L’Actualité La loi électorale sous la loupe de juristes et DE politiques

Interrogations sur le rôle de l’Anie

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Ali BOUKHLEF Publié 20 Janvier 2021 à 22:06

 Mohamed Charfi, président de l’Anie. © Archives/Liberté
Mohamed Charfi, président de l’Anie. © Archives/Liberté

Selon l’opposition, l’Autorité nationale indépendante des élections ne jouit pas de toute l’indépendance que requiert le rôle qui lui est dévolu.

La mouture de la loi électorale, dont les principales dispositions ont été largement reprises par les médias, conforte l’idée, partagée particulièrement par l’opposition, selon laquelle l’Autorité nationale indépendante des élections ne jouit pas de toute l’indépendance que requiert le rôle qui lui est dévolu et risque de favoriser les anciens partis du pouvoir. C’est, en tout cas, l’avis des constitutionnalistes, Ahmed Betatache et Amar Rekhila, et de l’homme politique, Nouredine Bahbouh. 

Ahmed Betatache, par ailleurs ancien premier secrétaire national du FFS, estime, en effet, que la mouture de la loi électorale est venue avant tout en “conformité avec la nouvelle version de la Constitution”. “La commission Laraba a ‘jumelé’ en réalité deux lois : l’une sur les élections et l’autre sur l’Autorité nationale indépendante des élections (Anie)”, relève cet enseignant de droit à l’université Abderrahmane-Mira joint par téléphone. Contrairement à la Constitution qui veut “montrer que cette instance est indépendante”, la mouture présentée par la présidence de la République “a donné la preuve” que l’Anie “n’est pas indépendante”, selon lui. 

Il en veut pour preuve le fait que “tous les membres, à commencer par le président de cette instance, sont nommés par décret présidentiel, donc par le chef du pouvoir exécutif”. En plus de cela, le juriste relève que les “délégations” de l’Anie, qui devront être créées au niveau local, “n’ont aucune valeur juridique” puisqu’“elles ne sont pas prévues” dans la loi qui indique que l’Organisme comporte seulement deux organes, l’un délibérant et représenté par le Conseil et l’autre exécutif, incarné par le Président. “Soit il s’agit d’entités indépendantes, soit elles sont reliées aux instances de l’Anie”, observe-t-il.

Pour sa part, l’ancien membre du Conseil constitutionnel, Amar Rekhila, soutient que la question est plutôt de savoir pourquoi le législateur “n’a pas préparé une loi organique spécialement pour l’Anie” comme cela est mentionné dans la Constitution, alors que Noureddine Bahbouh, président de l’Union des forces démocratiques et sociales (UFDS) estime, de son côté, que le texte s’est plutôt “trop focalisé sur l’Anie”. À propos du système électoral qui introduit le principe de la liste ouverte, Ahmed Betatache remarque que l’instauration de ce régime est venue “mettre un terme au marchandage” des candidatures sur les listes des partis politiques.

Mais cela risque, à ses yeux, de créer des dépassements. Comme par exemple “favoriser le régionalisme et le tribalisme”, surtout lors des élections locales, puisque des candidats issus, par exemple, d’un village plus peuplé ont plus de chance d’être élus par les électeurs qui leur sont proches. À cela s’ajoute le problème du taux encore élevé des électeurs analphabètes qui risquent de se perdre lors d’une élection où ils sont appelés à lire et à cocher le nom des candidats de leur choix. “Cela risque de favoriser les anciens partis du pouvoir”, rappellent, unanimement, Amar Rekhila et Nouredine Bahbouh. Ce dernier estime même que “mettre la barrière des 4% comme condition pour se porter candidat est une forme d’exclusion” pour les nouveaux partis.

S’il admet que l’instauration du principe de parité hommes/femmes dans la mouture de la nouvelle loi électorale a pour but de créer “une sélection positive”, l’ancien député du FFS estime, cependant, qu’il aurait fallu créer les conditions qui sont de nature à encourager les femmes à s’investir en politique. Dans ce contexte, notre interlocuteur préconise une loi qui impose aux partis une parité entre les deux sexes dans les instances des partis politiques pour permettre à la gent féminine de se former, et ensuite de se lancer dans les compétitions électorales. “Mais aller directement vers la parité risque de reproduire l’image de la composition de l’actuelle APN”, relève l’universitaire. 

Une allusion à l’obligation faite, en 2017, aux partis politiques de réserver 1/3 des sièges aux femmes sur les listes électorales. Une situation qui a poussé des formations politiques à remplir leurs listes de femmes sans qualifications politiques. Or, Betatache dit préférer “des militantes” au Parlement. Un avis que partage Amar Rekhila qui recommande, par exemple, de favoriser la parité dans les institutions de l’État avant de penser aux Assemblées élues.

Ali Boukhlef

 

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