Les droits de l’Homme, c’est une lubie d’intellectuels, disait un ancien Premier ministre, aujourd’hui condamné à une lourde peine d’emprisonnement, éloigné d’Alger bien avant la sentence. Il devient, aujourd’hui, d’une certaine manière, avec le traitement qui lui est fait, lui-même victime d’un appareil judiciaire peu regardant sur les droits. Et si d’ex-responsables ont eu à connaître les pratiques “policières” et judiciaires qu’ils avaient souvent feint d’ignorer, comme c’est actuellement le cas avec Belkacem Zeghmati qui parle de tout sauf des exactions et de la torture, qu’en serait-il d’un petit citoyen habitant une “zone d’ombre” reculée tenté de poster sur les réseaux sociaux des images de sa précarité ?
Les révélations du jeune Nekkiche prouvent que ces pratiques inhumaines sont dans la nature même du système, assis depuis l’indépendance, sur la violence, et perçues à force de leur systématisation comme faisant partie des procédures judiciaires. Plus grave encore, avant, on essayait de justifier et de minimiser ces pratiques “délictueuses” d’un autre âge contre ses propres concitoyens, maintenant, on est carrément passé au déni. La question, aussi grave que lancinante et quelles que soient ses conséquences notamment dans les rapports entre le citoyen et le gouvernant, est ignorée, omise et évacuée d’un méprisant hochement de tête.
Dans leur culture, les responsables algériens, à quelques variantes près, pensent pratiquement la même chose que cet ex-Premier ministre sur les droits de l’Homme avec, en prime, une aversion pour les organisations les défendant. Tout cela concourt à renforcer la méfiance du citoyen vis-à-vis de toutes les institutions de l’État et à accréditer l’idée que le respect des droits de l’Homme n’est pas encore assimilé au niveau officiel et qu’il n’y a pas de disposition ou de volonté d’aller dans ce sens.
Et un sacré coup pour cette “Algérie nouvelle” à laquelle seuls ses concepteurs pourraient croire. Parce que vue côté jardin, elle a fait plus de mal que de bien.