Magazine Une usine d’incinération pointée du doigt

Lausanne, capitale olympique polluée à la dioxine

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AFP Publié 17 Octobre 2021 à 09:58

Un plan de la zone polluée à la dioxine au centre de Lausanne, le 15 octobre 2021. © D.R
Un plan de la zone polluée à la dioxine au centre de Lausanne, le 15 octobre 2021. © D.R

Lausanne, la capitale cossue du sport olympique baignée par les eaux bleues du Léman, est confrontée à un problème inédit en Suisse : une pollution à la dioxine.

La quatrième ville du pays est victime des rejets toxiques d’un vieil incinérateur de déchets ménagers. Mais la pollution avec ce produit chimique potentiellement très toxique quand il s’accumule – rendu tristement célèbre pendant la guerre du Vietnam et l’accident industriel de Seveso en Italie en 1976 – a été découverte par hasard au début de l’année. “Comme on n’a pas cherché les dioxines, on ne les a pas trouvées”, les mesures étant concentrées sur la pollution de l’air et de l’eau, explique à l’AFP Natacha Litzistorf, conseillère municipale chargée de l’environnement. 
 
Pire 
Cette semaine les autorités ont révélé que la pollution est plus grave et plus étendue qu’on ne le pensait. Une carte de la ville montre l’ensemble de la surface affectée : une sorte de losange d’une longueur de plus de 5 km en partant des rives du Léman vers le nord-est de la ville et d’une largeur de 3,6 km. La zone de plus forte concentration (plus de 200 nanogrammes par kilogramme) couvre les hauteurs de Lausanne, autour de l’un de ses poumons verts, la forêt de Sauvabelin, tout comme autour de la cathédrale. Un pic de 640 ng a été trouvé au centre-ville. 

Des signes d’avertissement ont été placés sur les terrains de jeu et dans les parcs de la ville. Les parents d’enfants de moins de 4 ans ne doivent pas les laisser porter leurs mains à la bouche s’ils ont joué par terre. Il est aussi recommandé de laver les fruits et légumes cultivés dans les jardins et de se laver les mains. Les recommandations sont plus contraignantes dans les zones où le taux est supérieur à 100 ng/kg. La dioxine se concentrant fortement dans les tissus animaux, il est recommandé de ne pas manger les poules qui y sont élevées ni de vendre leurs œufs. Les légumes racines doivent être pelés, les concombres, les courgettes et autres courges sont considérés comme impropres à la consommation. 
 
Ne pas tenter le diable 
Le coupable a été vite trouvé : l’usine d’incinération en fonction entre 1958 et 2005 et située au centre-ville. “À l’époque on pensait que c’était beaucoup mieux de placer les usines d’incinération dans le centre-ville pour préserver justement l’agriculture dans les campagnes”, explique Mme Litzistorf. Entre 1958 et 1982, quand les filtres de l’incinérateur ont été mis aux normes, l’usine d’incinération a craché de la dioxine sur ses environs. Didier Burgi, qui a un potager, raconte que l’affaire a suscité bien des questions chez les gens qui cultivent leurs légumes depuis des années. “Les courges, on ne va pas les consommer cette année. On n’en a pas beaucoup mais il y a eu une information spécifique là-dessus et on ne va pas tenter le diable”, confie-t-il. 
Aux jardins familiaux du Châtelard, le taux de pollution est de moins de 20 ng et Jose Torres, qui y cultive un lopin, ne compte pas renoncer. “Chez moi, je sais ce que je mange”, lance-t-il, alors que “tout ce qu’on achète, c’est plein de produits chimiques”. 

Jacqueline Felder affiche la même détermination en travaillant son terrain où elle cultive des haricots, des épinards, des salades et des carottes, sous le soleil d’un après-midi d’octobre. “Moi, ça fait quinze ans que je fais du jardin ici. Les gens ont tellement peur de tout maintenant”, explique-t-elle. Et d’ajouter : “Moi je suis paysanne, alors je suis très nature. C’est notre mère, la Terre. Respectez-la !”

Et maintenant
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) note qu’une exposition brève de l’être humain à de fortes concentrations en dioxine peut entraîner des lésions dermiques et altérer le fonctionnement du foie. L’exposition de longue durée s’associe à une dégradation du système immunitaire, du développement du système nerveux, du système endocrinien et des fonctions de reproduction. 
Chez l’animal, l’exposition chronique aux dioxines entraîne plusieurs types de cancer. 

Mme Litzistorf explique qu’à sa connaissance personne n’a encore fait état de problèmes de santé qui seraient liés à la pollution nouvellement découverte. 
Et la question reste de savoir ce qu’il va falloir faire maintenant. Est-il possible de nettoyer le sol sur une telle surface ? “C’est la question que tout le monde se pose”, reconnaît l’édile, mais aussi qui s’en chargerait, et aux frais de qui ?

 


AFP

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