Béante est la plaie dans le corps de la Kabylie. La violence des flammes, qui ont rasé ses collines, l’ont plongée dans un drame sans commune mesure. Une tragédie sur laquelle pèse un grand mystère. Près d’un mois après le passage des feux d’une fureur extraordinaire, les populations n’en reviennent toujours pas. Elles ont du mal à réaliser ce qui est arrivé à leur terre. Difficile d’accepter de subir un funeste sort. Mais, elles refusent de céder à la résignation. À peine les victimes enterrées, les villageois des régions embrasées retroussent ses manches et engagent la grande bataille de la vie.
“Tandis que tout s’embrase, l’amour est là pour préserver les racines”, écrivait dans Liberté de cette semaine le célèbre poète Ben Mohamed. C’est cet esprit qui guide les paysans de Kabylie pour labourer les montagnes. Cycliquement blessés, ils savent guérir des flammes. Ils ne peuvent vivre dans ce sombre décor, eux qui ont toujours vécu librement dans le printemps. D’Igrev à Akvil en passant par Ikhlidjen et Thawrirth de Mammeri, femmes et hommes s’efforcent à redonner aux villages leur verdure, leur vrai visage, leur vie.
Ils ont la patience de Sisyphe, mais avec la certitude d’arriver au sommet des collines fleuries. Ils ne courbent pas l’échine. Dans le silence et loin du bruit insignifiant et des vociférations de la haine, les brûlés savent reconstruire, mais aussi et surtout semer les graines de l’amour en pansant leurs blessures. Trop malmenée et régulièrement agressée, la région a grandement besoin de sérénité. Elle a beaucoup souffert. La peur au ventre, les gens ne savent plus où donner de la tête. C’est pour cela qu’il ne faut pas rajouter d’autres drames à la tragédie des feux. Il y va de l’avenir de tout le pays. Les Algérien.ne.s ont montré le chemin à suivre à la faveur de cette dure épreuve.
Et la Kabylie à bien saisi le message. Mais, cette communion fortifiée reste fragile si l’État ne lui donne pas un prolongement politique de nature à conjurer les démons qui ont miné le pays depuis toujours. Les amalgames peuvent s’avérer aussi dangereux qui les flammes d’août 2021. Ils sont annonciateurs des périls. Évoluant sur une ligne de crête courte et étroite, le pays ne peut plus se permettre des erreurs d’appréciation. Plus que jamais, la lucidité doit primer et à tous les niveaux. Il y a désormais un avant et un après les flammes. ■
Éditorial
Guérir des flammes
Hassane OUALI Publié 08 Septembre 2021 à 00:26
Mumtimedia Plus
-
Editorial Un air de "LIBERTÉ" s’en va
Aujourd’hui, vous avez entre les mains le numéro 9050 de votre quotidien Liberté. C’est, malheureusement, le dernier. Après trente ans, Liberté disparaît du paysage médiatique algérien. Des milliers de foyers en seront privés, ainsi que les institutions dont les responsables avouent commencer la lecture par notre titre pour une simple raison ; c’est qu’il est différent des autres.
Abrous OUTOUDERT Publié 14 Avril 2022 à 12:00