Magazine Son produit est l’un des meilleurs au monde

Sao Tomé, “l’île chocolat”

  • Placeholder

AFP Publié 01 Décembre 2021 à 08:57

Des fèves de cacao à la plantation Diogo Vaz de Sao Tome, le 19 novembre 2021.. © D.R
Des fèves de cacao à la plantation Diogo Vaz de Sao Tome, le 19 novembre 2021.. © D.R

Une saveur puissante et subtile s’épanouit sur la langue. “Quand ça commence à ramollir, tu croques”, ordonne le truculent Claudio Corallo, un agronome italien qui fabrique un des meilleurs chocolats du monde sur le petit archipel africain de Sao Tomé-et-Principe.

La mâchoire se referme sur la petite boule de chocolat fondu. Et le gingembre éclate en bouche. Un délice. Vite, un autre ! Café, poivre, fleur de sel... Et le noir surtout, au plus près du goût pur et intense des fèves de cacao récoltées sur ses plantations de l’île de Principe. Premier producteur de cacao à la fin du XIXe siècle, le petit archipel lusophone a perdu dans la deuxième moitié du XXe siècle la quasi-totalité de sa production. Aujourdhui, quelques entrepreneurs redonnent vie à la filière en misant sur un chocolat haut de gamme. 

“Miser sur la qualité, c’est la seule option pour survivre”, explique à l’AFP Jean-Rémy Martin, un Français qui a repris il y a une dizaine d’années une ancienne plantation à l’agonie dans le nord de l’île de Sao Tomé, à Diogo Vaz, et qui a créé avec son fils sa marque de chocolat du même nom. Sur les pentes d’un ancien volcan surplombant l’Atlantique, le cacao, issu des anciens plants importés par les Portugais au XVIIIe siècle, se développe sous une canopée de 420 ha au cœur d’une nature luxuriante. La mécanisation est impossible. Et le sol, fertile, ne nécessite ni engrais ni pesticides. 

“Malgré notre certification bio, la seule culture du cacao ne permettait pas de couvrir les charges”, raconte M. Martin. “Pour garantir la durabilité de notre activité, nous devions conserver la valeur ajoutée de l’arbre jusquà la commercialisation de la tablette et assumer 100% de la transformation en interne.” “Nous sommes ainsi passés du régime de monoculture réduit à la fixation des cours du cacao par les acheteurs mondiaux, à la maîtrise totale de nos prix et de la valorisation de notre cacao dans la chaîne de valeur”, poursuit-il. Depuis, le chocolat Diogo Vaz s’est imposé à l’international, remportant de nombreux prix, et les marges réalisées lors de la transformation et de la commercialisation permettent de renvoyer à la production le soutien nécessaire pour assurer son équilibre. 

Aujourd’hui, environ 250 personnes, presque toutes Sao-Toméennes, sont employées par l’entreprise, qui cherche à diversifier sa production et à répliquer son modèle du cacao pour la culture des fruits et de la vanille, transformant ses produits en pâtisserie ou alcool. 
 
“Miser sur la qualité” 
Même pari gagnant pour Claudio Corallo. Ce Florentin d’origine, amoureux de l’Afrique et spécialiste du café, a fait figure de pionnier en cherchant à produire un cacao d’excellence à Sao Tomé. Il s’y installe au début des années 1990. “Moi, je n’aime pas le chocolat”, déclare-t-il avec malice à l’AFP. Son chocolat est pourtant aujourd’hui reconnu par ses pairs comme un des meilleurs au monde. Sa quête a été de découvrir l’origine de l’amertume du cacao dans ses “laboratoires”, sa plantation à Principe et son atelier à Sao Tomé. Sa philosophie, “n’utiliser que des produits naturels” pour “être en parfaite harmonie avec l’environnement”. Une fois le chocolat prêt pour la dégustation, “la principale difficulté est l’exportation” car les tracasseries logistiques sont monnaie courante dans cette île d’Afrique centrale, située à plus de 300 km des côtes gabonaises du continent. Le cacao est ancré dans l’histoire de Sao Tomé-et-Principe. À la fin du XIXe siècle, l’archipel était le premier producteur mondial avec près de 35 000 tonnes par an. Poussés par le colonisateur portugais, des milliers d’immigrés du Cap-Vert, de l’Angola et du Mozambique sont venus servir de main-d’œuvre dans ces plantations dans des conditions très difficiles. 

Mais après l’indépendance en 1975, “les Portugais sont partis avec leur savoir-faire, des épidémies ont attaqué le cacao et l’État a redistribué des terres à d’anciens employés sans aucun encadrement. La production s’est effondrée”, explique à l’AFP Maria Nazaré Ceita, historienne à l’université de Sao Tomé. “Toute notre économie s’est assise sur le cacao et toute la population est liée d’une façon ou d’une autre au cacao”, résume à l’AFP Carlos Vila Nova, président de la République de Sao Tomé. “Aujourd’hui, nous avons un savoir-faire qui nous permet de très bien connaître le produit”, souligne-t-il. “Dans l’économie mondialisée, il faut lui donner une plus-value. Il faut miser sur la qualité. Grâce à l’extension de la transformation, l’avenir de la filière est de nouveau croissant”, estime-t-il. 

 


AFP

  • Editorial Un air de "LIBERTÉ" s’en va

    Aujourd’hui, vous avez entre les mains le numéro 9050 de votre quotidien Liberté. C’est, malheureusement, le dernier. Après trente ans, Liberté disparaît du paysage médiatique algérien. Des milliers de foyers en seront privés, ainsi que les institutions dont les responsables avouent commencer la lecture par notre titre pour une simple raison ; c’est qu’il est différent des autres.

    • Placeholder

    Abrous OUTOUDERT Publié 14 Avril 2022 à 12:00

  • Chroniques DROIT DE REGARD Trajectoire d’un chroniqueur en… Liberté

    Pour cette édition de clôture, il m’a été demandé de revenir sur ma carrière de chroniqueur dans ce quotidien.

    • Placeholder

    Mustapha HAMMOUCHE Publié 14 Avril 2022 à 12:00