L’Actualité ILS ONT CHAUFFÉ LE TAMBOUR DURANT VINGT ANS

Le silence des courtisans !

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Karim BENAMAR Publié 20 Septembre 2021 à 01:15

© D. R.
© D. R.

Adulé pendant son règne, ignoré à sa mort. Abdelaziz Bouteflika a été inhumé, hier, au carré des martyrs d’El-Alia, à Alger, dans presque l’indifférence totale, n’était la présence du chef de l’État, Abdelmadjid Teboune, et de quelques officiels. Si son décès n’a pas suscité de réactions particulières chez ses anciens opposants et détracteurs, compréhensible du reste, le silence de ses anciens laudateurs et soutiens zélés est, quant à lui, assourdissant. 

Les circonstances, pour le moins tragiques et humiliantes, qui ont conduit à la déchéance de Bouteflika, en 2019, au lendemain des mémorables manifestations populaires réclamant son départ, ne peuvent pas, à elles seules, expliquer ou justifier le mutisme de ceux qui, pendant deux décennies durant, ont juré par celui-là même qui les a faits. 

Ceux qui ont dû leur “existence” à cet homme au parcours politique exceptionnel n’ont pas soufflé mot sur son décès. Homme d’une ambition démesurée pour le pouvoir, entretenant le culte de la personnalité et dirigeant les affaires du pays d’une main de fer, Bouteflika a constitué, dès sa prise du pouvoir, en 1999, une cour d’officieux qui ont toujours rivalisé en louanges, parfois jusqu’à l’obséquiosité.

Partis politiques, représentants de la “société civile”, notables et personnalité dites “nationales” se sont ainsi prêtés aux services du prince, jurant allégeance à Boutefika et poussant le grotesque jusqu’à le présenter, par moment, comme une figure messianique, lui qui, de son vivant, disait ne pas être “Al-Mahdi Al-Mountadar !”. 

C’est ainsi qu’en 2019, alors que la rue connaissait ses premiers grands soubresauts, à travers les gigantesques manifestations populaires du Hirak contre le 5e mandat, Mouad Bouchareb, alors premier responsable du Front de libération nationale (FLN), avait affirmé que “Dieu a envoyé en 1999 le président Bouteflika pour réformer la nation algérienne et la réhabiliter”.

Un autre SG du même parti, Djamel Ould Abbes en l’occurrence, s’est également distingué par des flatteries mémorables à l’adresse d’un président pourtant ravagé par la maladie et incapable, de l’avis de tous les Algériens, de continuer à exercer ses fonctions présidentielles. Et dans ce soutien inconditionnel frisant l’adulation, mais surtout le ridicule, beaucoup ont brillé dans ce registre dans l’espoir de s’arracher les grâces du président.

Avec la maîtrise d’une partition au soupir près, les cadres du RND, du TAJ, du MPA et d’autres partis parasitaires ont constitué pendant deux décennies une garde servile du président prête à sonner la fanfare électorale à chaque fois que Bouteflika briguait un nouveau mandat présidentiel. Mine de rien, cela a duré 20 ans. Quatre mandats entiers à exister dans l’ombre d’un homme dévoré par le pouvoir. 

Ultime génuflexion, lors de la campagne électorale pour l’élection présidentielle avortée de 2019, alors que Bouteflika était déjà gravement diminué, les courtisans, assurés du succès de leur mentor, n’ont pas hésité à exhiber un cheval de bonne race, en offrande au cadre de Bouteflika. Des images burlesques qui ont tourné en boucle sur les réseaux sociaux et retransmises à travers les télévisions internationales.

Les Algériens garderont sans doute longtemps cette image de ces serviteurs prêts à toutes les flagorneries pour garder leurs privilèges et à rester dans les bonnes grâces du monarque. Une humiliation, parmi d’autres, qui a poussé des millions d’Algériens à la rue pour réclamer son départ. Abdelaziz Bouteflika est aujourd’hui décédé presque dans l’anonymat. A-t-il enterré avec lui ses anciens courtisans ? 
 

K. BENAMAR
 

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