L’Actualité AFFAIRE DANS LAQUELLE ABDELMALEK SELLAL ET HOCINE NECIB SONT ACCUSÉS DE CORRUPTION

Le dossier du groupe Amenhyd épluché

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Ali BOUKHLEF Publié 06 Janvier 2022 à 00:09

Hocine Necib. © Archives Liberté |  Abdelmalek Sellal. © Archives Liberté
Hocine Necib. © Archives Liberté | Abdelmalek Sellal. © Archives Liberté

Le pôle spécialisé du tribunal de Sidi M’hamed à Alger a ouvert hier un nouveau  dossier  dans  le  cadre des  procès  liés  au  régime d’Abdelaziz Bouteflika. Il s’agit de l’affaire Amenhyd, propriété des frères Chelghoum,  dans  laquelle  Abdelmalek  Sellal  et  l’ancien ministre des Ressources  en  eau, Hocine Necib, sont  accusés  de  corruption et de dilapidation de l’argent public.

La  société  Amenhyd  est  spécialisée  dans  les  travaux  hydrauliques, l’industrie de matériels de transfert d’eau et d’agriculture. En l’espace de 30 ans, elle est passée d’une petite entreprise à un énorme groupe qui emploie plus de  15 000 salariés. Et comme les frères Chelghoum ont investi dans les hautes technologies, leur société s’est imposée comme une référence dans le domaine. 

C’est ainsi que les frères Chelghoum, Mohamed-Bachir et Djamel-Eddine ont présenté, devant le tribunal, le groupe familial qui n’a cessé de grandir jusqu’à devenir incontournable dès que le gouvernement souhaite réaliser un projet dans le cadre de l’hydraulique. C’est également pour cela qu’Amenhyd a été choisie par le ministère des Ressources en eau pour alimenter en eau potable des villages et les villes de Bordj Bou-Arréridj, de Bouira et de M’sila depuis le barrage de Tilesdit (Bechloul, Bouira). 

Nous sommes en 2014. Des régions entières ont besoin d’eau. Le projet est urgent. Malgré un montant de 7,2 milliards de dinars, qui nécessite légalement un recours à l’avis d’appel d’offres, les autorités ont choisi ce groupe familial, qui s’est mis en regroupement avec la société publique Foremhyd, par un simple procédé de gré à gré.

“Nous avons été choisis tout simplement parce que nous étions les meilleurs à l’échelle nationale, avec une réputation internationale dans le domaine. À cela, il faut ajouter le caractère urgent du projet puisque la population était impatiente”, a expliqué Mohamed-Bachir Chelghoum, P-DG de la société Amenhyd, qui comparaissait libre. Des propos confirmés par le P-DG du groupe, Djamel-Eddine Chelghoum, qui est en détention avec son autre frère, Abdelaziz.

Mais face à l’insistance du juge qui a relevé l’inaction des autorités face aux retards accumulés et les surévaluations du projet, les deux dirigeants ont rappelé que les retards étaient liés à la multiplication des oppositions des citoyens expropriés. 

“Les marchés sont donnés par le ministère, mais les expropriations relèvent des prérogatives du wali. Parfois, cela prend des mois”, a justifié Djamel-Eddine Chelghoum. Il expliquera que les avenants obtenus sur les prix étaient liés à la nécessité de raccorder des villages qui n’étaient pas prévus initialement. Mais dans tous les cas, les deux responsables, rejoints par d’autres frères, ont nié avoir corrompu en contrepartie de projets.

“Nos relations avec les responsables étaient professionnelles et basées sur le respect”, a attesté Mohamed-Bachir Chelghoum, qui a rappelé qu’actuellement, la société Amenhyd est encore sollicitée par l’État pour réaliser des projets de transfert d’eau et le dessalement d’eau de mer.

Les mêmes arguments ont été avancés lorsque le juge a demandé des explications sur l’obtention d’un autre projet de transfert d’eau pour plus de 1,2 million d’habitants à Sétif.

Livré avec plusieurs mois de retard, ce projet a été obtenu, en 2017, après un avis d’appel d’offres. Amenhyd, associée à deux autres entreprises privées, était mieux classée que l’entreprise publique Cosider qui était pourtant moins-disante sur le prix. Les frères Chelghoum ont confirmé, mais ont ajouté un détail important. 

Cosider n’avait pas “présenté la meilleure offre technique”, a objecté Djamel-Eddine Chelghoum, dans un long exposé détaillé sur le fonctionnement de sa société. Là encore, ils ont expliqué que les avenants obtenus étaient liés à l’ajout de nouveaux villages dans le programme. Un fait confirmé par l’ancien secrétaire général du ministère des Ressources en eau, Belkateb El-Hadj.

À ces arguments, les Chelghoum en ont rajouté un autre : au début, les autorités ont “imposé les prix de 2012, alors que nous étions en 2017”. De 7,2 milliards de dinars, le projet a été achevé en 2020 pour un montant global de 10,2 milliards de dinars.

Outre ces projets, le juge a voulu savoir si les Chelghoum avaient bénéficié d’avantages, la réponse est venue de Mohamed-Bachir Chelghoum : “L’État nous doit toujours plus de 7 milliards de dinars. Malgré cela, nous avons mené à terme tous nos projets parce qu’Amenhyd est une entreprise citoyenne.” 

En revanche, les deux dirigeants ont interrogé le président du tribunal sur le fait de savoir pourquoi seule leur société était poursuivie, alors que les projets mis en cause avaient été réalisés conjointement avec d’autres entreprises, dont une appartient à l’État ? Les hauts responsables de l’État, qui se sont succédé à la barre durant l’après-midi, ont tenté d’expliquer que leur relation avec la société Amenhyd était purement professionnelle. 

C’est le cas de l’ancien wali de Médéa, Kamel Abbas, qui a déployé tous les arguments juridiques pour démontrer que s’il avait accordé aux Chelghoum des concessions pour cultiver des olives (une des innombrables activités du groupe Amenhyd), cela s’était fait dans le respect de la loi.

“Je ne regardais pas les noms” des entreprises lors de l’attribution des concessions, a-t-il insisté. Des propos portés par d’autres responsables des wilayas où le groupe Chelghoum avait exercé. Au moment où nous mettons sous presse, les auditions se poursuivaient. Le procès doit continuer ce matin.
 

Ali BOUKHLEF

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