autrement à l’ombre d’un appareil bureaucratique et d’un système étouffants, réfractaires à la lumière, à la clairvoyance, hostiles à la critique et n’acceptant que le profil des “faire-valoir”.

Comme d’autres, ils auraient pu choisir des cieux plus cléments, sous d’autres latitudes, pour couler des jours heureux. Mais ils ont fait le choix de rester dans l’espoir, peut-être candidement, de contribuer à leur façon, à la construction d’un autre destin pour le pays. On a pu parfois pointer du doigt la faillite de l’élite dans les moments charnières qu’a traversés le pays. On a aussi critiqué son incapacité à agréger les énergies autour d’une vision pour engager le pays sur la voie de la prospérité. Mais une telle mission ne peut s’accomplir sans la liberté et la démocratie. Entamée depuis longtemps, l’entreprise de délitement va sans doute accentuer le retard et installer le pays dans le sous-développement. 

  • Editorial Un air de "LIBERTÉ" s’en va

    Aujourd’hui, vous avez entre les mains le numéro 9050 de votre quotidien Liberté. C’est, malheureusement, le dernier. Après trente ans, Liberté disparaît du paysage médiatique algérien. Des milliers de foyers en seront privés, ainsi que les institutions dont les responsables avouent commencer la lecture par notre titre pour une simple raison ; c’est qu’il est différent des autres.

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    Abrous OUTOUDERT Publié 14 Avril 2022 à 12:00