Magazine CÉLÈBRE AU VENEZUELA, IL EST AUSSI LE LIEU DE NAISSANCE D’UN DICTATEUR

Michelena, le village légendaire de Carlos

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AFP Publié 21 Décembre 2021 à 15:54

Vue du village de Michelena. © D. R.
Vue du village de Michelena. © D. R.

“Michelena, 25 000 habitants, son dictateur, son terroriste.” Ainsi pourrait-on imaginer un panneau à l’entrée de cette petite ville tranquille de l’ouest du Venezuela, d’où sont originaires le dictateur Marcos Perez Jimenez (1952-1958) et la famille d’Ilich Ramirez Sanchez, dit Carlos, figure du terrorisme anti-impérialiste des années 1970-80.

Les maisons familiales des deux hommes se trouvent d’ailleurs dans la même rue, donnant sur la place Simon-Bolivar. Celle de la famille de Carlos, alias le Chacal, est connue de tous les habitants mais aussi de toutes les polices du monde, selon une légende urbaine que tout un chacun dégaine. Il y a quelques variantes à cette histoire impossible à vérifier. 

“Lors de la mort de sa grand-mère (on évoque aussi sa mère ou son oncle, ndlr), on pensait que Carlos allait venir. Des dizaines d’agents de la police secrète sont alors venus pour l’arrêter. Ils se sont postés partout, même dans le clocher de l’église, pour le repérer”, raconte Leonardo Escalante, policier,  49 ans.

“Ils ne l’ont pas vu et ont conclu qu’il n’était pas venu. Plus tard, une tante a révélé qu’il était bien venu et s’était déguisé en curé. L’homme aux mille visages”, sourit le policier, qui avoue ne pas savoir si l’histoire est vraie.

Sur la piste du Chacal
Certains racontent que le “curé” aurait donné l’extrême onction à la mourante, d’autres que la CIA ou les services secrets français étaient là. M. Escalante souligne que Carlos est parfois considéré comme une espèce de Robin des Bois : “Il est célèbre, était révolutionnaire, a vécu en Europe, avait des facilités pour les langues...” 

Au café Casagrande, la patronne Ana Josefa Rosales, 69 ans, n’a pas connu Carlos, mais n’apprécie pas le personnage : “Tant de tueries. Quel malheur ! Une famille respectable. Il est le seul qui a mal tourné. Il a sali le nom de Michelena.” Carlos, 72 ans, condamné trois fois à la perpétuité, est emprisonné en France depuis 27 ans. 

Un grand bol 
Amable Abad Tapias Colmenares, historien officiel de la ville, souligne que Carlos “n’est pas né à Michelena”, “contrairement” à ce qui est mentionné un peu partout (il ne figure pas sur les registres d’état civil). 

Le lieu de sa naissance reste incertain, mais sa mère et son père étaient de la région. Son père était un avocat fortuné, “intellectuel” réputé pour sa verve, dit M. Tapias.

Communiste, il  a  nommé  ses  trois  enfants  Vladimir, Ilich  et  Lenin, en hommage au révolutionnaire russe Vladimir Ilitch Oulianov, dit Lénine. Les enfants se rendaient régulièrement dans la région, notamment chez leur oncle boucher. “Un jour, un monsieur pauvre n’avait pas assez pour payer, Ilich est intervenu pour qu’on lui en fasse cadeau”, assure, sans citer ses sources, M. Tapias.

“Dans leur maison, il y avait un grand bol. Le père, communiste, mettait de l’argent et chaque fils pouvait se servir comme il voulait selon ses besoins. Mais il fallait en laisser pour les autres. C’est comme ça que Carlos a été éduqué”, raconte un membre de la famille sous le couvert de l’anonymat. 
Après un séjour en Angleterre, 

Ilich bénéficie d’une bourse du Parti communiste pour étudier à Moscou en 1968. Il se rend ensuite en Jordanie et à Londres, où il devient Carlos.

Selon M. Tapias, ce prénom pourrait lui avoir été inspiré par un membre de sa famille, le lieutenant Carlos Julio Ramirez, qui “a participé à la révolution d’août 1945” au Venezuela, un coup d’État orchestré par des militaires alliés à des partis démocrates. 

Parmi les putschistes, un autre militaire né à Michelena en 1914 : Marcos Perez Jimenez, qui dirige le pays d’une main de fer de 1952 à 1958, avant de se réfugier dans l’Espagne de Franco, un pays où il meurt en 2001. 

Deux coups d’État, arrestations d’opposants, répression, fraudes électorales... Le dictateur a cependant une immense statue à Michelena. Un petit musée lui est dédié et un grand portrait est accroché à la mairie. 

Ici, on aime Marcos Perez Jimenez et on ne s’en cache pas. Tout un chacun vante les mérites de celui qui a lancé dans le pays une politique de grands travaux grâce à l’argent du pétrole.

“C’était un visionnaire. Il a fait des choses qui fonctionnent encore aujourd’hui”, dit Javier Moreno, employé d’une ONG. Il balaie les rappels sur le manque de démocratie : “À l’époque, il y avait de la discipline. Il a construit le Venezuela moderne. Nous sommes fiers de lui.” 
 

AFP

 

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