Magazine Grâce à une nouvelle génération de rappeurs très écoutés dans le monde

Le Maroc, nouveau pôle de la production musicale régionale

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AFP Publié 15 Mars 2021 à 21:35

Le rappeur marocain El Grande Toto, à Casablanca le 18 février 2021 © D. R.
Le rappeur marocain El Grande Toto, à Casablanca le 18 février 2021 © D. R.

“Le rap marocain commence à grandir ; ceux qui nous prenaient de haut vont le regretter”, jubile Toto, l’un des phénomènes de la nouvelle scène rap marocaine, qui affole les compteurs des plateformes de streaming et attise les convoitises de grands labels. 

À 24 ans, Taha Fahssi, alias El Grande Toto, est l’artiste marocain le plus écouté sur la plateforme de musique Spotify, loin devant ses compatriotes, avec plus de 20 millions d’écoutes dans 92 pays en 2020. Sa chaîne YouTube cumule 1,7 million d’abonnés et plus de 186 millions de vues.

Ce rappeur indocile au flow (débit, phrasé) aiguisé n’est pas une exception : avec Issam, Dada, Snor, Dollypran ou le duo Shayfeen, il appartient à une nouvelle génération qui a redessiné la carte du rap marocain avec des beats entraînants, des univers visuels percutants et une présence sur les réseaux sociaux savamment entretenue. 

Issam, connu comme “le prince de la trap” depuis son irruption dans ce sous-genre du rap né à Atlanta, aux États-Unis, dans les années 2000, prépare la sortie de son premier album en avril.

L’artiste de 26 ans a décollé en 2018 grâce à Trap Beldi (“trap authentique”), un morceau plein de clins d’œil à la culture pop marocaine, mêlés à des sonorités raï. Le tout mis en scène dans un clip tourné dans un quartier populaire de Casablanca, qui a engrangé plus de 18 millions de vues. 

Trafic mondial  
“On essaie souvent de copier ce qui se fait à l’étranger, mais c’est beaucoup plus intéressant de s’inspirer de ce qui nous entoure”, philosophe celui qui cultive une image de poète maudit 2.0. Ses textes mélancoliques perpétuent les codes du raï – son icône est l’Algérien Cheb Hasni – avec des sons électroniques planants et des clips épurés. 

Avec les réseaux sociaux, Issam dit avoir “créé un lien” avec le public international. Le Maroc “est en train de devenir un pôle-clé dans la production musicale régionale”, souligne Nouran Hassan, responsable communication Moyen-Orient et Afrique chez Spotify. Certains titres de Toto “ont généré un trafic mondial”, ajoute-t-elle.

Lunettes de soleil griffées, cheveux bleu électrique ébouriffés et tirant sur un joint, Toto est devenu la star nationale en 2017 avec son tube Pablo (en référence au narcotrafiquant colombien Pablo Escobar). Sorti début mars, son premier album Caméléon réunit le gratin du rap européen avec les Belges Damso et Hamza, le Hollandais 3robi et le Français Lefa. 

Sa formule est simple : des textes sur son désœuvrement, sa passion pour le cannabis, les rivalités entre rappeurs, débités avec une voix auto-tunée (modification donnant à la voix des sonorités métalliques) sur des 
mélodies entraînantes.

Quelques rappeuses tirent leur épingle du jeu, dominé par les hommes, comme la sensation du moment, Khtek (“ta sœur”), ou encore la confirmée Krtas Nssa (“munitions pour femmes”).

Elles apportent un regard frais, avec des textes engagés évoquant la misogynie ambiante, les inégalités ou encore la puissance de l’ego. Snowflake a émergé il y a un peu plus d’un an avec un “freestyle”, une improvisation sans titre, diffusé sur YouTube et dans lequel elle évoque son entrée fracassante dans le “rap game”. 

Récits de femmes 
“C’est grâce à cette dynamique que j’ai commencé. Avant, ça me paraissait inaccessible”, confie celle qui autoproduit actuellement son premier EP (mini-album). “On a besoin d’entendre des récits de femmes”, affirme l’artiste de 25 ans qui, travaillant dans la communication, préfère s’exprimer sous son nom de scène.

Les attaques misogynes visant les rappeuses sur les réseaux sociaux, “ça ne m’atteint plus”, précise-t-elle. Malgré cette euphorie sur la scène rap et son exportation au-delà des frontières du royaume, l’industrie musicale reste balbutiante au Maroc faute de relais établis (salles de concert, festivals, maisons de disque, radios).

Les labels y proposent principalement des contrats de distribution et non de production de disque : RCA Records, filiale du géant américain Sony, a signé Toto en 2020, tandis que Def Jam Island Records, dépendant d’Universal, a mis Issam dans son giron en 2019.

Le rappeur Anouar El Bouhli, alias Dada (“grand frère” en langue amazighe), a, lui, récemment rompu avec un grand label français et veut monter un studio indépendant à Agadir (Sud), sa ville, “sinistrée culturellement”.

“Ça marche pour moi (alors) j’essaie d’aider d’autres artistes”, explique ce héraut de la culture berbère, connu pour ses textes dans lesquels il rappe le mal-être de toute une génération face aux inégalités. 
 

AFP 

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