Le chantier de l’autoroute Est-Ouest traîne en longueur 15 ans après son lancement tambour battant. Présenté comme un des projets grandioses qui allait propulser l’Algérie dans la modernité, il s’est avéré en fin de compte celui qui résume à lui seul la nature du règne du président déchu Abdelaziz Bouteflika.
Surestimation exagérée des coûts, corruption à coups de centaines de millions de dollars, travaux mal exécutés, absence de contrôle, allongement des délais de réception des tronçons avec l’arrière-pensée de rallonger le budget… Bref, une entreprise de pillage à ciel ouvert où les responsabilités et les complicités ne peuvent s’arrêter au niveau des quelques personnes condamnées dans le procès de 2015. Le chantier de l’autoroute Est-Ouest restera l’exemple type de la gouvernance façon Bouteflika où le populisme et la démagogie faisaient office de philosophie.
Alors que des experts y compris des proches de l’ancien président recommandaient le recours au mode BOT (Build, Operate, Transfer) pour le financement du projet, Bouteflika, dans un accès d’insolence mêlé de fierté mal placée, a balayé la proposition d’un revers de la main. Il opta pour un financement à 100% public de cette infrastructure qui aura siphonné le Trésor public d’au moins 13 milliards de dollars, si l’on prend en compte uniquement les évaluations officielles.
L’État aurait pu s’épargner cette énorme dépense en recourant au système BOT qui présente l’avantage d’assurer le financement du projet par la ou les sociétés réalisatrices. Mais Bouteflika n’en avait cure. L’argent coulait à flots grâce à la providence des cours du pétrole.
Après tout, c’est l’argent des Algériens et pas le sien. Il pouvait casser la tirelire et dépenser sans compter. Et personne, absolument personne n’a au moins essayé de raisonner l’hydre insatiable. Et la perspective d’un troisième mandat valait bien une énième dépense inconsidérée. Résultat des courses : un mégaprojet budgétivore qui ne cesse, 15 ans après son lancement, d’engloutir des milliards et des milliards sans que l’on sache si le dernier tronçon, encore en chantier, sera livré à la nouvelle date fixée.
Le pays se retrouve aujourd’hui, avec l’effondrement des cours des hydrocarbures, à compter ses sous et à tenter de trouver les ressources qui lui permettront de faire face aux besoins de plus en plus grandissants de la population.