C’est un été particulièrement chaud. Au Sud, c’est la colère contagieuse d’une jeunesse désœuvrée. Au Nord, les robinets à sec font bondir les populations, pendant que la crise sanitaire rebondit et fait craindre le pire. La concomitance de ces trois faits - méfaits - met en difficulté l’Exécutif qui tarde à se mettre en mouvement. Révélateurs de crises structurelles, ces événements donnent à voir les réalités concrètes et vécues qu’il faudra affronter telles qu’elles se présentent. Les minorer ou les ignorer, c’est les laisser se propager tel un foin en feu.
C’est sur les années de déni des réalités que le malaise en tout genre s’est généralisé jusqu’à asphyxier les vies des populations livrées à elles-mêmes. Refuser de voir ces souffrances ne ferait que contribuer à leur aggravation. Ne pas en parler ne pourrait qu’amplifier l’exaspération des populations en quête d’une vie digne. Ce n’est pas en cassant le thermomètre qu’on fait tomber la fièvre sociale. Dans le cas algérien, il faut beaucoup de thermomètres pour mieux mettre la lumière sur les zones d’ombre. D’évidence, le refus d’admettre l’existence de ces problèmes réels et objectifs pour éviter ensuite d’apporter des solutions ne peut que nourrir les instrumentalisations les plus obscures. Les manipulations interviennent en aval.
C’est pour cela qu’il est plus que nécessaire d’identifier et de comprendre les raisons de la colère citoyenne, de poser sur la table les multiples problèmes soulevés un peu partout. C’est l’une des raisons d’être d’un gouvernement. Mais l’action ne peut se limiter à “rassurer” comme elle ne peut se suffire d’un déplacement ministériel avec escorte médiatique et dans lequel, il est plus question de ministre que des causes de son voyage furtif. Tout comme il ne suffit pas de relever un fonctionnaire local pour le remplacer par un autre sans possibilité d’agir sur les évènements en cours. Aux crises structurelles, il faut des solutions de fond, radicales et durables.
C’est comme la lutte contre la corruption. L’emprisonnement des coupables n’arrête pas la machine à fabriquer ce fléau. Et c’est à ce dernier qu’il faudra s’attaquer pour l’arracher à la racine. Les crises que subissent les citoyens trouvent leur origine en partie dans la conception de l’État centralisateur. Son organisation, ses démembrements, le champ des compétences mal réparties, le millefeuille administratif qui excelle dans la production de la bureaucratie mortifère, des lois absurdes et autres passe-droits conduisent inéluctablement à des impasses.
Un écosystème qui empêche la société dans sa globalité de s’émanciper. Ce constat est établi depuis des décennies. Ce qui manque jusque-là, c’est la capacité à changer de fond en comble ce modèle de gouvernance suranné.