S’achemine-t-on vers la fin d’un feuilleton judiciaire aux allures d’un règlement de comptes politique ? La célérité avec laquelle le procès a été programmé semble indiquer que la thèse du “complot” peut bien être abandonnée. Poursuivis dans d’autres affaires en civil, Saïd Bouteflika et Athmane Tartag n’en ont pas encore fini avec la justice.
Deux semaines après l’annulation par la Cour suprême du verdict de la cour de justice militaire de Blida, le procès de Saïd Bouteflika, Mohamed Mediène, dit Toufik, Athmane Tartag et Louisa Hanoune s’ouvre de nouveau aujourd’hui devant le tribunal militaire de la ville des Roses.
“Nous avons été informés, jeudi, que le procès aura lieu ce samedi 2 janvier”, indique Mokrane Aït Larbi, avocat de Louisa Hanoune, confirmant ainsi une information donnée vendredi par le site de Liberté. La décision de refaire ce procès devant la cour de Blida avec une nouvelle composante a été prise après l’arrêt rendu le 18 novembre dernier par la Cour suprême.
Jugés en première instance, puis en appel, pour “atteinte à l'autorité de l'armée” et “complot contre l'autorité de l'État”, les deux généraux à la retraite, ex-patrons des services de renseignements, Athmane Tartag et Mohamed Mediène, dit Toufik, ainsi que Saïd Bouteflika, frère et conseiller de l’ancien président déchu Abdelaziz Bouteflika, ont été condamnés à 15 ans de prison ferme.
La secrétaire générale du Parti des travailleurs, Louisa Hanoune, poursuivie dans la même affaire a été condamnée, quant à elle, à la même peine avant qu’elle ne soit réduite en deuxième instance à trois ans de prison dont neuf mois avec sursis. Ayant purgé sa peine, elle a été libérée en février dernier.
Convaincue qu’elle n’a rien commis d’illégal, la femme politique, qui a toujours clamé son innocence, a décidé depuis sa libération de laver son honneur en réclamant ni plus ni moins l’acquittement. Contrairement au premier procès, celui qui s’ouvre aujourd’hui se déroulera avec de nouvelles donnes.
Deux des prévenus, à savoir Saïd Bouteflika et Athmane Tartag, sont poursuivis dans de nouvelles affaires civiles. L’ancien conseiller d’Abdelaziz Bouteflika, cité dans la majorité des affaires de corruption actuellement enrôlées devant les tribunaux, est officiellement inculpé dans une affaire civile liée à des instructions données, via des SMS, à l’ancien ministre de la Justice, Tayeb Louh, en vue d’influencer des décisions de justice en faveur de certains pontes du régime.
Il est également mis sous mandat de dépôt dans l’affaire dite d’“Istimrariya TV”, du nom d’une chaîne de télévision que la direction de campagne d’Abdelaziz Bouteflika avait mise en place pour faire la propagande autour du 5e mandat en 2019.
L’ancien directeur des services de renseignements, quant à lui, a été mis sous mandat de dépôt dans une autre affaire liée notamment au procès de Mme Maya, la “fille cachée” d’Abdelaziz Bouteflika, qui vient d’être condamnée à 12 ans de prison.
Il est également poursuivi dans une autre affaire relative à l’implication de deux enfants de Djamel Ould Abbes, l’ancien secrétaire général du FLN (actuellement en détention), dans l’achat de places de candidature aux législatives de 2017.
Autre nouveauté dans ce procès : l’ancien chef du département du renseignement et de la sécurité, le général Toufik, sera jugé alors qu’il est en convalescence depuis plusieurs mois, selon les révélations de son avocat, Me Farouk Ksentini. “Le général Toufik est dans une clinique militaire externe depuis trois mois, où il a été opéré, et où il passe sa convalescence”, a-t-il révélé récemment au journal londonien Al Shark Al Awsat.
L’avocat persiste à soutenir que les accusations portées contre son client “n’ont comme appui aucune preuve matérielle tangible et correspondant aux faits”. Ces éléments, conjugués avec l’abandon des charges de “complot”, vont certainement conférer une nouvelle tournure au procès, dont l’issue risque de réserver bien des surprises.
Ali BOUKHLEF